Le cheval à la chasse : que dit la loi ?
Outre la chasse à courre, le cheval est parfois employé dans le cadre de battue grand gibier. Mais que dit la loi à ce propos ? Que dit-elle aussi sur les autres moyens de déplacement ? Avocat et chasseur, maître Poirier nous répond.
L’arrêt qui a été rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 25 juin 2019 place l’utilisation du cheval lors d’une chasse, au coeur d’un véritable débat juridique. Deux questions essentielles se posent : - l’utilisation du cheval est-elle un mode de chasse ?
- le cheval est-il un auxiliaire ou est-il un moyen de chasse ?
L’utilisation du cheval est un mode de chasse puisque la chasse à courre est reconnue par les dispositions de l’article L. 424-4 du Code de l’environnement. Les conditions d’exercice de la chasse à courre sont définies par les dispositions de l’arrêté du 18 mars 1982 relatif à l’exercice de la vénerie.
Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, il ne s’agissait pas de chasse à courre mais de chasse à tir et plus certainement d’une battue au grand gibier. Les faits étaient les suivants. Le 2 février 2015, en forêt domaniale de Chinon, des agents de l’Oncfs (devenu depuis Ofb) ont constaté une action de chasse impliquant notamment deux traqueurs à pieds et un cavalier adjudicataire d’un lot de chasse. Le cavalier a été poursuivi pour la contravention de chasse à l’aide d’un moyen, d’un mode, d’un engin ou d’un instrument prohibé, en l’espèce d’un cheval utilisé comme moyen de poursuite et de rabat. Le cavalier a été déclaré coupable par jugement du tribunal de police de Tours, cette décision a été confirmée par arrêt de la cour d’appel d’Orléans, et le pourvoi formé à l’encontre de cet arrêt a été rejeté.
Afin de consacrer la responsabilité du cavalier, les premiers juges vont retenir les dispositions de l’article L. 424-4 du Code de l’environnement qui, après avoir rappelé que le moyen d’assistance électronique ou autre que ceux autorisés par arrêté ministériel sont prohibés, et avoir précisé l’usage des gluaux, indique que « tous les autres moyens de chasse, y compris l’avion et l’automobile, même comme moyens de rabat, sont prohi
bés ». Les juges, en s’appuyant sur les constations effectuées par les agents de l’environnement, ont considéré que dans le cas d’espèce le cheval avait été utilisé comme moyen de rabat. « Monsieur X se déplace à grande vitesse à l’aide de sa monture en poursuivant les grands cervidés levés en direction de la parcelle 156 en criant : “Biche à la ligne, biche à la ligne !” De toute évidence, le cheval est utilisé comme moyen de poursuite et de rabat vers la ligne de tir et non simplement comme auxiliaire de chasse. »
Cette motivation va être reprise par la cour d’appel d’Orléans, laquelle va d’autre part souligner que « … Monsieur X a utilisé son cheval non pas comme un auxiliaire de chasse mais comme un moyen de chasse, permettant de forcer et de rabattre le gibier vers la ligne de tir, ce qui est prohibé ». La Cour de cassation qui rejette le pourvoi ne dira rien d’autre.
Parvenir à ses fins
Jacques Guilbaud, dans son ouvrage La Chasse et le droit, avant la grande réforme de la chasse portée par la loi du 26 juillet 2000, nous enseigne que « le moyen de chasse au sens le plus restreint est, à l’intérieur d’un mode de chasse, ce qui permet de parvenir à ses fins, c’est-à-dire de capturer le gibier. Pour la chasse à tir il s’agit d’une arme à feu ; pour la chasse à courre, des chiens ; pour la fauconnerie, des oiseaux rapaces ; pour la chasse traditionnelle, des filets et des lacets, de la glu… » Il faisait notamment référence à un arrêt rendu par la Cour de cassation à une autre époque. Cassation criminelle, 29 novembre 1845 :
« On ne doit pas considérer comme moyens de chasse proprement dits, ceux dont l’emploi n’est qu’accessoire à un genre de chasse déterminé et qui cependant aide le chasseur à atteindre le gibier ; qu’ainsi, quoique le législateur ne s’en soit pas formellement expliqué, il est hors de doute que, pour la chasse à tir, on peut s’aider de chiens d’arrêts ou de chiens couchants, qui guettent le gibier, le suivent à la piste, le débusquent de son gîte et le livrent aux coups du chasseur ; que l’office des traqueurs n’est pas d’une autre nature ; que relativement à ces procédés auxiliaires, insuffisants par eux-mêmes pour atteindre le but de la chasse, la loi n’a excepté que l’usage des appeaux et chanterelles ; qu’en jugeant que les traques et battues ne constituaient pas un mode de chasse spécial et distinct de ceux que la loi a autorisés, l’arrêt attaqué n’a donc violé en rien les articles précités […]. »
Nous ne sommes plus en 1845 mais l’analyse pertinente à laquelle se sont livrés les magistrats de la chambre criminelle à l’époque ne devait-elle pas être reprise en 2019 ?
En effet, l’article 6 de l’arrêté du 1er août 1986 relatif à divers procédés de chasse nous apporte un éclairage complémentaire sur ce qui est interdit :
« Est interdit en action de chasse et pour la destruction des animaux nuisibles, y compris pour le rabat, l’emploi :