Argent avec IntérêtsPrivés : De 30 à 60 ans, investir pour sa retraite
Pour ne pas se trouver dépourvu une fois la retraite venue, mieux vaut prendre les devants. Et les bons réflexes d’épargne s’adoptent le plus tôt possible afin d’anticiper la future baisse de revenus. À chaque âge sa solution de placements.
La retraite, ça se prépare y compris et surtout sur un plan financier. Or, à l’évocation de la retraite, le pessimisme règne quant à l’évaluation des revenus qui seront perçus. De ce fait, un Français sur deux épargne pour parer à une baisse de revenus. À disposition, plusieurs solutions se présentent en fonction des affinité : immobilier, assurance-vie, produits retraite. Et comme mieux vaut ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier, les placements réalisés en vue de la retraite sont
aussi à diversifier. Mais encore faut-il déterminer
le montant de revenus à combler. “À la retraite, les Français souhaitent percevoir au minimum 80 % des derniers revenus sachant que le taux de remplacement (la pension de retraite par rapport aux salaires) est de 50 % pour un cadre, 80 % pour un salarié au SMIC et qu’en plus le COR envisage une baisse de ce taux d’une dizaine de points dans les prochaines années”, constate Philippe Crevel, économiste et directeur du Cercle de l’épargne. Pour compléter ses revenus à la retraite, l’idéal
est nécessairement de s’y prendre tôt pour lisser l’effort d’épargne dans le temps. Toutefois, des placements s’adaptent selon l’âge de l’épargnant.
30-40 ans : devenir propriétaire
Si, entre 30 et 40 ans, le sujet de la retraite est déjà en tête, l’échéance reste encore lointaine et le niveau de la pension très incertain. À cette période, la première préoccupation est de financer sa résidence principale. Or, être propriétaire immobilier est justement la première pierre à l’édifice de préparation à la retraite. Toutefois, pour y parvenir, il ne faudra plus compter sur l’ouverture d’un PEL, plan d’épargne logement car à partir du 1er janvier 2018, les nouveaux plans perdent de l’intérêt. Non seulement les taux du prêt immobilier proposés sur le marché (hors PEL) sont très bas, mais aussi le placement voit sa prime disparaître et sa fiscalité devenir moins favorable. Pour certains ménages, si les prix du marché immobilier comme à Paris ou en Île-de-France ne permettent pas l’achat d’une résidence principale, l’investissement peut se porter sur un bien locatif neuf (avec réduction d’impôt Pinel) ou ancien.
Quadras : prendre des risques
L’achat immobilier n’est toutefois pas exclusif de la mise en place d’autres solutions. Dans la quarantaine, entre la maison et les enfants, le budget familial peut ne pas suffire pour consacrer une épargne spécifique à la retraite. Un contrat d’assurance-vie qui répond à plusieurs objectifs patrimoniaux, dont la préparation à la retraite, est alors à privilégier par rapport à un produit retraite comme le PERP qui bloque l’épargne jusqu’à la retraite. Elle permet de réaliser des retraits partiels ou de convertir le capital en rente viagère. Comme, à 30-40 ans, l’épargnant a encore du temps devant lui et peut prendre du risque pour doper la performance de son placement. “Il peut orienter son allocation d’actifs financiers, pour une part élevée (80 %), sur des fonds dynamiques orientés sur les actions, les produits structurés. En entrant régulièrement sur des produits différents, le risque est limité”, recommande Vincent Cudkowicz, directeur général de bienprevoir.fr. L’effet du temps doit permettre d’amortir tout soubresaut du marché boursier. Il est possible aussi de sécuriser les plus-values sur des fonds sécuritaires.
