Cosmopolitan (France)

J’ai moyen envie de t’aider à déménager … surtout samedi, à 7 heures du mat.

- PAR MATHILDE EFFOSSE

RRendez-vous à 7 heures, samedi, à quarante minutes de bus de chez moi. Pour descendre les meubles et cartons d’Aurélie, qui vit au cinquième sans ascenseur, et les remonter dans son nouvel appart, au troisième. « On gagne deux étages ! » s’est-elle enthousias­mée sur notre groupe WhatsApp, comme si s’éviter 20 marches sur 80 allait me faire sauter de joie. Déjà, je comprends pas pourquoi elle m’a demandé à moi : je fais autant de sport que mon chat et je sais depuis mon enfance, quand je ne tenais jamais plus de trois secondes sur un trapèze, que je suis née sans muscles des bras. Alors compter sur moi pour accélérer un déménageme­nt, c’est un peu comme compter sur un ado pour accrocher des cadres : ambitieux. Déjà, ça tue mon week-end

Réveil à 6 heures le samedi matin = pas de soirée le vendredi. Déménageme­nt le samedi = rien d’autre de possible dans la journée + trop crevée pour sortir le soir. Ce qui nous laisse… le dimanche. Le jour pendant lequel les gens normaux récupèrent de leurs sorties et se font un brunch pour débriefer. Mais je m’en fous, moi, du brunch, s’il n’est pas bercé d’un doux vertige de fatigue satisfaite d’avoir passé un bon weekend, éventuelle­ment agrémenté d’une légère gueule de bois ! Les trucs légers, c’est ingrat

Expliquer à Aurélie mes capacités physiques, je l’ai déjà fait. Elle m’a répondu que je ne porterais rien de lourd. Mais les trucs légers, c’est pire. Ça multiplie les allers-retours, et si on s’en grille une entre deux cartons, on passe pour une flemmarde. Parce que Léo, qui vient de se taper le frigo et la table basse, il transpire comme une flaque, donc il peut faire une pause de vingt minutes et on continuera à le regarder avec des yeux reconnaiss­ants et un sourire compatissa­nt, mais Mathilde qui a descendu la lampe d’appoint et les nappes et qui se tape un sandwich au Kiri, ça énerve. Foutue pour foutue…

Samedi, 6 heures, mon réveil me hurle d’abandonner ma couette. Et si j’arrivais avec une attelle au bras ? Je pourrais dire que je me suis fait une tendinite, mais que ce n’est pas grave, ça fera même un peu Wonder Woman qui vient malgré ses blessures… Rien que d’avoir eu cette idée perfide, je mérite trois cartons de livres. Bon, allez… j’y vais. Je tire ma carcasse boudeuse dans le bus, j’arrive devant chez Aurélie et… pourquoi il y a déjà la moitié des cartons dans la rue ? « Coucou Mathilde ! » s’exclame-t-elle en sortant de l’immeuble. « Tu t’occupes des petits cartons ? » Mais… ils sont déjà là ? « J’ai demandé de l’aide à deux voisins costauds. Ils descendent tout, ton job, c’est juste de les mettre dans la camionnett­e. » Ah… bah ça va, en fait. Honteuse de mes plans machiavéli­ques, je tasse mon attelle au fond de mon sac et je m’exécute. Arrivée dans le nouvel appart, je réalise qu’il y a un ascenseur. « J’ai pas dit qu’il n’y en avait pas. » C’est vrai… On termine à midi, sans courbature­s et avec une bonne dizaine de fous rires dans les côtes. Bon, finalement, je ne suis pas claquée et j’ai fait un peu de sport. C’est cool en fait d’aider des potes à déménager. « En échange, j’ai promis à mon voisin de l’aider pour son déménageme­nt à lui, le week-end prochain », annonce Aurélie. « Vous venez ? » Euuh… je te redis ça ?

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