La vènerie de Louis XV : inouï

Durant 57 ans, d’Yauville sera au service de la vènerie royale. Philippe Dulac a consacré à l’homme, qui signa un fameux traité consacré au cerf, et à la vènerie du XVIIIe siècle, un ouvrage remarquable. Prix Connaissance de la Chasse 2018.

Quand le Roi chasse, ce n’est donc ni en spectateur, ni en amateur. Sa connaissance du déduit égale celle des professionnels qui le servent. Il connaît lui-même tous les chiens. Il sait ce qu’on peut en attendre. Il sait juger la façon dont on les sert. Rarement l’oeil du maître aura été aussi aiguisé. L’à-peu-près ne serait pas apprécié, l’échec sera mal reçu. Même si le Roi s’exprime toujours avec la retenue propre à sa personnalité, chacun le sait. Il faut toujours tendre vers l’excellence et le succès. Pour satisfaire cette exigence, la vènerie d’alors dispose de moyens tout à fait considérables – presque extravagants. Qu’on en juge. Les chiens tout d’abord. Quand Louis XV, sur le chemin du retour de Reims où il vient d’être sacré en 1722, s’arrête à Villers-Cotterêts et suit en calèche sa première chasse, il est conquis par le travail des chiens du duc d’Orléans. Les jours suivants, il est reçu avec la cour à Chantilly, où il voit chasser les chiens du duc de Bourbon. Mais lui, de quel outil dispose-t-il ? D’Yauville lui-même nous donnera une réponse sans ambages : c’étaient d’assez beaux chiens français, mais bien incapables de prendre un animal. En vérité, la vènerie royale n’était déjà pas dans son meilleur état à la mort de Louis XIV. Son peu d’activité durant la Régence pendant laquelle le Grand veneur s’efforce de maintenir l’outil en état, n’aura rien arrangé. Il faut donc repartir de zéro. Le Roi y est aidé par la générosité de ses proches. Tout d’abord, le comte de Toulouse, son oncle, nommé Grand veneur par son arrière-grand-père en 1709, donne au jeune Roi en 1722 une meute de chiens anglais avec lesquels il va pouvoir prendre. Car bien évidemment, ce fils légitimé de Louis XIV chasse lui-même, en forêt de Rambouil