Sanglier des villes
Si certains croient voir des éléphants roses, ils en connaissent la cause. En revanche, d’autres, de plus en plus nombreux, font part de la vision de bêtes noires citadines mais en ignorent l’origine. Désormais, photos et vidéos abondent de sangliers s’aventurant sur l’asphalte.
En décembre dernier, 9 animaux vermillent sur une pelouse du centre-ville de Montmorency (Val-d’Oise), à une douzaine de kilomètres du périphérique parisien. Début février, 10 sangliers gambadent sur les trottoirs du bourg vendéen de Saint-Hilaire-de-Riez. Le sanglier débarque en ville !
Mais pourquoi diable Sus scrofa se rapproche-t-il de l’Homme et de son territoire de prédilection, la cité ? Pour quelle raison naquit la sous-espèce Sus scrofa urbana ?
À l’origine de cette adaptation, nous trouvons un cocktail – forcément explosif – qui mêle fortes densités animales, aménagement du territoire, changement climatique, etc. Autrement dit, le sanglier, toujours plus nombreux, évolue sur des territoires qui, bien que toujours plus urbains, offrent une « nouvelle sauvagerie » à un animal terriblement opportuniste.
Ces dernières années, la forêt est devenue hostile au sanglier – ainsi qu’au cerf d’ailleurs –, car elle est ultra dérangée. Outre un rythme de chasse du grand gibier davantage soutenu, de nombreuses activités y sont apparues ou s’y sont développées de façon inouïe : promeneurs avec ou sans chien, randonneurs, amateurs de course d’orientation, vététistes, ramasseurs de champignons, de fleurs et de mues, etc. Le citadin, toujours plus majoritaire et stressé, a besoin de verdure, de « nature ». Des secteurs de forêt (domaniale, régionale, départementale ou communale) sont aménagés pour y répondre. Parallèlement, la plaine est de moins en moins fréquentée par l’agriculteur et le villageois. Ainsi, nous observons une inversion des tendances : tandis que la forêt – tout du moins une partie évidemment – n’est plus le traditionnel refuge du sanglier, la plaine – au sens large – ne lui est plus hostile.
En périphérie des bourgs et des villes, les buissons, marais, ronciers et friches offrent gîte et couvert. Ces nouveaux
no man’s lands environnementaux se révèlent accueillants.
Mais encore, une particularité propre au sanglier est à relever. En France, comme dans nombre de régions du monde, il est le grand mammifère terrestre au taux de reproduction le plus élevé : 2 à 8 marcassins par portée, en moyenne 4-5 ; jusqu’à 3 portées en 2 ans ; des laies pouvant se reproduire de plus en plus précocement. Nous vous disions que le cocktail était explosif !
Voulez-vous en savoir davantage ? Ce mois-ci, dans
Connaissance de la Chasse, Thibaut Macé mène une enquête inédite et passionnante sur le phénomène du « sanglier des villes ». Phénomène national, mais encore européen. Découvrez sans plus attendre les causes et les conséquences de la présence de la bête noire sur le bitume. Comme quoi décidément rien n’est figé. La nature s’adapte à merveille et sait nous réserver des surprises… Bonne lecture à toutes et à tous.