Peste porcine africaine: quoi de neuf ?
SITUATION MAÎTRISÉE … À CE JOUR
Combien de sangliers sont-ils atteints ?
Le 4 octobre, Connaissance de la Chasse imprimait les lignes faisant état de 32 sangliers infectés par la peste porcine africaine. Information fournie par les très réactifs services de la cellule presse et communication de M. René Collin, ministre du Gouvernement wallon en charge notamment de l’agriculture et de la chasse. C’était sans compter sur la virulence de l’épizootie. Le 12 octobre, les mêmes services annonçaient un total de 79 sangliers infectés. Le 30 octobre, 155 animaux. Le 9 novembre, à la veille de l’impression de ce numéro, il est comptabilisé 161 sangliers infectés, sur un total de 344 animaux analysés. 296 proviennent du périmètre de contrôle de 63 000 ha (en bleu ci-dessus), 48 proviennent de l’extérieur. Sur ces 296 animaux, 24 ont été chassés dans la Zone d’observation renforcée (zone III) et sont négatifs. Tandis que la quasi-totalité des 161 cas positifs provient de la zone noyau (I), moins d’une dizaine de ceux-ci provenant de la zone tampon (II). Question : de quoi sont morts les 111 sangliers négatifs trouvés dans le périmètre de contrôle ? Ces animaux n’étant pas morts de la Ppa, n’ayant pas été chassés, quelle est la cause de leur trépas ? Hélas, les carcasses ne subissent qu’une analyse
de la Ppa, et non d’autres maladies éventuelles, et sont détruites. La logique des choses voudrait que la quasi-totalité de la population de sangliers du secteur le plus sensible – zones I et II soit 42700 ha – soit atteinte. Et donc condamnée (à hauteur de 90 % environ), tant le virus de la Ppa est contagieux et virulent. Des observateurs locaux envisagent un « tableau » de 500 à 800 animaux. Selon Benoît Petit, président du Royal Saint-Hubert Club de Belgique, la densité de sangliers est « relativement pauvre dans le secteur d’Etalle comparée à celles d’autres régions du pays ». Et de préciser : « 17 animaux sont tirés aux 1000 ha de bois. Au moment de l’arrivée de la Ppa, on pouvait estimer la population de sangliers à 2 500 individus environ à l’intérieur du périmètre de 63000 ha. »
Comment la Ppa est-elle parvenue en Belgique ?
Dès l’annonce de la présence de la Ppa, des rumeurs ont circulé. Ain- si, l’association Inter-Environnement Wallonie a pointé du doigt les chasseurs, affirmant que des lâchers illégaux de sangliers en provenance des pays de l’Est seraient à l’origine de l’épizootie. Nos « amis » étaient juste aveuglés par leur dogmatisme anti-chasse. Actuellement, la piste de déchets alimentaires à base de charcuterie fumée abandonnés dans la nature, dans le secteur de Buzenol, non loin de l’autoroute E25/E411, est privilégiée. Laquelle autoroute est si- tuée à quelques kilomètres au nord du noyau d’infection. La piste d’une origine militaire en provenance d’un convoi ou du camp de Lagland (entre Chantemelle et l’autoroute) a été officiellement écartée par le ministre de l’agriculture et de la chasse le 5 novembre en réponse au député régional wallon – et chasseur – Gilles Mouyard. Ceci dit, les analyses indiqueraient bien que les plus vieilles carcasses de sangliers infectés proviennent de Lagland.
Le risque routier est si important que nombre de nations du NordEst de l’Europe ont lancé des campagnes d’affichage de mise en garde contre les abandons de déchets alimentaires, aux abords des parkings des autoroutes notamment. Afin d’éclaircir la situation et de montrer sa fermeté par rapport à d’éventuelles fautes de qui que ce soit, chasseurs ou non-chasseurs, l’Union professionnelle du SaintHubert Club de Belgique (émanation du Rshcb) a déposé plainte contre X pour empoisonnement d’animaux et lâchers de sangliers. La justice a fait procéder à des analyses génétiques afin de connaître les origines des sangliers de la région. Les résultats ne sont, pour le moment, pas divulgués.
Quelle zone exacte est concernée ?
Rappelons que la Ppa se développe naturellement, au sein d’un continuum forestier, au rythme de 1,5 km par mois, environ. La progression est donc relativement lente. Mais encore, la plaine, et plus encore les grillages des autoroutes et canaux, ralentissent son évolution naturelle de façon très opportune. Insistons bien : le facteur principal de propagation de cette épizootie relève des activités humaines. Selon le protocole mis au point par les experts vétérinaires européens, un système de zonage a été mis en place en Belgique. Le périmètre de contrôle originel de 63000 ha a été scindé en trois secteurs. Ce décou- page plus fin du territoire a pour but d’éviter au maximum la dispersion des animaux malades. Point commun à ces zones : la recherche active de carcasses de sangliers par les agents du Département de la nature et des forêts et du Service public de Wallonie, et l’analyse systématique de ces animaux. Un centre d’appel du Service public de Wallonie a été mis en place afin que tout un chacun puisse déclarer tout sanglier retrouvé mort, et ainsi déclencher une analyse. Autre point commun : l’ensemble des porcs, ainsi que les sangliers détenus en parc de production de viande, localisés dans le périmètre des 63 000 ha ont été détruits. Soit 9530 sujets pour un total de 60 élevages. Un système d’indemnisation est mis en place le temps que dureront les mesures de biosécurité.
