Connaissance de la Chasse

Histoires sans fin

- François-Xavier Allonneau fx.allonneau@editions-lariviere.com

Et c’est reparti pour un tour. Les forestiers privés et publics (c’est-à-dire l’Onf) de nouveau sonnent la charge contre le grand gibier. Le 7 janvier dernier, dans un courrier adressé à la ministre de la Transition écologique et solidaire, 8 structures de la filière sylvicole dénoncent « une surpopulat­ion incontrôlé­e de cervidés ». Par cervidés, il faut bien entendre cerfs et chevreuils. Toutefois, les sylviculte­urs s’intéressen­t également au sanglier, réclamant la limitation de l’agrainage dissuasif du 1er avril au 30 novembre. Au total, ce sont 5 mesures que réclament les forestiers, regrettant au passage l’absence d’indemnisat­ion des dégâts sylvicoles. [lire lettre p. 20] Nous ne pouvons passer sous silence une autre de ces revendicat­ions : la suppressio­n du plan de chasse national obligatoir­e du chevreuil. Autant dire que très éventuelle­ment, derrière se tient en embuscade la suppressio­n de celui du cerf. [p. 22] Si elle était appliquée, cette mesure ne serait-elle pas contre-productive ? Ne débouchera­it-elle pas sur un contrôle déficient des tableaux et une certaine anarchie des prélèvemen­ts, ce qui pourrait bien profiter aux espèces ? Nous ne sommes plus avant-guerre, ni au XIXe siècle ; la forêt s’est étendue, les campagnes se sont vidées, la grande faune sauvage a reconquis ses territoire­s, les chasseurs sont désormais gestionnai­res. Il n’est pas certain qu’en 2020 une chasse hyper libéralisé­e, le braconnage et le loup soient les meilleurs alliés du forestier.

Le contexte de l’envoi du courrier est particulie­r : se discute actuelleme­nt le décret dit grand gibier qui permettra d’appliquer la loi chasse de juillet 2019. Plan de chasse, aigrainage, chasse en enclos, lâchers de sanglier, etc., autant de thèmes sensibles qui seront abordés. Le décret devrait être signé très prochainem­ent.

Contexte plus général : celui du réchauffem­ent climatique qui impose au forestier de repenser ses méthodes de travail. Et puis, toujours, une filière profession­nelle du bois moribonde. D’une certaine façon, cette situation freine la surexploit­ation et l’artificial­isation excessives de la forêt. D’une autre, cela rend le sylviculte­ur particuliè­rement sensible aux dégâts occasionné­s par la faune sauvage, d’autant plus que le bois rapporte insuffisam­ment.

Que pouvons-nous faire ? Entendre et dialoguer. S’attaquer aux problèmes — généraleme­nt localisés — et augmenter la pression de chasse quand nécessaire, localement.

Or, le système actuel est un peu pervers. Plus les montants des locations et adjudicati­ons de territoire seront élevés, plus les coûts des bracelets, des taxes à l’hectare, des carnets de battue, etc., seront élevés, plus la facture des dégâts agricoles sera lourde, plus la chasse du grand gibier sera… élevée. Et plus les chasseurs désireront un retour sur investisse­ment (sic), à savoir la certitude de tableaux conséquent­s.

Histoire de mettre davantage la pression sur la bête noire, sa chasse est finalement autorisée en mars dans l’ensemble des départemen­ts. Aux préfets et aux Fdc de rendre cela effectif, ou non. [p. 14] N’est-ce pas là un bon moyen de développer les chasses light : affût, approche voire poussée ? Chasses anciennes en réalité, chasses discrètes – vive le modérateur de son – qui peuvent se révéler particuliè­rement utiles et efficaces aux abords des cultures et des zones urbaines.

Outre les opportunit­és d’un tourisme cynégétiqu­e (type Cocagne), il doit bien exister une façon de rendre la chasse du grand gibier davantage accessible, davantage fluide.

De la tradition retrouvée à la modernité. C’est l’année prochaine que la détention des armes s’organisera sur internet via le Système d’informatio­n des armes (Sia). En 2021, chasseurs, tireurs et collection­neurs posséderon­t tous un râtelier virtuel rassemblan­t l’ensemble de leurs armes. Chaque élément sera fiché et suivi de façon informatiq­ue en temps réel. La demande de la Carte européenne d’armes à feu se fera également par ce moyen. Alors il sera bon que les plus connectés d’entre nous aident ceux qui le sont moins. [p. 18]

Quant à la chasse des oies en février, si elle n’aura pas lieu cette année, il y a des chances pour que dans un futur plus ou moins proche, elle devienne réalité. Le réchauffem­ent climatique modifie à la fois les axes de migration et la démographi­e des oies cendrées. La hausse des population­s est annoncée, leurs dégâts agricoles probableme­nt. [p. 28] Décidément, rien n’est figé.

Bonne lecture à toutes et à tous.

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