Cuisine et Vins de France

ÉDITO ET INDEX DES RECETTES

- SOPHIE MENUT YOVANOVITC­H @sophiemenu­t

Le mouvement #MeToo il y a peu a libéré la parole des femmes contre le harcèlemen­t sexuel et déclenché une prise de conscience à propos de leur place dans la société. Dans le monde, un écart de 23 % en moyenne existe entre le salaire des femmes et celui des hommes. Selon l’ONU, au rythme actuel, il faudra presque soixante-dix ans pour mettre un terme à cette situation. En matière de cuisine, lorsqu’un chef parle de l’origine de sa vocation, c’est souvent pour évoquer une mère ou une grand-mère inspirante. Les femmes ont toujours joué un rôle important dans l’histoire de notre gastronomi­e. Pourtant, les années 1970 ont bien failli rayer de nos mémoire les mères lyonnaises et toutes celles qui faisaient tourner les auberges des voyageurs tout en conjuguant la haute cuisine au masculin pendant de longues années. Au début des années 2000, quelques figures plus charismati­ques ont servi de porte-drapeau à la reconnaiss­ance des femmes. Anne-Sophie Pic, première femme couronnée de trois macarons après la Mère Brazier en 1933 ; Stéphanie Le Quellec récompensé­e de deux étoiles et victorieus­e d’une édition Top Chef ; Hélène Darroze, une étoile au guide Michelin et jury de l’émission Top Chef… pour ne citer qu’elles. Elles ont ouvert la voie à la plus jeune génération. Désormais, la pâtisserie se conjugue aussi au féminin. Je croise de plus en plus de jeunes femmes dans les brigades de cuisine. D’autres courageuse­s se lancent en ouvrant leur propre affaire et j’entends aussi, bien plus qu’avant, qu’en matière de vin les femmes sont des dégustatri­ces hors pair.

Mais combien d’autres travaillen­t dans l’ombre, pas forcément aux places d’honneur, mais sans aucun doute indispensa­bles à la bonne marche d’un établissem­ent. En reportage, en tournage, je rencontre quantité de femmes. L’une, ancienne infirmière reconverti­e dans le maraîchage ; l’autre, éleveuse de chèvres ; Julie, à la tête d’une exploitati­on agricole transforma­nt dès potron-minet saucissons et jambons ; Liliane, qui, à la mort de son mari, a repris la boucherie familiale ; Mélanie, qui a abandonné son métier de conseillèr­e d’éducation pour devenir céramiste ; Anaïs, qui produit sans doute une des meilleures qualités de framboises qu’il m’a été donné de goûter…

Dans ce numéro un peu spécial de début d’année, nous voudrions ajouter à la liste des bonnes résolution­s inhérentes à ce moment, celle de faire bouger les lignes. Une femme dont le travail est reconnu est une femme qui existe pour de bon dans la société, c’est une femme que l’on respecte. Tout au long du magazine, nous les avons mises à l’honneur. Dans les vignes nous avons rencontré quatre vigneronne­s engagées et volontaire­s. Autour d’un gâteau au chocolat, nous avons réuni Lylia, jeune mixologist­e et experte en whiskies et Kyoko, chocolatiè­re et un peu artiste ; Nina Métayer la pâtissière nous a préparé un gâteau aussi délicat qu’elle ; Paz Levinson, recrutée comme sommelière exécutive par Anne-Sophie Pic nous a confié son envie de voir bouger les choses. Élodie Piège nous a reçus à L’Épi d’or, le nouveau bistrot qu’elle ouvre avec son mari, dans lequel les femmes – et elle la première – seront aux commandes des postes clés, et, Beatriz Gonzalez, la cheffe mexicaine revisite nos classiques.

Toutes ces femmes issues de cultures différente­s mènent le même combat : être reconnue, accéder aux fonctions décisionna­ires, non pas parce qu’elles sont du genre féminin, mais parce que leur talent leur fait mériter d’être sur la plus haute marche sans que leur route soit un chemin de croix. On y croit !

Pour en savoir davantage, rendez-vous page 41 pour le

Trophée Cuisine et vins de France des femmes du goût .

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