50 ans : solution pure retraite
Si rien n’a été mis en place en vue de sa retraite autour de 50 ans, il est temps d’agir. Locataire de la résidence principale, c’est le moment d’acheter
en utilisant, par exemple, son épargne salariale placée dans un PEE (plan d’épargne entreprise). C’est aussi à la cinquantaine qu’une part du budget doit être systématiquement mise de côté dans le but de compléter sa retraite. Parmi les critères de choix du placement, figure la fiscalité. “Il y a une préférence pour bénéficier d’un avantage fiscal à l’entrée - réduction d’impôt - dans le produit plutôt qu’à la sortie, moment où l’épargnant perçoit moins de revenus et se trouve
donc moins fiscalisé”, note Philippe Crevel. Un placement purement retraite tel que le PERP, plan d’épargne retraite populaire ou le contrat Madelin pour les indépendants est alors préconisé car tous deux procurent un important avantage fiscal. Les versements effectués sur un PERP sont déductibles du revenu dans la limite de 10 % des revenus professionnels de l’année précédente ou 3 862 euros a minima en 2016. Toutefois, la sortie de ces produits retraite se fait en rente viagère pour au moins 80 % du placement. Or les solutions qui aliènent le capital pour le convertir en rente sont moins plébiscitées par les Français qui privilégient le capital. Ce qui peut poser pro-
blème… “Ils sous-estiment leur espérance de vie à la retraite alors qu’elle tourne autour de 25 ans. La rente viagère est bien adaptée à des espérances de vie longues”, explique Philippe Crevel (elle est versée jusqu’au décès). Mais, financièrement, ces solutions 100 % retraite sont complexes et rapportent peu. “En cas de changement ou de transfert de contrats retraite, il faut regarder la date de son contrat et la table de mortalité applicable car les nouveaux contrats sont moins favorables, remarque Rémi Dupuy, courtier en assurances. Désormais, il faut compter un taux de conversion de son contrat autour de 3 % contre 6 % il y a 30 ans. Donc il faut capitaliser 200 000 euros pour obtenir un complément de 6 000 euros par an”.
Investir et défiscaliser
Les produits retraite ne sont pas les seuls à permettre une défiscalisation doublée d’un complément de revenus à la retraite. L’immobilier locatif répond aussi à cet objectif bénéficiant de la réduction d’impôt avec le dispositif Pinel ou d’une défiscalisation des revenus sous le dispositif de location meublée non professionnelle dans l’habitation classique ou en résidences services. Les loyers versés ou la vente du bien, une fois le crédit remboursé, viendront compléter la retraite. Reste à être sélectif car de trop nombreux investisseurs ont réalisé des opérations immobilières qui ont tourné au fiasco. Bien choisir son acquisition est primordial car la situation du marché immobilier d’ici 20 à 30 ans reste une inconnue. Par ailleurs, dans l’optique de la retraite, les versements sur un contrat d’assurance-vie sont à poursuivre mais l’exposition au risque est à modifier par rapport à l’âge de 30-40 ans. “Une part de risque peut être conservée autour de 50 % de l’allocation d’actifs tandis qu’un patrimoine financier plus sécurisé est aussi à constituer avec environ 35 % de fonds en euros dynamiques et 15 % en immobilier type SCPI et fonds patrimoniaux”, préconise Vincent Cudkowicz. Enfin, certains auront moins à épargner que d’autres grâce à leur entreprise. Des salariés bénéficient d’un dispositif retraite supplémentaire comme le contrat retraite article 83 sur lequel cotise leur entreprise (sortie en rente et, selon le projet de loi de finances pour 2018, 20 % en capital) ou le PERCO, plan d’épargne retraite collectif (sortie en rente ou en capital) sur lequel il est judicieux de placer la participation et l’intéressement surtout si l’employeur réalise des abondements. Des placements à ne pas oublier quand on quitte une entreprise !
60 ans : racheter des trimestres ?
À quelques années de la retraite, il n’y a pas de solution miracle pour compléter ses revenus. En cas de disposition d’un capital, celui-ci pourra être placé sur un contrat d’assurance-vie, un PERP ou des SCPI. Même si l’investissement immobilier sous le dispositif Pinel permet désormais de s’engager sur 6 ans, il est à envisager avec précaution, le remboursement éventuel d’un crédit sur une plus longue période limitant l’intérêt de bénéficier de revenus complémentaires. En revanche, c’est en toute fin de carrière que la question d’un rachat de trimestres de retraite se pose. Une fois le parcours professionnel certain et les règles de retraite applicables connues. Ce rachat permet d’améliorer les retraites de base et complémentaires et est déductible de l’impôt. Toutefois, il a un coût élevé. Des calculs sont à réaliser pour s’assurer de la rentabilité d’une telle opération. Face à cette palette de solutions, il ne reste plus qu’à faire son choix en fonction de son âge, de ses préférences et de ses facultés d’épargne.