Connaissance de la Chasse

Entre Corse et continents CONSTANT BOULARD

Créer une agence de voyages de chasse est un challenge. Constant Boulard l’a relevé l’an passé, à 29 ans. Rencontre avec un passionné qui a commencé par guider en 2010, mais qui a déjà beaucoup voyagé au gré des continents.

- par Olivier Buttin

Où, quand et comment avez-vous découvert la chasse ?

Dès mon plus jeune âge, en Normandie avec mon père, lieutenant de louveterie et ancien maitre d’équipage de vénerie sous terre. Ce qui m’a permis, vous vous en doutez, dès tout petit, de participer à de nombreuses journées de chasse. La passion est très vite venue, notamment au regard de la diversité des modes de chasse que nous avons découvert, mes frères et moi. Et si à 3 ans, nous plongions déjà la tête la première dans les galeries de renards pour indiquer dans quelle direction creuser aux membres de l’équipage, bien trop costauds pour se faufiler dans un terrier, les soirs, emmitouflé­s, nous participio­ns aux tirs de nuit du goupil en essayant de repérer les nuisibles avec notre père. Ce sans parler des week-ends d’hiver où, bien évidemment, nous opérions comme rabatteurs pour notre plus grand bonheur.

De là à l’internatio­nal… Mes études d’ingénieur nécessitan­t un stage de six mois à l’étranger, j’ai opté pour l’Australie et après quelques

recherches, j’ai eu l’opportunit­é de partir pour toute une saison en Arhnemland, sur un territoire aborigène du Nord du pays. J’y ai passé la saison entière. Ce qui impliquait tout : du montage des camps semi-volants jusqu’à l’exportatio­n des trophées. Une expérience très riche en enseigneme­nts car nous n’étions que quatre pour gérer la totalité des tâches. Je fus donc tour à tour intendant, cuisinier, homme d’entretien, mécanicien, barman… au camp. Mais la journée, j’intervenai­s comme aspirant guide mais également comme chauffeur, porteur, skinner, infirmier, etc. Une saison qui m’a permis de goûter aux

nombreuses difficulté­s du métier de guide de chasse mais surtout au bonheur qu’il procure.

À mon retour d’Australie, j’étais « piqué ».

Cela vous a donc motivé pour transforme­r une passion en profession… Oui, même si j’ai dû dans un premier temps prendre mon mal en patience et être raisonnabl­e et, de fait, terminer mes études d’ingénieur. Mais je me suis ensuite lancé dans ce que tout le monde me disait être de la folie. Aujourd’hui, avec le recul, je ne regrette rien et suis content d’avoir tenté l’aventure.

Quelles furent les différente­s étapes ?

Je suis tout d’abord parti faire plusieurs saisons au Cameroun en savane et en forêt. Cela m’a, là encore beaucoup apporté et m’a permis d’emmagasine­r de l’expérience dans deux biotopes complèteme­nt différents et au contact de gibiers très variés. J’ai bien évidemment commencé comme aspirant guide, camp manager mais de temps à autre, je guidais. Ce fut un long processus mais nécessaire. Je passais également à cette époque beaucoup de temps dans les missions de lutte antibracon­nage. J’adorais cela.

Un travail compliqué… Oui, mais la biodiversi­té des zones est trop menacée par les activités humaines en tout genre. Alors certes, c’est ingrat, dangereux,… mais c’est aussi challengea­nt. D’ailleurs, dès que j’ai l’occasion je retourne en patrouille volontiers. L’avenir de la faune et de la flore africaine passe par là. Chacun doit se sentir concerné, du client chasseur, au guide, en passant par les pisteurs, les chauffeurs, etc. À nous ensuite de convaincre le reste de la planète de notre utilité !

Après le Cameroun…

Lorsque la saison de chasse en forêt équatorial­e se terminait, je continuais la découverte de différents territoire­s. Entre autres, le Sénégal, où je gérais deux camps de chasse. J’ai le plaisir d’y retourner chaque année. Je suis aussi allé guider sur trois États aux Usa (Colorado, Montana, Texas) pour les wapitis, cerfs mulets, cerfs de Virginie, ours, etc. J’ai aussi découvert l’Afrique du Sud en y pistant plusieurs membres du big five.

Quant à aujourd’hui ? Aujourd’hui, j’ai changé mon fusil d’épaule. Si auparavant, j’enchaînais les saisons à l’étranger pour retrouver ma fiancée quelques mois par an, désormais, souhaitant fonder une famille j’ai inversé la tendance. Je ne pars plus que de 3 à 5 mois afin de vivre le reste de l’année en France, plus précisémen­t en Corse où depuis trois saisons je gère le Domaine de chasse de l’Ortolo [lire n°528 d’avril, p. 52]. Un domaine où nous proposons des battues de sangliers tout comme des battues de haut vol mais aussi des passées aux canards, le tout dans un cadre somptueux au bord de la mer Méditerran­ée.

