Progresser : Innover, ce n’est pas ce que vous croyez
Définir l’innovation, ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas. Il ne s’agit pas de donner une boîte à outils de l’innovation, mais bel et bien d’en saisir l’ambivalence pour lui faire une place dans son entreprise. Par Frédéric Féry, expert Apm, professeur
L’innovation est trop souvent, à tort, résumée au seul fait d’avoir des idées nouvelles. Pire, on a tendance à confondre créativité et innovation. Or, ce qui définit une entreprise innovante est sa capacité à mettre en oeuvre les idées nouvelles, passer de l’idée au marché. Mais comment y parvenir ? Un management adapté est la solution. Combien de collaborateurs ne sont pas déjà sortis frustrés d’une séance de brainstorming ? Des tonnes d’idées, un projet à mener pour en développer quelques-unes, mais au final aucune n’aboutit. L’organisation interne, avec ses procédures, ses budgets et ses jeux politiques, n’aura pas permis de les transformer en offres nouvelles. James March, professeur à l’université de Stanford, a été le premier à mettre en évidence le fait qu’une entreprise innovante doit tout autant savoir exploiter qu’explorer. Si vous vous contentez d’avoir des idées, vous n’êtes pas un innovateur. À l’inverse, Apple est un formidable innovateur, mais à partir d’idées qui ne sont pas généralement les siennes.
ARBITRER DES CONTRAIRES
Comment susciter l’innovation dans l’entreprise ? C’est tout le paradoxe de l’entreprise innovante : savoir concilier l’exploration et l’exploitation. Or, pour gérer ces deux aspects, l’entreprise a besoin de profils différents qu’a priori tout oppose. Pour exploiter, il faut recruter des personnes ordonnées et méticuleuses capables avant tout d’améliorer l’existant… Pour explorer, la créativité et l’esprit contestataire sont les atouts maîtres et la remise en cause de l’existant est essentielle. Le talent du dirigeant réside alors dans l’arbitrage entre ces contraires. Il s’agit de mettre en place un management ambidextre : avoir une main qui explore et l’autre qui exploite. 3M a été une des premières entreprises à déployer un management ambidextre. Elle avait mis en place des grands chantiers d’innovation, mais ceuxci passaient très rarement la phase de l’exploitation. Les dirigeants ont alors initié la notion d’intrapreneuriat : laisser du temps libre aux collaborateurs qui ont des idées et les aider à les transformer en offres nouvelles (lire notre dossier p.22). Cette démarche a notamment permis le développement du post-it. Plus récemment, Google a réadapté le concept développé par 3M avec la notion de 70 / 20 / 10 : 70 % de votre temps sont consacrés à votre tâche, 20 % à l’amélioration de cette tâche, 10 % à vos projets personnels. Certaines innovations comme Google Maps, Gmail ou encore Adsens sont notamment issues de ces 10 %.