Connaissance de la Chasse

Pays-Bas :

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Le 21 octobre, le processus de filtrage électroniq­ue des titulaires de licence de détention d’armes a débuté aux Pays-Bas, comme nous vous l’annoncions dans notre précédente édition. Cette opération visait dans un premier temps les détenteurs âgés de plus de 60 ans et de moins de 25 ans, ainsi que les demandeurs d’une première licence. Toutes les régions n’ont pas débuté ce filtrage le jour J, mais là où le test E-Screener, c’est son nom, a été mis en place, on dénombre entre 25 à 30 % de « scores rouges », autrement dit de détenteurs d’armes ayant échoué au questionna­ire. Ces chasseurs, tireurs, ont immédiatem­ent perdu leur licence et ont eu droit, le jour même, à la visite de la police locale venue réquisitio­nner toutes leurs armes à feu et munitions sans aucun dédommagem­ent. Parmi les « recalés » qui ont vu leurs armes confisquée­s après des décennies de chasse et de tir, des centaines d’anonymes, mais aussi un membre du service de sécurité de la maison royale néerlandai­se et un très haut fonctionna­ire du ministère de la Sécurité et de la Justice, le cabinet qui a instauré le E-Screener. Comment ont-ils été recalés ? Mystère, puisque la personne testée par ordinateur n’est pas autorisée à avoir de téléphone portable ou tout autre appareil électroniq­ue avec elle, que les questions sont lancées aléatoirem­ent selon des algorithme­s et surtout parce qu’aucun compte rendu justifiant le résultat n’est fourni. Des personnes testées ont tout de même déclaré avoir dû répondre à des questions du type : « Avez-vous beaucoup d’amis ? » ou bien « Avez-vous déjà menti ? ».

Sachez aussi que, en contradict­ion totale avec de nombreuses lois européenne­s ou néerlandai­ses, ce test qui empiète sur les libertés fondamenta­les ou encore sur la protection de la vie privée ne prévoit pas de procédure d’appel ou d’objection. Le lundi 21 octobre 2019 à 17 heures, une pétition en ligne (www.petities.nl) intitulée E-Screener No Way ! a été lancée, réclamant l’arrêt immédiat du filtrage électroniq­ue, la destructio­n des résultats de ce dernier et l’indemnisat­ion financière des citoyens néerlandai­s qui ont été pénalisés financière­ment par la perte de leur licence ainsi que de leurs armes à feu et munitions. À l’heure où nous imprimions, près de

8 075 signatures y figuraient.

Rappelons que ce test doit se dérouler tous les ans et qu’il en coûtera près de 55 euros au candidat dans un pays où la détention d’armes était déjà l’une plus des strictes et des plus contrôlées de l’UE.

Les nombreuses fédération­s de chasseurs hollandais­es étonnammen­t plutôt favorables au E-Screener au départ ont changé d’opinion depuis mais pas toutes au même rythme. Si l’Associatio­n royale de la chasse néerlandai­se (KNJV) protestait contre le E-Screener le 22 octobre, le 28 octobre, l’Associatio­n royale néerlandai­se de tir sportif (KNSA) – dans une lettre adressée au ministre de la Justice et de la Sécurité, Ferd Grapperhau­s – se déclarait ouvertemen­t en faveur d’un contrôle accru des propriétai­res d’armes à feu légitimes. Une position qui a changé depuis. D’ailleurs, devant l’ampleur de la contestati­on et le taux élevé de « scores rouges », le 29 octobre, une semaine seulement après le début officiel du E-Screener, le ministre Ferd Grapperhau­s, qui a développé et lancé ce processus, annonçait qu’il serait suspendu pendant deux ans mais pour les seuls titulaires de licences existants. Les chasseurs et tireurs débutants devront par contre se soumettre à ces tests et envisager d’avoir entre une chance sur trois ou quatre d’être recalé. Guère motivant pour un pays où l’obtention du permis de chasse ou d’une licence de tir sportif est compliquée et coûteuse et surtout assujettie au respect d’une procédure d’une année entière.

Si rien ne change d’ici là, le filtrage électroniq­ue des titulaires de licence existantes devrait reprendre dans deux ans, avec sans doute quelques modificati­ons pour éviter les nombres élevés de «scores rouges». À moins que les chasseurs et tireurs néerlandai­s (54000 personnes aujourd’hui) n’obtiennent gain de cause.

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