Cohabitation forcée
Habitué fidèle de notre rubrique, le photographe naturaliste Michael Breuer nous offre cette scène hivernale prise voici quelques années dans le massif forestier du Spessart, situé au nordouest de la Bavière, en Allemagne. « Cette région n’est que rarement touchée par la neige », nous explique-t-il en préambule. « Aussi, quand en février 2013 la campagne a revêtu un tel manteau blanc, j’ai naturellement décidé de sortir, caressant l’espoir d’immortaliser quelques animaux sur fond de neige. Je m’étais installé sur une zone que je connaissais pour être dénuée de toute présence humaine. Il faisait froid et il neigeait abondamment. Après deux heures d’attente infructueuse, alors que j’allais quitter mon poste, deux sangliers, visiblement en quête de nourriture, ont enfin pointé leur nez. J’ai commencé à faire quelques clichés quand soudain, pour mon plus grand bonheur, s’est présenté ce renard à travers mon objectif. Les différents protagonistes ont toujours conservé un minimum de distance entre eux, mais je n’ai constaté aucune agressivité. Quel bonheur de pouvoir immortaliser une telle scène ! » Photographier ces deux espèces sur un seul et même cliché n’est en effet pas chose courante. Toutefois, dotées d’exceptionnelles facultés d’adaptation tant en termes d’habitat que de nourriture, ces deux espèces, connues pour être opportunistes, colonisent souvent les mêmes biotopes. Cette proximité entre sangliers et renards ne date pas d’hier. Les anciens avaient l’habitude de dire que le sanglier chassé évoluait souvent dans la voie du renard. Les témoignages d’un goupil empruntant une coulée et suivi quelques secondes plus tard par un suidé sont d’ailleurs nombreux, et évoqueront probablement d’inoubliables souvenirs à certains de nos lecteurs… Si la plupart des équipages, dits de battue, créancent leurs chiens sur un gibier déterminé, on notera que ceux découplant dans la voie du sanglier laissent, pour nombre d’entre eux, leurs auxiliaires chasser dans celle du renard. Outre cette cohabitation avérée, la proximité des animaux présents sur cette image s’explique aussi vraisemblablement par les difficultés à trouver de la nourriture sous de telles conditions météorologiques. Michael Breuer, avec Gérard Hagenet