Cosmopolitan (France)

Bombasse, rivale, collègue...

Question de prudence, y a des filles que je préfère mettre sous surveillan­ce… Et dans ma poche !

- Par Chloé Plancoulai­ne. Photo Peter Cade.

Comment se les mettre dans la poche

ily a les filles qui sont un peu trop célibatair­es autour de mon mec. Il y a celles qui veulent piquer ma place, au boulot, à la caisse du supermarch­é… Celles qui prennent plus d’espace dans ma vie que je ne leur en donne. Qui décident pour moi : « Je vous ai fait une frange. » Ou préparent déjà leur croche-patte quand je fais claquer mes escarpins à moins de cinq mètres de leur homme. Autant de petits panneaux « danger » qui s’allument, et ce handicap qui complique tout décidément : je suis aussi partante pour le conflit qu’une tortue pour courir un 100 mètres. En plus, la rivalité féminine, je ne sais pas gérer. J’ai grandi avec un poster des Spice Girls grandeur nature audessus de mon lit et une seule religion : le girl power . Plus on est de meufs, mieux on vit ! Du coup, quand un membre du crew se retourne contre moi, je suis désemparée. J’ai cette petite phrase qui tourne en boucle, la même que face à la terrible Linda du CP qui me collait ses chewing-gums dans les cheveux : « Pourquoi elle veut pas être ma copine ? » J’ai encore plus honte quand c’est moi qui, contre tous mes principes, ai soudain une terrible envie de balancer des chewing-gums dans un tie and dye. Pourquoi je m’énerve ? C’est quoi le danger ? Je serais pas un peu jalouse, là ? Je n’ai plus l’âge de pleurer, d’appeler ma mère à la rescousse ou de mâcher des Malabar vengeurs pour défendre ma place. Du coup, j’ai développé une stratégie adulte et non violente pour survivre à un regard plus noir qu’un smocky eye ou à une attaque à la bombe – une blonde en micro-short dans l’open space de mon mec par exemple. Ces filles, plutôt que de m’en faire des ennemies, je me les mets dans la poche. Alors, copines ?

La collègue un peu trop sympa de mon mec

Ça me met la puce à l’oreille… Depuis un mois, il me parle de Nicole, sa besta de bureau avec qui il enchaîne les délires. Avec un prénom pareil, elle doit avoir l’âge de ma grand-mère ! Je déchante devant le trombinosc­ope : Nicole a deux siècles de moins que ce que j’imaginais et les mensuratio­ns de Jessica Alba. Pourquoi Nicole ? « Parce qu’à New York – d’où elle vient – c’est classe de porter des vieux prénoms français. » Pfff. Toi, je te mets dans ma poche… Et si on invitait Nicole à prendre l’apéro à la maison ? Mon chéri est emballé et moi, je m’emballe dans ma plus belle robe pour la recevoir… Avec un hug pour la mettre à l’aise. Une heure plus tard, je crache ma Knacki dans un fou rire. C’est vrai qu’elle est hilarante ! Surtout depuis qu’elle a mentionné l’existence de son mari. Cette soirée n’a pas calmé ma jalousie, elle l’a juste déplacée : moi aussi, je veux Nicole comme copine de bureau.

La coiffeuse trop détendue du ciseau

Ça me met la puce à l’oreille… Ses pointes titillent à peine sa nuque et quand elle voit arriver ma crinière de sirène – à quelques fourches près –, son regard s’illumine : « Alors on fait quoi aujourd’hui ? On coupe tout ? » Son regard s’éteint quand j’annonce : « Juste les pointes. » Toi, je te mets dans ma poche… Pendant le shampooing, je lui raconte ma mésaventur­e avec l’une de ses consoeurs : « Je lui avais demandé le carré long de Milla Jovovich. Et je suis sortie avec le carré de Milla Jovovich… mais dans “Jeanne d’Arc”. Alors depuis, je ne vais pas n’importe où. » Donc, pas n’importe où, c’est ici, dans son salon. Et comme elle comprend le compliment glissé subreptice­ment, elle n’a plus qu’une envie : suivre les miennes, d’envies. Au millimètre.

La voisine qui en est à sa cinquième crémaillèr­e

Ça me met la puce à l’oreille… 21 heures. Déjà trois fois que le bip de son interphone résonne à travers mon mur épais comme du tulle. Trois personnes, c’est le début d’une grosse soirée, non ? On est jeudi, elle est étudiante, ça colle. Ça colle juste moins avec ma réunion ultra importante du lendemain 8 heures. Toi, je te mets dans ma poche… « Bonsoir ! Excusezmoi de vous déranger mais le papi du dessous vient de

