UNE ÉQUIPE DE CHOC POUR RÉCHAUFFER LES COEURS
500 repas par jour à servir
Elles louent une maison dans les environs. Se mettent au travail, un tablier autour des hanches, avec enthousiasme. Pas question de la jouer triste ! « Une fois par semaine, Emmaüs nous donne les invendus des supermarchés du coin, on achète des fruits et légumes au marché de gros de Lille, on récolte des dons de plusieurs partenaires et de l’épicerie bio dans quelques magasins. » Leur mission : des rencontres en cuisine entre bénévoles et réfugiés et la distribution de 150 déjeuners végétariens, et d’environ 350 dîners par jour. Tout est fait maison, cuisiné à partir de produits bruts. C’est comme ça que, le 2 septembre, au hasard de leur page Facebook, on trouve au menu : salade de céréales et légumineuses, aubergines confites, mayonnaise aux herbes, caviar de courgettes du jardin, et en dessert, trifle aux pêches et mirabelles, mousse cheesecake et crumble coco. « Les desserts maison et frais, sur le camp, ça n’existait pas. C’est un petit plus, mais c’est un immense plaisir, dit Vanessa. Et puis un jour, les femmes du camp nous ont appris à préparer le “tapsi”, une sorte de ratatouille kurde. Quand on a commencé à cuisiner leurs recettes, celles de leur pays, on a vu une immense gratitude dans leurs yeux. » L’expérience fait du bruit sur les réseaux et des bénévoles venus d’un peu partout viennent prêter main-forte. « Un réchaud, c’est un ustensile transportable. Derrière il y a l’idée de l’itinérance, de la vie nomade, d’hommes, de femmes, d’enfants sur les routes et d’histoires qui se racontent… Notre Récho à nous, c’est Re-fuge, Ch-aleur, O-ptimisme. »
Créer du lien
« On avait cette envie de faire participer tout le monde, de provoquer de l’échange. Et surtout d’impulser de l’activité dans ce camp, où chaque jour ressemble au précédent. » Il y a eu aussi des interventions du Récho au Women Center, un espace réservé aux femmes et aux enfants sur le camp. Ici, l’accès est interdit aux hommes, les femmes peuvent se « dévoiler » dans un cocon protégé. « On a réussi à créer une relation privilégiée de femmes à femmes. » La parole se libère, on y raconte ses rêves. « Tous les réfugiés ne veulent pas passer en Angleterre. À Grande-Synthe, beaucoup cherchent à rester en France. À trouver du travail, dans les cuisines, pourquoi pas. On a réveillé cette envie. Il y a 200 000 emplois à pourvoir chez nous dans ce secteur. Au Women Center, le jour de notre départ, on a fêté avec émotion l’anniversaire de trois enfants en cuisinant des cookies, des moelleux au chocolat et des gâteaux aux fruits. »
Et maintenant…
Le food truck est à l’arrêt. De l’énergie, elles en ont tellement fourni pendant les semaines passées à La Linière… Élodie et Vanessa veulent prendre un peu de recul. Faire le bilan. La vie d’avant reprend son cours mais un peu différemment, et déjà, elles réfléchissent à la suite. Le food truck du Récho prendra la route au printemps prochain direction la Belgique. Puis ailleurs en Europe. « Deux ou trois missions par an. Oui, c’est possible. Au regard de ce que nous venons de réaliser. »