GP Voyages, du léopard au brocard
Il a longtemps guidé en Tanzanie au sein de la compagnie familiale JML Safaris. Aujourd’hui, et depuis huit saisons déjà, Jérôme Latrive est à la tête de l’agence de séjours de chasse et de pêche GP Voyages. Un parcours aux quatre coins du globe, avec pour maître mot : professionnalisme.
Votre destin était-il tout tracé ?
Jérôme Latrive : Oui et non. Originaire de la Marne, qui plus est fils de guide de chasse, il est vrai qu’étaient réunis tous les ingrédients pour que je tombe dedans petit, mais si au départ j’ai découvert très jeune la chasse dans les forêts d’Épernay en suivant mon père à 5-6 ans dans les battues et à l’approche du grand gibier, ce n’était pas un chemin tout tracé. Ce, même si avant mon permis de chasse, à 15 ans je guidais déjà des chasseurs dans la forêt de Vassy, dans la Marne.
Quand prenez-vous conscience de la passion qui vous anime ?
Ma passion s’est confirmée au fil des ans mais pas au point encore d’en faire mon métier. C’est pourquoi à l’âge requis j’ai passé mon bac et je suis entré en fac de droit. Mais c’est là, je dois l’avouer, que j’ai pris conscience et que je me suis rendu compte que la chasse était la plus forte. En outre, à ce même moment mon père venait de créer sa propre structure de chasse en Tanzanie : Fox Treks Safaris. Vous imaginez ? L’occasion était trop belle. Je suis alors parti avec lui pour quelques semaines et ça a duré vingt ans !
Votre père vous a-t-il initié au métier de guide ?
Pas au départ car en préambule, j’ai passé plusieurs mois comme aspirant guide en Afrique du Sud avant de poursuivre sur la Tanzanie où j’ai finalisé mon initiation.
Quand commencez-vous à guider en solo ?
Dès 1991, lorsque j’accompagne mes premiers clients, des Français venus pour un safari 21 jours avec léopard, buffles, etc. Un saut dans le grand bain précoce mais avec l’avantage indéniable d’avoir sur le camp mon père, guide déjà très expérimenté avec qui je vais pouvoir avoir, soirs et matins, conseils, précisions, techniques, trucs et astuces…
Lors de ce premier safari fauves, vous avez dû avoir quelques appréhensions… Oui, mais pas forcément celles que l’on imagine… Sur mon premier buffle, je n’avais pas d’appréhension particulière. J’avais déjà suivi des chasses et pour cette première fois il fallait simplement y aller.
Mon appréhension se situait plus au niveau du sexage des animaux et de l’estimation de la taille des trophées. Car si pour certaines espèces, l’identification mâle/femelle est
simple, il en va tout autrement pour d’autres… Et je vous assure que faire la différence entre un zèbre mâle et une femelle n’est pas aisé pour un néophyte.
Cette première saison terminée, que se passe-t-il ensuite ?
Dans mon esprit, tout est clair : PAS de retour à la fac ! Ma décision est définitivement prise. Je suis guide et vais poursuivre dans cette voie.
Votre père ne vous a-t-il pas demandé d’aller faire vos armes ailleurs ?
En fait, je ne lui ai pas trop laissé le choix ! Mais je pense qu’au fond de lui, il était très fier. Il a d’ailleurs tout fait pour qu’au fil des ans et des saisons tout se passe bien, même s’il aurait peut-être aimé que je poursuive mes études un peu plus longtemps.
Où guidiez-vous alors ?
Via Fox Treks Safaris qui va devenir par la suite JML Safaris, je suis intervenu sur de nombreuses zones en Tanzanie : à Rungwa, dans le Selous, à Kilwa sans oublier aussi ponctuellement le Pays Masaï, Burigi… Soit au total plus de vingt blocs différents !
La Tanzanie fut longuement réputée pour la diversité de ses espèces. Avez-vous des préférences ?
Si je définis un top 3, aujourd’hui le lion et l’éléphant au pistage ou à l’approche recueillent tous mes suffrages à l’instar du buffle. Quant au léopard qui autrefois était mon préféré, il arrive ensuite.
