Connaissance de la Chasse

À la calleuse, au Québec

ESPÈCES & TECHNIQUE SURPRENANT­ES

- par Philippe Aillery (texte et photos)

Le jour n’est pas encore levé lorsque nous retrouvons le guide et organisate­ur de chasse Marcel Saint-Pierre sur le pas de la porte d’une dépendance de son domicile. Notre montre indique 5h30 et nous sommes pile à l’heure au rendez-vous fixé la veille au soir. L’air est frais en cette mi-octobre. Notre hôte nous encourage à bien nous couvrir. Sur ses conseils, nous ajoutons donc une couche de vêtements supplément­aire, chaussons une paire de wadders puis enfilons gants et bonnet. Ceci fait, l’homme nous fait traverser la route qui longe sa mai- son et nous descendons la berge abrupte d’un chenal pour atteindre un ponton où une imposante embarcatio­n en aluminium nous attend. Chacun s’installe à la place désignée, les amarres sont larguées et d’un coup de démarreur le moteur prend vie.

Feu orange à l’horizon

Nous filons bientôt à bonne allure sur les eaux endormies. Malgré sa parfaite connaissan­ce des lieux, le pilote conserve en main un puissant phare qu’il active à la moindre tache suspecte encombrant la nappe. Sur notre passage, des kyrielles d’oiseaux décollent, beaucoup de hérons et de cormorans notamment. Au fil des minutes, la voie s’élargit et nous débouchons subitement sur le gigantesqu­e lac. Aussitôt, le clapot se fait plus fort et le vent nous cingle le visage. Petit à petit, la berge l’éloigne et nous naviguons en pleine eau. Nous nous apercevons alors que le trafic est dense. Beaucoup de barques convergent en tous sens. Nous découvrons que ce sont autant d’équipes de chasseurs, ou de pêcheurs,

Mode de chasse atypique s’il en est, la calleuse permet un camouflage surprenant au beau milieu des flots. Sur l’immensité du lac Saint-Pierre, ce type d’affût est pratiqué par une infime poignée de sauvaginie­rs amateurs de sensations fortes.

qui s’en vont rejoindre leurs spots. Mais Marcel nous assure que là où il nous emmène, la concurrenc­e sera cependant inexistant­e. Quelques minutes plus tard, une balise clignotant­e orange retient notre attention. Le capitaine de notre navire fonce droit dessus, décélère progressiv­ement à son approche et finit par accoster ce qui se révèle être la fameuse calleuse. L’objet nous apparaît comme un genre de plateforme flottante plate d’environ trois mètres sur deux. Elle est surplombée d’un caisson couché à l’horizontal d’à peu près un mètre sur quatre-vingt centimètre­s sur lequel est placé le fameux feu de signalisat­ion.

Deux chasseurs maximum

Alors que nous observons dans les détails l’étrange ensemble, le guide y prend place et entame la procédure de mise en action. Ainsi, après avoir démonté le clignotant, il bascule la caisse métallique en position verticale et, à l’aide de deux grosses manivelles actionnées simultaném­ent, il entreprend de la faire descendre par le biais de vis sans fin. Peu à peu, le réceptacle s’enfonce en force dans l’eau jusqu’à ce que ses bords affleurent ceux de la plateforme flottante. Il s’empare alors de deux lourds lestes qu’il positionne sur le plancher de la cache afin de gagner en stabilité. Chose faite, il reprend place à bord de son bateau et nous donne les consignes : « Soyez très prudents dans le maniement des armes. Restez bien assis et levez-vous seulement pour faire feu ou pour m’indiquer que vous souhaitez mon interventi­on. Ne tirez pas

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Radeau d’apparence anodine, la calleuse s’avère un redoutable affût de plein eau.
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Parfois, des canards de surface, ici des pilets, se laissent prendre à la mise en scène de la calleuse.

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