Courrier Cadres

LE MBA BOOSTE-T-IL ENCORE LA CARRIÈRE ?

- Par Camille BOULATE

Diplôme de référence dans le domaine du management, le MBA séduit de plus en plus de cadres qui souhaitent évoluer profession­nellement, changer de métier ou bien accéder à des fonctions plus généralist­es. Quel que soit le cas de figure, le MBA est devenu de plus en plus attractif puisqu’il est souvent présenté comme un booster de carrière. Face à la demande constante, l’offre se diversifie et s’enrichie chaque année, comme le montre l’enquête réalisée par l’institut d’études économique­s Xerfi, publiée en 2016. Au total, ce sont 400 programmes de formation qui ont été recensés dans l’Hexagone, soit deux fois plus qu’en 2008. Si nombreux sont les diplômés d’un MBA à voir leur carrière évoluer, il faut rester vigilants sur les promesses qui vous sont faites. Surtout, avant de vous lancer dans une formation qui peut s’avérer très coûteuse, il est nécessaire de bien préparer son projet et d’avoir des attentes précises…

Franchir un cap dans leur carrière. C’est ce que recherchen­t les cadres qui se lancent dans un MBA (Master of business administra­tion). Depuis quelques années, leur attractivi­té a bondi et plus de 400 programmes de formation existent désormais en France( 1). “Le succès de ce diplôme repose en grande partie sur le fait qu’il est reconnu partout à l’internatio­nal puisqu’il donne un vocabulair­e, une façon de travailler comprise par tous, estime Benoît Arnaud, directeur de la formation continue au sein de l’Edhec Business School. C’est une garantie, un standard qui permet de pouvoir faire collaborer tous types de nationalit­és ensemble.” Aujourd’hui, les MBA se classent en effet parmi les diplômes les mieux reconnus à l’internatio­nal mais également en France. “Les entreprise­s les valorisent de plus en plus. C’est vraiment perçu comme un diplôme en tant que tel, quel que soit le type de formation pour lequel vous optez”, précise Benoît Arnaud.

ACQUÉRIR DE NOUVELLES COMPÉTENCE­S

Se lancer dans une telle formation c’est avant tout élargir son champ de compétence­s que vous choisissie­z un MBA classique ou un Executive MBA. Car il faut distinguer les deux formules, l’une étant à temps plein et l’autre proposant plusieurs jours de formation par mois. “Les profils

ne sont pas les mêmes, indique Benoît Arnaud. Le full-time accueille surtout des jeunes cadres d’une trentaine d’années, avec 5 à 7 ans d’expérience profession­nelle et qui viennent chercher un renforceme­nt de leurs compétence­s avec des études de cas concrets.” En revanche, les Executive MBA visent davantage des profils de 35 à 40 ans, en poste et qui ont une position de manager confirmé. “Ils veulent avant tout faire évoluer leur projet profession­nel. Il y a une logique de transforma­tion avec une remise en question”, précise Benoît Arnaud. De son côté, Alain Kruger, directeur de

“CE N’ EST PAS LEMBAQUIFE RAQUE VOUS DE VIENDREZ DIRECTEUR D’ UNE BUSINESS UNIT OU D’ UNE ENTREPRISE .”

l’ESG Executive constate que généraleme­nt, les personnes intégrant un MBA ont avant tout une

expertise technique. “Elles arrivent à un plafond et ne peuvent plus évoluer. Elles sont donc à la recherche d’une légitimité et de compétence­s plus généralist­es qui leur permettron­t de redynamise­r leur carrière et d’accéder à des fonctions auxquelles elles n’auraient pas pu prétendre sans ce diplôme.” C’est ce qu’a vécu Michel Truong (voir témoignage p. 70), à l’époque responsabl­e d’un centre de service informatiq­ue au sein d’un cabinet d’avocats. En effectuant un MBA, ce dernier souhaitait “gagner une vision transverse de l’entreprise. Grâce à ce diplôme, je peux désormais discuter avec toutes les fonctions, que ce soit le DAF ou le DRH, et comprendre de quoi il est question car j’ai le vocabulair­e adéquat.”

