Echos de l’Aisne : facilitons l’affût en plaine
Si bien des facteurs peuvent expliquer l’augmentation du nombre de sangliers en France (évolution climatique et agricole, zones sanctuaires…), il serait malhonnête de ne pas citer le premier d’entre eux : la préservation. « Dans les années quatre-vingt, j’ai été parmi ceux
qui ont fait monter les populations de sangliers. Sur 4 000 ha, il restait 3 sangliers. Aujourd’hui, il s’en prélève entre 400 et 500 », explique Jean-Claude Houssard, trésorier de l’Adcgg de l’Aisne. Selon lui, gérer la hausse est plus simple que la baisse. Il suffit de ne rien faire, de s’abstenir de tirer. Agir avec précaution en suivant l’exemple allemand formulé par
centres urbains, ou situés dans les régions viticoles (Champagne, Bourgogne, Bordelais, Val de Loire) ou frontalières (Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse), ont été particulièrement touchés par ce phénomène. « On a commencé à 5 francs de location l’hectare dans les années soixante-dix. Aujourd’hui on est à 100 euros l’hectare avec des extrêmes à 300 euros. » Parallèlement, l’intensification des glandées et des hivers moins rigoureux, associée à du nourrissage, a rendu les forêts très accueillantes, tout comme la plaine. Le développement de culture remise (maïs, colza…), de taille toujours plus grande, mais aussi celui de culture intermédiaire (Cipan) ou nouvelle (miscanthus), offre autant d’exemples pour expliquer la présence croissante du sanglier en zone de plaine. Un constat particulièrement probant dans les départements du nord de la France, pourtant faiblement boisés. D’autant qu’à l’attractivité qu’offre désormais la plaine vient également se greffer la quiétude impulsée par un double effet : la régression du dérangement en zone de culture et son augmentation en forêt.
L’exode rural a « vidé » les campagnes. Moins de paysans – qui ne sont d’ailleurs plus chasseurs (suppression du droit d’affût) – dans les champs, mais aussi moins de chasseurs, en raison de la régression du petit gibier sédentaire. En soixante ans, les chasseurs ont, dans leur grande majorité, migré des champs à la forêt. Forêt qui, dans le même temps, se voyait de plus en plus colonisée par toutes sortes d’utilisateurs (randonneurs, cyclistes…), souvent accompagnés de chiens. Résultat, les occasionnels sangliers qui fréquentaient autrefois la plaine et qui étaient systématiquement pourchassés pour être remisés en forêt s’y réinstallent et s’y reproduisent.
À ces nouveaux territoires s’ajoute un troisième : les zones sanctuarisées. Aux zones interdites (certaines portions de camp militaires, zones « dangereuses » et réserves),
citons les premières d’entre elles, les zones anthropisées (urbaines ou périurbaines).
Selon Jean-Claude Houssard, il faudra s’inspirer de ce qui se fait en Allemagne, un pays qui compte autant de chasseurs de sangliers en forêt qu’en plaine. « Ils opèrent avec des miradors mobiles, déplaçables et qui sont disposés judicieusement dans les champs. En France, le tir de l’espèce dans les cultures est encore trop timide. Dans notre département, il est désormais autorisé du 1er mars au 31 mai. 45 tirs détaxés sur 13 000 annuels ont été recensés. »
Echos de l’Ille-et-Vilaine : les petits sangliers dans le viseur
Dans le Nord-Ouest, le sanglier affiche également une augmentation de ses effectifs, certes bien inférieure aux départements de tête (moins de 5000 animaux contre plus de 20000). « Nos chiffres révèlent qu’on prélève autant de sangliers en milieu ouvert que fermé », explique Éric Coirre, qui préside l’Adcgg d’Ille-et-Vilaine. Une tendance en partie expliquée par l’explosion des grandes surfaces de culture en maïs. Mais selon le président, face à la courbe des indemnisations de dégâts, il y a urgence à contenir les populations en accentuant les prélèvements des petits sangliers (moins de 40 kg). « Un marcassin qui naît en décembre est physiologiquement apte à procréer en juin. Compte tenu de leur représentativité dans la population, nous savons que ce sont les jeunes qui produisent le plus de naissances. Or, le prix unique du bracelet favorise le tir de sujets plus corpulents et restreint indirectement ces prélèvements. » De même, dans un département où le prélèvement en chasse individuelle silencieuse du sanglier représente 1,6%, de gros efforts sont à faire pour promouvoir ces modes de chasse, notamment estivaux. « Beaucoup de territoires interdisent encore le tir à la carabine, ce n’est pas normal. »
« En France, le tir de l’espèce dans les cultures est encore trop timide. »
Echos du Var : un milieu qui se ferme sans cesse
Dans la garrigue provençale, seul le « tir aléatoire » est envisageable et les consignes de tir, de fait, inexistantes. « Chez nous, le sanglier est uniquement chassé en battue aux chiens courants. Compte tenu de la fermeture des milieux, les chasseurs tirent ce qu’ils voient », explique Gérard Arnoult, président de l’Adcgg du Var. Dans ce contexte, il apparaît que l’explosion des populations de sanglier que connaît le pourtour provençal ne peut être expliquée par les limitations des consignes de tir. C’est la déprise agricole, la fin du pastoralisme, l’extinction de la culture du chêne-liège… qui ont contribué à refermer significativement un milieu autrefois ouvert. À cela, il faut ajouter la désertification rurale. « Résultat, on est passé de zones ouvertes et fréquentées à des zones très fermées et désertées. » Le sanglier en a profité, aidé par l’intensification des productions de fruits des chênes verts et des châtaignes et protégées par des hivers cléments. Regardons maintenant du côté des obstacles. Les observateurs locaux sont formels : le loup est un préda
teur du sanglier. Les observations menées notamment dans le camp militaire de Canjuers, qui abrite plusieurs meutes, le démontrent. Les 14 000 moutons qui stationnent dans la région sont désormais gardés par 200 chiens de protection. Cette politique dissuasive incite le loup à se rabattre sur d’autres proies environnantes comme le sanglier. Certains sujets de 50 à 60 kg ont déjà été victimes de meutes. « Nous avons retrouvé une proportion très importante de poils de sangliers dans leurs crottes. » Si le président ne se prononce pas sur la nature de l’impact du loup sur le sanglier, il conclut : « En six ans, nous sommes passés de 500600 sangliers à 200. »
Mais à la présence du prédateur, il faut ajouter deux autres effets conjugués. « L’intensité des sécheresses que nous connaissons a un impact sur la qualité de la reproduction de l’espèce. » Et plusieurs départements du Sud-Est connaissent des foyers de sangliers porteurs de la maladie d’Aujesky, qui décime les marcassins. Gérard Arnoult, comme ses confrères, en arrive aux mêmes recommandations. Culturellement,