Silencieux et sauvage
Bonne nouvelle. Un arrêté ministériel du 2 janvier – publié au Journal officiel le 23 du même mois – autorise l’emploi à la chasse du modérateur de son. Il faut savoir que lors de l’assemblée générale de la Fnc en mars 2017, le président Willy Schraen avait tordu le bras du représentant du ministère de la Transition écologique et solidaire (sic) afin d’obtenir la signature du document. Pensez-vous que Ségolène Royal, alors en place, et Nicolas Hulot, son successeur, autorisèrent cela de gaieté de coeur ? Cette avancée sera très utile principalement aux chasseurs à l’approche et à l’affût du grand gibier et du renard. Pratiques appelées à se développer, notamment dans les zones périurbaines ainsi que dans les campagnes mitées par des lotissements. Voilà pourquoi cet outil ne relève pas du gadget mais d’une nécessité réelle. [lire page 22] Il y a trois ans déjà, Connaissance de la Chasse vous révélait que le sujet deviendrait d’actualité. Bravo à notre limier ! [lire n° 468 d’avril 2015, page 28]
Cette avancée risque de faire moins de bruit que le dossier oies. Et c’est grand dommage. M. Hulot vient de refuser la dérogation de tir de 5000 oies grises en février alors que leurs populations prospèrent, et que ce quota n’aurait pas été atteint par ailleurs. [lire éditorial du n° 502 de février 2018] Aussi les sauvaginiers sont-ils décidés à faire entendre leur colère lors de manifestations régionales. Des débordements sont à craindre. En fait, cette situation relève d’un cocktail singulier : - pendant des décennies, les responsables de la chasse du gibier d’eau ont trop misé sur le politique ; - a contrario ils ont tardé puis pas assez développé la gestion et la recherche scientifique concernant le gibier d’eau ; - trop souvent les sauvaginiers ont été alimentés par un discours irréaliste au mieux, démagogique au pire ; - de leur côté, depuis longtemps les écolos – Lpo en tête – tentent de faire une Opa sur l’avifaune, notamment migratrice ; - au niveau européen voire mondial, la conservation des oiseaux migrateurs se complexifie. Résultat, dans un contexte tendu les sauvaginiers manquent cruellement d’arguments probants pour défendre leur art. Rendez-vous en février 2019. Il semble de plus en plus logique que la représentation fédérale devra alors oeuvrer avec l’Oncfs afin de trouver des solutions indiscutables pouvant être validées rapidement par le ministère de tutelle. La chasse française peut-elle ne compter que sur elle-même et sur ses seuls alliés politiques du moment ?
Pendant ce temps, le loup progresse. Officiellement 360 sujets sont recensés en France. L’espèce foule désormais les Costières de Nîmes comme l’Allier et la Somme. Le loup n’est plus un montagnard exclusif, il sera demain – à moins qu’il n’y soit déjà – en Sologne, dans les grands massifs du Nord-Est, dans les Landes, voire en Fontainebleau ou en Orléans. Le fauve prospère sous la protection de l’Europe et de l’État, lesquels laissent le soin aux éleveurs de moutons, aux louvetiers, aux chasseurs et à l’Oncfs de gérer l’espèce. Cela signifie gérer le désespoir des bergers, verser des indemnités et tuer 10 % de la population lupine. Population sous-estimée alors que de nombreux connaisseurs du dossier évoquent 500 loups, et que de plus en plus de canidés sauvages sont victimes de collisions routières. Indice très révélateur.
Surprise, le « sauvage » progresse également à la télévision. Sur RMC Découverte, l’étonnante série Seuls face à l’Alaska nous plonge dans la vie des trappeurs et chasseurs du Grand Nord. La mort est donnée, l’animal est dépouillé, dépecé, consommé, sous l’oeil des caméras. Poursuivons le zapping. Sur Discovery Family, récemment un film nous fait partager le quotidien d’un chasseur d’ours, lequel se délecte de la chair de l’ursidé comme il se doit. Tandis que sur France 5, un numéro d’Échappées belles expose la joie du trappeur canadien à la découverte d’un grand loup piégé, et congelé. Et cela, ni Ségolène, ni Nicolas ne peuvent l’empêcher… Bonne lecture à toutes et à tous.