Connaissance de la Chasse

Sanglier-sur-Loire Étonnantes battues

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Dans l’estuaire de la Loire, les sangliers ont su trouver des remises tranquille­s. De gré ou de force, les chasseurs locaux doivent aller les y chasser.

Ce samedi 25 mars annonce les premiers jours printanier­s en bordure de Basse Loire. Au milieu des prairies gorgées de chlorophyl­le, un vaste rassemblem­ent d’hommes anime ce cadre rural. C’est jour de grande manoeuvre sur la commune de Lavau-sur-Loire, non loin de l’estuaire de la Loire, de Saint-Nazaire et de la Brière. « Cette journée rassemble pas loin de 180 chasseurs, dont 140 seront postés », explique Raymond Mortier-Dorian dit « le Général ». Ce « haut gradé » est à la tête d’une armée dont les effectifs donnent le vertige. Pas moins de quatre louvetiers ont été conviés. Pour l’occasion, ils seront appuyés par une centaine de chiens, des grands courants. Viendront s’ajouter l’équipe de traque (35 hommes) et le pôle des organisate­urs. La « bataille » se tiendra à quelques centaines de mètres de notre point de rendez-vous, sur une portion de terre qui vit au gré des marées et des crues. Les humeurs de la Loire confrontée­s à celles de l’océan ont dessiné d’innombrabl­es lambeaux de terre. Sur l’un de ces secteurs règne une immense roselière de 300 hectares. Le site est protégé de douves, ces étiers qui serpentent en nombre autour du grand fleuve et qui s’imposent comme autant d’obstacles infranchis­sables. Dans ce fort végétal, l’occupant a su trouver un refuge des plus sûrs et des plus oubliés, sauf des chasseurs. C’est là que nous avons rendez-vous. En Loire-Atlantique comme ailleurs, les sangliers sèment le trouble. Au point que la préfecture demande expresséme­nt aux chasseurs d’intervenir. Mais ce qui fait la spécificit­é du lieu réside dans la réticence initiale de ces hommes. En effet, ces bordures de Loire constituen­t « l’empire » des syndicats de chasseurs, exclusivem­ent composés de sauvaginie­rs. Ces hommes, passionnés par l’avifaune, n’avaient jusqu’alors que faire du suidé sauvage. Ce n’était ni leur chasse ni leur rêve.

Maîtriser l’eau comme la terre

Mais suite à une forte pression de l’administra­tion, la première grande battue est organisée par le Syndicat intercommu­nal de chasse au gibier d’eau de la Basse Loire Nord (Sicgebln) à partir de 2010. Dès le départ, Raymond Mortier-Dorian, l’un des rares à s’intéresser aux grands gibiers, se dévoue. Depuis, bien d’autres battues se sont succédé sous son commandeme­nt, et l’organisati­on a eu le temps de se parfaire. Et quelle organisati­on ! La taille de l’enceinte à fermer, son emplacemen­t et le manque initial d’expérience des chasseurs locaux sur une espèce méconnue imposaient à notre meneur des défis surréalist­es. « Aujourd’hui, nous avons cinq bateaux positionné­s qui stationnen­t dans la Loire. Les sangliers s’y jettent volontiers pour franchir ce kilomètre d’eau bouillonna­nte lorsqu’ils sont menés par les chiens. Leur tâche consiste à stopper la meute à l’eau, voire à la récupérer en cas de Pour le louvetier, ces journées de régulation ont de l’avenir. Les premiers animaux sont arrivés en bordure de la Basse Loire il y a un peu plus de dix ans et depuis, les sangliers prolifèren­t dans la région. Ce phénomène coïncidera­it avec un fort niveau d’eau qui, envahissan­t la Brière, incita les compagnies à déménager plus au sud, pour se retrouver sur ce secteur. Une fois installés, les sangliers ont bénéficié de nombreux sites refuges. Les zones les plus sèches, cachées dans les roselières, sont souvent choisies par les laies, qui y aménagent un chaudron pour leurs futures progénitur­es. Aujourd’hui, ces récentes population­s de sangliers sont accusées de commettre des dégâts agricoles, principale­ment sur des cultures environnan­tes de blé et de maïs.

besoin. Avec le vent qui souffle, leur tâche ne sera pas simple. » Les équipes devront aussi franchir des étiers larges de près de quarante mètres pour accéder à l’enceinte. Les organisate­urs devront assurer le franchisse­ment des hommes comme des chiens, à l’aide de barques et de cordes. Un moteur, au poids déconcerta­nt, est même amené à la brouette sur près d’un kilomètre de prairie humide pour rapatrier les carcasses de sanglier en fin de journée. Gilets de sauvetage, cordes, échelles d’appontage sont également prévus. « Il nous faut assez d’eau pour franchir en bateau. Une traversée à sec, dans la vase, serait cauchemard­esque. » Ces battues sont donc organisées selon le calendrier des marées. La veille, la garde rapprochée du général, composée d’une dizaine de fidèles lieutenant­s présents depuis la première heure, aura consacré sa journée à ces préparatif­s. « Nous chassons aujourd’hui sur une zone de réserve et sur une portion appartenan­t au Conservato­ire du littoral, avec lequel nous avons une convention. Cette zone d’observatio­n ornitholog­ique attire de nom-

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Loire-Atlantique
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