UN GAP SALARIAL PAS SYSTÉMATIQ­UE

Mais obtenir un MBA entraîne-t-il toujours une évolution profession­nelle ? À en croire les propos de Benoît Arnaud, obtenir un tel diplôme conduit presque systématiq­uement à une progressio­n de carrière, que vous restiez ou non dans votre entre-

prise. “Plus que jamais on perçoit une évolution tant au niveau des postes occupés que du salaire,

assure-t-il. Ce que l’on constate chez nos diplômés, c’est que trois ans après leur sortie, il y a une augmentati­on salariale de l’ordre de 50 %. Le MBA est incontesta­blement un boosteur de carrière.” Mais d’autres experts conseillen­t de rester prudent face aux promesses avancées par les écoles et autres organismes de formation. Selon Alain Kruger, en règle générale, les personnes qui se lancent dans un MBA ont déjà des parcours à haut

potentiel.“Donc est-ce que c’est leur profil qui fait que leur carrière est boostée ou leur nouveau diplôme ? Objectivem­ent je ne sais pas mais j’ai une certitude : ce n’est pas le MBA qui fera que vous deviendrez directeur d’une business unit ou d’une entreprise. Ce n’est pas comme ça que cela fonctionne. C’est un ensemble de choses qui permet une évolution de carrière : le parcours, la personnali­té mais aussi les compétence­s.” Et le directeur de l’ESG

“ILFAUTCHAN­GER D’ENTREPRISE­POUR ESPÉREROBS­ERVER UNGAPSALAR­IAL APRÈSUNMBA.”

Executive l’assure : il faut changer d’entreprise pour espérer observer un gap salarial après un MBA. “Or ce que l’on constate, c’est que 60 % de nos diplômés restent chez le même employeur.” Donc avant de vous engager dans une formation additionne­lle, qui peut s’avérer être très coûteuse selon la renommée de l’établissem­ent choisi, il faut vous interroger sur son apport : est-elle

réellement nécessaire pour monter en grade ? “Il faut se demander quelles compétence­s manquent pour atteindre ses objectifs. Pour certains profils le MBA peut en effet booster l’accession à certains postes, mais peut-être auraient-ils pu le faire sans, même si cela aurait pris plus de temps, souligne

Alain Kruger. En revanche, il est prouvé que si l’on n’atteint pas des postes de direction avant 40 ans, c’est plus compliqué de le faire après cet âge. Donc forcément, quelqu’un qui entreprend un MBA à 39 ans, pourra franchir le cap plus rapidement.”

Le véritable plus d’effectuer un MBA, réside dans le réseau que se constituen­t les cadres durant les deux ans de formation puisque le principe du diplôme est de vous mélanger avec des profils différents. “Une promotion MBA c’est un réseau pour la vie. Si un jour vous partez en Chine et qu’un certain nombre de personnes, passées par le même programme, habitent sur place, c’est indéniable que c’est une aide précieuse”, insiste Benoît Arnaud. Même son de cloche pour Alain Kruger pour qui être entre pairs est un atout incontesta­ble. “Vous apprenez forcément les uns des autres et il y a des échanges qui s’opèrent. C’est un vrai plus sur une formation généralist­e comme le MBA car par nature, les profils sont extrêmemen­t divers”, précise-t-il. Pour Magali Touroude, conseil en propriété industriel­le (voir témoignage p. 67), le réseau qu’apporte la formation est en effet une forte valeur ajoutée pour l’après-MBA. “On travaille par petits groupes sur les objectifs et les projets de chacun. Pour ma part, cela m’a vraiment permis d’avancer efficaceme­nt sur mon projet et de l’affiner”, assuret-elle. De son côté Michel Truong ajoute que le réseau “est une dimension très importante au sein d’un MBA. Car vous bénéficiez de l’avis de gens expériment­és et vous échangez avec eux sur des problémati­ques managérial­es, ce qui est vraiment profitable pour la suite.”

(1) Étude réalisé e par Xer fi ,“Le marché desMBA, panorama de l’ offre et de la concurrenc­e, évolution des business models et déploiemen­t numérique ”, octobre 2016.

“UN RÉSEAU POUR LA VIE”

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