Courrier Cadres

Vie de bureau : Manager en open space

Tous logés à la même enseigne ! Les managers, et parfois même leurs dirigeants, rejoignent désormais leurs équipes au milieu de l’open space. Ce qui n’est pas sans poser quelques difficulté­s. Surtout quand l’aménagemen­t des bureaux ne sert qu’une baisse d

- Par Aline Gérard.

L’open space est encore loin d’être la norme. Reste que le système séduit nombre d’entreprise­s - par conviction, phénomène de mode ou pour des questions de coûts du mètre carré. Pour les managers auparavant habitués à accompagne­r - ou plutôt superviser - leurs équipes depuis leur bureau fermé, l’exercice peut s’avérer plus difficile qu’il n’y paraît.

CREVER L’ABCÈS

Intégrer l’open space a valeur d’exemple. Les collaborat­eurs vivent mal qu’on leur vante les vertus des espaces ouverts, censés fluidifier les échanges, tout en étant les seuls à en subir les désagrémen­ts lorsqu’ils sont mal pensés. Bruits, interrupti­ons incessante­s, problèmes de confidenti­alité… les travers de ce type d’agencement­s sont bien connus. Et s’ils impactent le manager, ils irritent tout autant les collaborat­eurs. La première étape consiste donc à mettre clairement le sujet sur la table. “Il faut poser les principes : chacun a droit à un minimum de respect, chacun a droit à un minimum de confidenti­alité, l’entreprise a droit à ce que des infos ne se répandent pas, etc., relève Jean Grimaldi d’Esdra, directeur associé de Formadi et directeur pédagogiqu­e à l’Edhec Executive Education. Il faut réussir à faire sortir ce que les gens ont dans la tête, ce qui les gêne, pour désamorcer les risques. Ensuite, il faut définir des règles de bon sens en commun.” L’une des choses les plus complexes à gérer, ce sont ces personnes chronophag­es qui viennent vous taper sur l’épaule régulièrem­ent. L’un des points à établir est donc de définir un code. Sylcie Chuffart, formatrice en développem­ent comporteme­ntal chez Orsys Formation, suggère un système de feu tricolore sur une simple feuille : “Rouge, ne me dérangez pas ; Orange, si ça peut attendre tant mieux ; Vert, allez-y !” De la même façon, n’hésitez pas à vous isoler avec des écouteurs. Les règles ayant été établies, le signal envoyé ne sera pas mal perçu. Attention, veillez à ne pas jouer les policiers, sans quoi votre présence sera reçue

comme une forme de contrôle. Même si l’espace est collectif, ne passez pas derrière les écrans d’ordinateur­s.

À L’IMPOSSIBLE, NUL N’EST TENU

Vous allez sans doute bouillir intérieure­ment, mais retenez-vous d’intervenir, même en cas de tensions. “Quand cela touche au respect des personnes, difficile de ne pas le faire, nuance Jean Grimaldi d’Esdra. Mais quand il s’agit de dossiers, il faut laisser la liberté aux gens de s’exprimer et renvoyer aux moments de reporting collectif ou individuel.” Sylcie Chuffart recommande elle aussi de laisser passer la tempête : “Je suis présent, j’assiste à ce qui se passe mais je me tais. Apprenez à vous taire ! ” Autre sujet, celui de la confidenti­alité. N’ayez pas honte de vous lever de votre chaise pour aborder ailleurs des points sensibles. Le signal est finalement identique à celui envoyé lorsque l’on ferme la porte de son bureau. Pour éviter les bruits de couloirs liés à des bribes d’informatio­ns que les équipes auraient pu percevoir dans cet espace ouvert, pri-

vilégiez les discussion­s isolées. “À moins que ce soit un sujet brûlant qu’il faut aborder dans la seconde, il faut le planifier”, confirme Jean-Pierre Brun, consultant associé au cabinet Empreinte Humaine. La plus grande vertu des espaces ouverts, c’est la fluidité des échanges. Mais attention, ne croyez pas pour autant que toutes les informatio­ns se prêtes à être partagées à la criée dans l’open space, ni même que ce qui est évoqué sera retenu. Certaines personnes peuvent être absentes du bureau, concentrée­s ou tout simplement pas réceptives. Les réunions d’équipe restent indispensa­bles. Pour Jean Grimaldi d’Esdra, “quand les gens ne perçoivent pas que l’info leur est e typiquemen­t destinée, ils font comme c s’ils ne l’intégraien­t pas

voire v ils ne l’intègrent pas”. Et si on vous interpelle par dessus votre ordinateur pour vous poser une question, en matière de ressources humaines par exemple, ne répondez pas à la volée. Ce qui ne devrait prendre que 5 mn vous déconcentr­era beaucoup plus longuement. Sortez votre agenda et proposez un rendez-vous très rapidement. Bien sûr, tous ces conseils ne valent que si les locaux ont été bien aménagés : bulles pour se concentrer, isoloirs pour téléphoner, espaces insonorisé­s – sans réservatio­n - pour s’entretenir avec un collaborat­eur… Combien de managers se retrouvent à passer leurs coups de fil sensibles ou nécessitan­t de la concentrat­ion dans une cuisine ou un couloir ? “On ne peut pas faire d’un espace chaotique et pagailleux un espace de travail formidable, insiste Jean Grimaldi d'Esdra. À l’impossible

nul n’est tenu !” À vous manager de faire remonter ces besoins à votre direction. En attendant que votre PDG lui-même s’installe lui aussi dans l’open space. Ce qui sera sûrement la meilleure façon de voir les conditions de travail s’améliorer.

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