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LES LECTEURS, LA BIBLIOTHÈQ­UE ET LE DOCUMENTAR­ISTE

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Clément Abbey est un jeune documentar­iste belge. Pendant ses études parisienne­s, entre 2002 et 2008, il a fréquenté

très régulièrem­ent la Bpi. Il y revient aujourd’hui pour filmer

la bibliothèq­ue et ses lecteurs.

Quel souvenir gardez-vous de vos visites, à la Bpi ?

À l'époque déjà, la diversité sociale du lieu m'avait marqué. Je trouvais que c'était assez rare d'être confronté à l'altérité dans un lieu public et de partager un espace pour faire plus que simplement se déplacer, comme dans la rue ou le métro. J'appréciais cette diversité, les rencontres informelle­s à la cafétéria ou ailleurs. En classe prépa, je travaillai­s énormément, la Bpi était mon seul contact avec une vraie altérité sociale qui me sortait de mes études. Pourtant, tout le monde vous le dira, la bibliothèq­ue est quand même un endroit où chacun est dans sa bulle. On y vient tromper sa solitude sans rencontrer l'autre. Malgré tout, il y a ce sentiment de partager quelque chose ensemble. À Bruxelles où j'habite à présent, il n'y a pas de bibliothèq­ue comme celle-ci, c'est pourquoi je suis revenu ici faire ce film, c'est aussi un lieu qui me manquait.

Qu’avez-vous l’intention de filmer ?

Je m'intéresse à l'individu dans son rapport direct avec la bibliothèq­ue, ce qu'il vient y faire et consulter. Je cherche à établir une complicité pour que les gens me fassent entrer dans leur bulle, dans leur concentrat­ion. Je n'ai fait jusqu'à présent que des entretiens de repérage, je cherche encore mon film à travers tout ça. Ce qui m'intéresse, c'est aussi de voir dans quelle mesure on vient se connaître soi-même et comment on essaie de connaître le monde à travers ce qu'on vient faire dans la bibliothèq­ue. Il y a une espèce de paradoxe, on vient rencontrer le monde dans un endroit où on se coupe du monde, où le temps est suspendu, où tout est flottant, tout est chuchotant. C'est l'atmosphère de cette concentrat­ion-là qui m'intéresse. Voir comment chacun avec son histoire, ses centres d'intérêt vient s'insérer dans cette ambiance globale.

La Bpi a déjà fait l’objet d’un film en 1997 : Les Habitués

de Jean-michel Cretin. L'avez-vous vu ? Oui, et j'ai particuliè­rement aimé le chuchoteme­nt dans le film. Moi, j'adore filmer la parole, j'aime rentrer dans la confidence et le chuchoteme­nt vient renforcer ça. Jean-michel Cretin a beaucoup filmé la bibliothèq­ue avec une voix off tirée des entretiens qu'il a pu faire. Je ne pense pas utiliser autant que lui le son désynchron­isé. Moi, j'aime bien qu'on voie les gens et que le son synchrone vienne renforcer leur présence. Une des forces du film de Jean-michel Cretin, c'est de donner l'effet d'une communauté, même informelle, même invisible, c'est très riche.

Propos recueillis par

Les Habitués Marie-hélène Gatto,

de Jean-michel Cretin http://pro.bpi.fr

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