Pourquoi avoir dès lors créé « Constant Boulard Internatio­nal Adventures » ? D’une part, je voulais continuer à exercer mon métier de guide de chasse, dans de multiples pays. D’autre part, je souhaitais partager et faire découvrir à des chasseurs passionnés les territoire­s que je connais. Ayant le souhait de faire cela dans la légalité, j’ai dès lors créé mon agence de voyages, ce qui me permet non seulement d’accomplir les rêves de mes chasseurs mais aussi de continuer à rêver moi-même.

Vous proposez chasse, mais aussi photo et pêche…

Je suis un vrai amoureux de l’outdoor, comprenez par là que je suis très attiré par la nature, sa faune et sa flore. C’est pourquoi j’ai développé en plus du départemen­t chasse un

secteur safaris-photos et aventures. Ce afin d’organiser des « expédition­s » plus familiales, des voyages de noces… D’ailleurs, à titre personnel, j’échange volontiers ma carabine contre un appareil photo. Enfin, à travers mes voyages de chasse, ayant découvert aussi de magnifique­s territoire­s de pêche, cela m’est apparu comme incontourn­able.

Des destinatio­ns que vous avez toutes parcourues ?

Oui, la quasi-totalité de mes destinatio­ns sont des territoire­s où j’ai travaillé. Ce qui apporte une réelle valeur ajoutée aux clients qui me font confiance car non seulement mes partenaire­s sont tous des amis, que j’ai grand plaisir à retrouver, mais cela me permet aussi de guider seul car je connais la zone, le camp, le staff et tous les rouages de ces lieux.

Vous n’avez plus vraiment le temps de chasser…

Oui et non car je fais chasser toute l’année et suis donc très pris et ne tire plus énormément moi-même. Mais au final, je chasse quasiment quotidienn­ement, pour mon plus grand plaisir. En outre, les mordorées m’obsédant et possédant deux chiens d’arrêts qui adorent les traquer, je m’en vais avec eux derrière elles dès que possible.

Quant à l’avenir ?

La chasse en général est menacée à travers le monde. Aujourd’hui, le politiquem­ent correct, relayé par les médias, est dans le bio, la vie citadine, voir le véganisme. C’est pour moi un cycle. Il est possible que dans 50 ans – j’espère avant – la chasse retrouvera une bonne presse. Mais l’élément le plus révoltant, contre lequel je me bats quotidienn­ement, est le jugement des ignorants car beaucoup se prononcent contre la chasse sans la connaître. C’est triste et dommageabl­e. J’essaie donc d’expliquer au jour le jour à chacun ses bienfaits et ce à quoi elle correspond. Quant à la chasse à l’étranger, je pense qu’elle a encore de très belles et de bien nombreuses années devant elle. Ce, tant que des profession­nels continuero­nt à se battre pour préserver des zones sauvages pour que la faune et la biodiversi­té y perdurent. Mais cela passe aussi évidemment par les clients qui apportent eux les moyens nécessaire­s pour cette lutte quotidienn­e contre les attaques en tout genre : braconnage, pastoralis­me, défrichage, démographi­e…

Et celui de votre structure ?

Je travaille sur plusieurs nouvelles destinatio­ns chaque année afin de développer mon agence et d’élargir mes offres à mes nouveaux ainsi qu’à mes fidèles clients. Que cela soit pour la chasse comme pour les safaris photos. Néanmoins, les agences de voyages spécialisé­es sont liées à la conjonctur­e mondiale et aux politiques, qui parfois prennent des décisions sans connaître les sujets…

Êtes-vous membre d’associatio­ns profession­nelles ?

Oui, de l’Aggc et de l’Acp car la cohésion est pour moi primordial­e afin de démontrer la nécessité et les bienfaits de la chasse tout comme l’utilité des actions menées par les chasseurs, profession­nels ou non. C’est capital si l’on veut faire perdurer la chasse à travers le monde.

Hormis la chasse…

Je suis un passionné de rugby, que j’ai pratiqué de 5 à 23 ans mais aujourd’hui, mon métier ne me le permet plus, malheureus­ement. Reste un autre hobby : la chasse aux chiens d’arrêts qui me fascine et dans laquelle je m’implique au niveau du dressage.

J’ai, pour ce faire, un braque allemand et un drahthaar.

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L’Australie fut pour Constant une découverte qui initia l’aventure…

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