Le nouveau découpage du périmètre des 63000 ha se compose de la façon suivante :
1- Près de 10000 porcs ont été abattus dans le périmètre de contrôle de 63000 ha.
2- Des restrictions qui pourront durer deux ans après le dernier sanglier infecté.
3Contrairement à leurs voisins belges, les médias nationaux français paraissent ignorer le sujet de la Ppa.
4- Le 25 dernier, une première clôture de 13 km de long était posée en Belgique.
1 - Une « zone noyau » de 12562 ha. Il s’agit du coeur du territoire infecté. Au sein de cette zone rouge sont rigoureusement interdits : tous types de chasse ; le nourrissage du gibier ; l’exploitation forestière ; la circulation en forêt ; toutes autres activités humaines en forêt.
2 - Une « zone tampon » de 29183 ha. Les mesures de biosécurité y sont les suivantes : la zone tampon impose les mêmes interdictions que la zone noyau ; une exploitation forestière professionnelle peut être autorisée au cas par cas ; une clôture de 13,2 km de long, de type ursus, et de 1,20 m de haut a fini d’être installée le 25 octobre à l’ouest de la zone tampon. Deux autres tronçons, au sud (7 km) et au nord (9 km) de cette même zone, sont installés à partir du 22 novembre.
3 - Une « zone d’observation renforcée » de 21 101 ha. Au sein de celle-ci : seules sont autorisées les chasses d’affût et d’approche ( de jour comme de nuit pour le seul sanglier), les battues silencieuses et
poussées de sangliers et des autres gibiers, ainsi que le piégeage du sanglier. Sans recourir à l’utilisation du silencieux ni de système de vision nocturne interdits par la loi actuelle ; obligation de destruction des sangliers est faite aux titulaires de droit de chasse sur leur territoire, avec autorisation de tir de nuit notamment. L’objectif est de « tendre vers une dépopulation totale », selon les autorités belges. À défaut d’éradiquer l’espèce sanglier, la destruction doit atteindre au moins 80 % de la population du secteur. Il s’agit de créer un cordon sanitaire ; obligation de suivre une formation aux règles de biosécurité afin de pouvoir chasser et détruire ; le nourrissage du gibier demeure interdit ; chaque sanglier chassé mort doit être constaté par un agent de l’administration ; chaque sanglier chassé mort doit être évacué et conduit au centre de traitement de Virton. Cela, selon des mesures de biosécurité très strictes (aucun contact avec le sanglier sans triple épaisseur de gants, emballage de l’animal dans une bâche, désinfection du sol, nettoyage du véhicule et de la remorque, etc.) ;
chaque sanglier chassé mort et chaque carcasse trouvée font l’objet d’une analyse avant destruction ; la circulation et l’exploitation forestière sont autorisées en journée uniquement.
Au-delà de cette zone, l’ensemble des activités humaines ( dont la chasse) en forêt sont autorisées. La recherche de carcasses de sangliers et leur analyse systématique sont également effectuées. Par ailleurs, tout sanglier retrouvé mort doit également être déclaré pour analyse. Rappelons qu’en Wallonie, les lâchers et les transports de sangliers vivants sont interdits depuis 1994. La chasse en enclos est également interdite depuis 2000. En revanche, après avoir été menacé d’interdiction, le nourrissage du gibier demeure autorisé.
Et du côté français ?
Dans les trois départements frontaliers du périmètre de contrôle belge (lire n° 511 de novembre de Connaissance de la Chasse, p. 30), ont été délimités des secteurs en Zone d’observation renforcée et en Zones d’observation : - Ardennes, Meuse et Meurthe-etMoselle ;
- soit 133 communes ; - soit un total de 120000 ha. Pour sa part, la Moselle est en Zone d’observation. Au sein des Zones d’observation renforcée, « après avoir été interdite, la chasse du grand gibier est de nouveau autorisée, depuis le 27 octobre dernier », nous précise Michel Thomas, président de la Fdc de la Meuse. « Mais uniquement à l’approche, à l’affût, en battue et en poussée sans chien. Le nourrissage y demeure interdit. Les chasses du petit gibier sont autorisées. » L’exercice de la chasse est normal dans les Zones d’observation. La surveillance sanitaire y est également maintenue en alerte. En conclusion, actuellement, selon les observateurs locaux, la Ppa paraît évoluer assez lentement en Belgique. Les densités plutôt moyennes de sangliers dans le secteur concerné pourraient expliquer cela. De plus, les autorités belges ont réagi avec rapidité et efficacité, bénéficiant de l’expertise vétérinaire européenne. De leur côté, les chasseurs sont particulièrement réactifs, source de propositions et apportent leur expertise. Comme quoi nous pouvons – nous devons – être de véritables sentinelles de la nature.