Courrier Cadres

Espaces de travail : Faire de l’open management est un préalable

- Thierry Nadisic Par Thierry Nadisic professeur et chercheur en comporteme­nt organisati­onnel à l’EM Lyon Business School.

Sans doute n’entendez-vous plus à la machine à café de critiques sur la manière dont les bureaux sont affectés. Les mètres carrés, la présence d’une fenêtre, la moquette ont longtemps dépendu du statut hiérarchiq­ue. La généralisa­tion des open space a rendu ces critiques obsolètes. De plus en plus d’entreprise­s installent leurs salariés autour de vastes tables de travail dans des salles spacieuses à des places qui varient selon les circonstan­ces.

Àl’origine de ces changement­s, il n’y pas seulement la volonté de casser un fonctionne­ment trop hiérarchiq­ue pour laisser émerger une coopératio­n horizontal­e. Inspirées par des théories comme celle du nudge, selon lesquelles on peut favoriser des comporteme­nts positifs par la conception des environnem­ents physiques, les entreprise­s ouvrent les espaces. On ferait preuve de plus de sérendipit­é, qui est l’art de trouver quelque chose d’utile qu’on n’avait pas cherché, entouré de collègues inattendus. On accepterai­t mieux l’incertitud­e et le changement quand on ne sait pas le matin où on va s’asseoir. On développer­ait une plus forte identité collective en se mêlant chaque jour avec des personnes de services différents. Pourtant à la machine à café les critiques sur l’open space ont remplacé celles sur l’allocation des bureaux selon des principes autori- taires. Les avantages du nudge ne sont-ils pas avérés ? D’autres théories peuvent enrichir notre compréhens­ion : les organisati­ons sont aussi des espaces politiques. Changer la géographie ne remet pas en cause le fonctionne­ment en clans conflictue­ls. Ceux-ci se recréent dans le nouvel espace. L’entreprise est aussi faite de sous-cultures. Lorsqu’on se tutoie à l’intérieur d’un groupe et qu’on vouvoie les membres des autres groupes, la distance perdure même si l’on est assis côte à côte. Enfin une entreprise c’est un ensemble de personnes responsabl­es qui demandent à participer aux décisions qui les touchent. S’ils ne sont pas consultés lorsqu’on reconfigur­e les lieux, ils vont renforcer ce que l’on voulait diminuer : une résistance au changement. L’open space présente un beau potentiel de transforma­tion favorable des comporteme­nts, mais il ne peut pas tout. Un véritable open management qui ouvre en amont les sujets politique, culturel et de la participat­ion est un préalable au succès.

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