Connaissance de la Chasse

Comment ça marche ?

- L. B.

Juste après avoir pressé la queue de détente, le percuteur est relâché, l’amorce de la cartouche frappée, la poudre enflammée, la balle libérée et aussitôt propulsée hors du canon tandis que retentit une gigantesqu­e détonation qui va souvent dépasser les 130 à 140 décibels (dB). Voilà ce qui se passe pour une carabine dont le canon est nu. Pour celle munie d’un modérateur sonore, souvent appelé silencieux, tout se déroule de la même façon, à ceci près que le bruit est nettement amoindri, tandis que le recul se fait lui aussi bien plus modéré. Pourquoi ? Comment ? Voici ce qui se passe lorsque l’on utilise un silencieux.

Cinq éléments principaux

C’est la pression des gaz résultant de la combustion de la poudre et surtout leur détente brutale hors du canon, dans le sillage de la balle, qui génère le bang de la détonation. Pour diminuer le bruit, il faut un détendeur, un outil capable de faire baisser cette pression. Comment ? En appliquant un principe physique : les gaz ont une pression moindre s’ils sont ralentis, détendus et refroidis. Un bon modérateur sonore va agir sur ces trois paramètres, il va tout à la fois détendre les gaz, en leur offrant plus de volume, les refroidir en favorisant l’échange thermique, et leur faire perdre de leur vitesse au travers d’un dédale de déflecteur­s appelés chicanes. Un sacré challenge puisque pour un petit .243 Winchester par exemple, la pression maximale est de 4100 bars, la vitesse autour de 1000 m/s et la températur­e autour de 600 à 800 °C.

Pour ralentir les gaz, les détendre et les refroidir, le silencieux dispose de cinq éléments principaux. Dans l’ordre on trouve un tube fileté qui va permettre de raccorder le modérateur au canon, un tube diffuseur qui va leur permettre de s’échapper latéraleme­nt, une chambre de décompress­ion où les gaz vont pouvoir se détendre, des chicanes où ils vont se refroidir et ralentir et une enveloppe ou corps métallique, souvent en alliage pour les modèles chasse, qui va emprisonne­r tous ces éléments. Des silencieux non démontable­s comportent ces composants « rangés » dans un ordre précis, d’autres démontable­s et présentés sous forme de modules que l’on peut visser les uns aux autres sont en fait de mini-silencieux mis bout à bout avec à chaque fois chambre, chicanes, tube diffuseur et enveloppe métallique. Certains fabricants comme Hausken, sur ses modèles Xtrem, ont ajouté entre les chicanes et le corps du modérateur un treillis métallique pour ralentir mais aussi refroidir un peu plus les gaz. Lorsque la balle quitte le canon, elle est précédée d’une infime partie des gaz tandis

que le reste pousse la balle. Les gaz arrivent dans le tube diffuseur, qui comme son nom l’indique est un cylindre, même si parfois il peut prendre une forme légèrement conique. Ce tube diffuseur est percé de nombreux trous de toutes tailles et formes, ronds, oblongs, orientés vers le côté, l’avant ou l’arrière. Les gaz, sur les traces de la balle, vont s’engouffrer dans ces orifices et être conduits vers la chambre de décompress­ion. Là, ils se détendent immédiatem­ent car ils ont plus de place. Cette chambre prend souvent la forme d’un tube vide et large de 30 à 60 mm de diamètre selon les marques et les modèles et de plusieurs centimètre­s de long. La pression des gaz va baisser. Ils continuent néanmoins leur route vers la sortie au travers du tube diffuseur et les trous suivants qui les conduisent vers des chicanes. Là encore, ils vont être ralentis, refroidis et détendus. Ce phénomène se reproduit autant de fois qu’il y a de chicanes. Il faut imaginer la balle comme un obturateur mobile dans un tube dont la progressio­n libère peu à peu des cages et espaces pour que les gaz se piègent et perdent de leur vitesse et de leur chaleur. Au final, les gaz vont sortir du tube diffuseur et de la bouche du silencieux de façon moins brutale, avec une pression beaucoup moins élevée que celle mesurée à la sortie du canon, et générer une détonation moins forte. L’ampleur de la détonation est d’ailleurs fonction de la différence entre la pression atmosphéri­que et celle de sortie du canon ou du silencieux. Il faut réduire le delta entre les deux pressions. On comprend aisément que plus le silencieux fera baisser la pression, plus le son sera discret. Tous les silencieux du marché fonctionne­nt de la même façon. Dans ce cas direz-vous, les plus gros, ceux qui laissent plus de place aux gaz pour se détendre dans les chambres de décompress­ion ou les chicanes, sont plus efficaces, et vous aurez en partie raison. En effet, même si les nouveaux matériaux et les nouvelles techniques ont permis de miniaturis­er les modérateur­s sonores, il n’en reste pas moins qu’un volume important offre des performanc­es élevées et un volume très petit des percartouc­he formances moindres. Mais l’emploi de nouveaux matériaux, comme le titane et toutes sortes d’alliage plus légers que l’acier et parfois plus résistants aux fortes chaleurs, modifie quelque peu la donne. Et n’oublions pas que pour tout élément de notre équipement, nous devons toujours faire nos choix en fonction de compromis. Arbitrer entre un modérateur lourd et encombrant avec un son très réduit, ou un poids moins élevé et un faible volume mais avec un son certes amoindri mais toujours présent.

Quel que soit votre choix, les performanc­es offertes par les modérateur­s sonores se situent entre 20 et 35 dB. 35 dB de moins pour les modèles les plus performant­s et 20 dB pour les modérateur­s les plus légers ou petits.

Un silencieux pour un calibre donné

Certains d’entre vous pourraient être tentés de n’utiliser qu’un seul silencieux pour plusieurs calibres, à partir du moment ou le filetage des armes est le même. C’est techniquem­ent possible en optant pour un modérateur pour le plus fort calibre, mais possible ne signifie pas hélas recommandé. Pourquoi ? Simplement parce que certains gaz de la percutée sortent avant la balle, c’est le cas aussi avec une arme et son canon nu. Mais plus le diamètre de la bouche du silencieux sera large par rapport au diamètre de la balle, plus il y aura de gaz qui précéderon­t le projectile, et moins le bruit sera assourdi. En revanche, si le silencieux est adapté au calibre de l’arme, le trou de sortie sera 1 mm seulement plus large que le diamètre du projectile. Certes des gaz sortiront avant la balle mais ils seront peu nombreux et la plus grande partie sortira après la balle ou ira se perdre dans les chicanes et chambre de décompress­ion. Là aussi, il faut que le tube diffuseur soit proche du diamètre de la balle afin de forcer les gaz toujours sous pression à prendre d’autres chemins que la ligne droite, en l’occurrence ceux des chicanes. C’est d’ailleurs pour cela que les modérateur­s multicalib­res possèdent plusieurs diamètres de tubes diffuseurs qui courent de la chambre de décompress­ion à la bouche du modérateur. C’est en veillant au respect de tous ces paramètres que le recul sera moins sec et la détonation moins forte de 20 à 30 dB, ce qui réduit le volume sonore de 4 à 8 fois puisque l’on considère qu’à partir d’un certain niveau sonore, une baisse de 10 dB divise par deux le volume sonore perçu.

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 ??  ?? Les Hausken Xtrem associent à leurs chicanes un treillis d’acier inox qui va refroidir et freiner davantage les gaz.
Les Hausken Xtrem associent à leurs chicanes un treillis d’acier inox qui va refroidir et freiner davantage les gaz.

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