Non pas que je trouve aujourd’hui sa chasse moins passionnante, et ce n’est pas non plus par lassitude, même si je l’ai beaucoup chassé, mais parce que désormais avec l’importance par exemple des notions précises d’âge sur le lion, la chasse de ce dernier est devenue beaucoup plus technique, beaucoup plus difficile, c’est donc désormais un véritable challenge que j’affectionne.
Guidiez-vous alors dans d’autres pays ?
Oui, en parallèle et ce dès le début des années 2000, je suis intervenu en Rca, au Cameroun et en Zambie. Exclusivement en savane et même en Rca, je ne suis jamais intervenu sur la faune des bakos type bongo, hylochère… Et ce pour une raison simple, les bonnes périodes pour aller à la recherche de ces espèces correspondaient au début de notre saison en Tanzanie. Mais je dois l’avouer, j’aurais aimé y aller.
Qui sait, peut-être qu’un jour j’aurai cette opportunité.
Intervenez-vous toujours en Tanzanie ?
Oui, je guide toujours chez des amis qui ont de très bons territoires, donc depuis 2009. Ce en raison d’une augmentation terrible des taxes de tir et des locations de territoire. On avait alors pressenti avec mon père que cela n’allait pas durer et que trop peu de chasseurs allaient suivre. Ce fut donc alors aussi la fin de JML Safaris.
Que s’est-il passé ensuite ?
J’ai créé Latrive Safaris afin de
proposer des voyages de chasse aux quatre coins du continent noir et j’ai intégré parallèlement l’agence GP Voyages. Une aventure qui s’est poursuivie avec le rachat des parts de cette structure en 2011.
GP Voyages est une agence qui a pignon sur rue depuis longtemps…
Oui, elle a été créée en 1980 mais elle était au départ essentiellement tournée vers la pêche, avec comme seules destinations chasse le Sénégal et la Namibie.
Et aujourd’hui ?
Le catalogue s’est plus qu’enrichi puisqu’en matière de chasse nous proposons l’Afrique du Sud, la Namibie, le Zimbabwe, la Zambie, le Mozambique, la Tanzanie, le Cameroun et le Sénégal pour l’Afrique,
la Russie et le Tadjikistan pour l’Asie, la Biélorussie, la Croatie, la Serbie, la Bosnie, la Hongrie, l’Espagne, l’Écosse et l’Irlande pour l’Europe.
Exit la pêche ?
Non, la pêche perdure et reste une activité importante de l’agence avec par exemple, le Costa Rica, la Colombie, la Guinée-Bissau, Madagascar, l’Irlande, la Suède… Et nous avons également mis en place depuis plusieurs années un département safaris photos en Afrique (Ndlr : lire encadré p. 92).
Des déceptions ?
J’effectue souvent plusieurs voyages d’essai avant de prendre ma décision. Ce fut le cas par exemple pour un pays d’Asie centrale. J’y suis allé plusieurs fois mais si les animaux étaient bien au rendez-vous, la logistique, elle, ne suivait pas. J’ai donc abandonné. Ceci dit, même si cela arrive parfois, ces cas restent rares car entre les renseignements que je prends avant et le ou les déplacements sur le terrain, les choses sont bordées.
Des envies ?
J’en ai eu et j’aurais aimé proposer le maral au Kazakhstan mais c’est très compliqué, il en va de même pour l’Amérique du Nord où la logistique
Jérôme aime et connaît très bien les lions, un atout majeur pour réaliser une telle prise de vue. terrain n’est pas toujours en adéquation avec le souhait des clients français. Donc pour le moment, le coeur de mon métier reste essentiellement l’Europe et l’Afrique.
Après de nombreuses saisons comme guide, le terrain ne vous manque pas ?
Non car je guide toujours quelques safaris en Afrique et j’accompagne également nombre de clients en Europe ou en Asie. Tant et si bien que je passe toujours plusieurs mois par an outdoor.
Êtes-vous impliqué dans des associations de chasse ?
Oui, dans les deux associations professionnelles de guides français : l’Association des guides de chasse professionnels (Acp) et l’Association des guides de grande chasse (Aggc), tout comme aux Usa au Safari Club international (Sci) pour lequel je suis