passer me voir. Il a peur que vous fassiez la fête ce soir… Et comme il est plutôt du genre à appeler la police au premier couplet de Lady Gaga après 22 heures… » Connivence, sourire complice, je lui glisse un dernier conseil : « Moi, pour ne pas avoir de problèmes, j’organise les apéros à la maison, puis je sors. Vous connaissez le bar Bulle qui fait l’angle ? Top ! » Ça me met la puce à l’oreille… Elle attend l’entrée de la boss pour lâcher un « Euh Chloé, t’as avancé le dossier Bidule ? Parce que ça commence à urger là ! » ou « Encore un café ? Et ben t’as le temps, toi ! » Elle croit peut-être qu’en me parlant comme à une stagiaire de troisième, elle fera oublier mes deux ans d’expérience de plus qu’elle au moment de la prochaine promo. Toi, je te mets dans ma poche… Il y a des armes contre lesquelles l’ambitieuse ne peut pas lutter : la politesse et le profession­nalisme de son adversaire. Je multiplie les attaques : « Si tu veux les relire, les 187 pages du dossier Bidule sont sur ton bureau » ou « Je vais à la machine, tu veux un café ? ». Au bout d’un moment, elle n’a plus le choix, elle joue le même jeu et découvre un truc ouf : elle est beaucoup plus efficace quand elle ne gâche pas son énergie à bouffer la mienne.

La jeune retraitée qui tente de griller à la caisse

Ça me met la puce à l’oreille… Après une file d’attente longue comme le rayon biscuits, je ne suis plus qu’à deux personnes du but. À côté de moi, devant les Mentos, la jeune retraitée fait mine d’hésiter entre les goûts menthol et fraise. Si elle compte sur ses deux cheveux blancs pour que je laisse passer ses boîtes de Canigou avant mes Barilla, elle peut se brosser. Toi, je te mets dans ma poche… Elle s’approche dangereuse­ment de la caisse quand je repère une vraie vieille avec toute la panoplie – canne, capuche de pluie, chariot de courses tartan… « Passez devant moi, ce sera plus confortabl­e », je lui glisse dans le sonotone. La jeune retraitée ne peut pas souffrir la comparaiso­n avec Supermémé et abdique en rejoignant le bout de la file, avec un sourire à mon intention pour la B.A.

La nouvelle chérie de mon meilleur pote

Ça me met la puce à l’oreille… Depuis deux mois, quand je l’appelle, mon BF a une voix de fille. Je mets encore quelques secondes avant de tilter que c’est sa copine qui a décroché : « Il est crevé, il va pas pouvoir sortir. » La dernière fois qu’on s’est vus tous les trois, elle a lâché entre le sauc’ et le cornichon : « C’est marrant qu’il ne se soit jamais rien passé entre vous ! » En fait, j’ai senti que le sujet ne l’amusait pas du tout.

Toi, je te mets dans ma poche… « Et si on se faisait un verre entre filles ? », je propose un jour où mon BF est en déplacemen­t. Un mojito triplement constructi­f. 1) Je découvre que la meuf de mon BF est aussi jalouse que sympa – très sympa donc. 2) La langue déliée par le rhum à la paille, je lui confie que son mec a autant d’attrait sexuel pour moi qu’une peluche. 3) Après le compte rendu de ce super tête-à-tête, mon BF flippe que je l’échange contre sa copine et il répond de nouveau luimême à son téléphone.

La mère du célibatair­e du village

Ça me met la puce à l’oreille… Laurence est très amie avec ma mère et quand je rentre au bercail, je la croise souvent à l’heure du thé. Depuis que son fils a passé le cap des 25 ans en célibatair­e, Laurence ne recule devant rien pour vendre les atours de son petit. « Tu viens dîner à la maison ce soir avec Bastien et moi ? J’ai acheté un gigot de trop… » Elle semble zapper un petit détail : mon mec. Toi, je te mets dans ma poche… « Je ne veux pas d’enfants. Jamais. » Dans l’oreille d’une sourde, une phrase choc – et mytho – vaut parfois mieux que de longs discours. La wannabe grand-mère s’étouffe avec son Spéculoos et passe un coup d’effaceur sur ses espoirs. Et sur les succès présumés de Bastien qu’elle me contait depuis des semaines. Elle peut de nouveau me confier sans filtre les frasques hilarantes de son fils avec les filles du village. l

TOI AUSSI, JE T’AI À L’OEIL…

L’esthéticie­nne stagiaire qui me jure pour la troisième fois qu’on a fait le plus dur en approchant une énième bandelette de ma zone ultra sensible. La fille à grande bouche qui s’installe juste à côté de moi au ciné avec son gros paquet de pop-corn. Ma mère qui me promet un déj « à la bonne franquette » et en « petit comité » pour mon anniversai­re. La fille juste avant moi à la boulangeri­e quand il ne reste plus qu’une seule salade tomate-mozza au milieu des sandwichs. L’amie qui me rappelle pour la dixième fois combien j’ai de la chance d’être avec mon mec tellement il est gentil, canon, intéressan­t, drôle… La fille du bureau qui achète les mêmes fringues que moi quelques jours après et qui fait comme si c’était une coïncidenc­e. L’amie qui commence un régime en même temps que moi et qui risque de le tenir, elle. La fille à qui j’ai prêté mon DVD de « Dirty Dancing ». L’accro d’Instagram qui sort son smartphone pile quand j’approche un énorme sushi de ma bouche grande ouverte.

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