LE PUY-EN-VELAY
AU NOM DE MARIE
Classée par l’unesco en 1998 au titre des Chemins de SaintJacques, la cathédrale Notre-dame de l’annonciation a vu passer en plus de dix siècles des millions de pèlerins. Et l’aventure n’est pas finie.
La légende et l’histoire. Elles s’accordent assez bien, au Puy. L’une y relève les traces d’un très ancien culte druidique. L’autre parle d’une large dalle (celle d’un dolmen ?) où, au ve siècle, une matrone en proie aux fièvres vint s’étendre, sur le conseil de la Vierge. Guérison immédiate. L’évêque accourt, trouve sur place de la neige hors saison, un cerf dont les empreintes dessinent le plan d’un oratoire, et des piquets qui fleurissent sitôt plantés. C’est assez pour que l’église du puy Anis (le piton volcanique sur le flanc duquel est perchée la cité) soit consacrée à la Vierge. Vient le xe siècle : vers 950, l’évêque du Puy, Godescalc, est le premier à se rendre à Compostelle qui n’accueille pas encore de pèlerinage mais où l’on situe déjà le tombeau de saint Jacques. Il en revient avec un très précieux opuscule qu’il a commandé en chemin : la copie d’un traité rédigé au viie siècle par Ildefonse de Tolède sur la virginité de Marie. Tous les éléments du formidable développement du Puy, au xiie siècle surtout, sont en place. NotreDame sera la tête de pont officielle des chemins de Saint-jacques de Compostelle, et le pèlerinage marial attirera au fil des siècles des millions de fidèles. Dont bon nombre de rois et de papes. Saint Louis y vint en 1254 et offrit au sanctuaire sa célèbre Vierge noire, dont les origines restent un mystère.
L’AFFLUX DES PÈLERINS AURA DES CONSÉQUENCES MANIFESTES SUR L’ARCHITECTURE DE LA CATHÉDRALE : IL FAUDRA VOIR TOUJOURS PLUS GRAND, DÉBORDER DU ROCHER SUR LEQUEL REPOSE LE CHOEUR, REMBLAYER LA PENTE POUR AJOUTER DEUX TRAVÉES DE NEF…
Ce qui est certain, c’est que cette statuette de 72 centimètres de haut fut brûlée en juin 1794 par les révolutionnaires adorateurs de l’être suprême. Depuis, c’est une copie qui mène la procession du 15 août et trône en majesté sur le maître-autel, enveloppée de ses manteaux triangulaires. L’afflux de pèlerins aura des conséquences manifestes sur l’architecture de la cathédrale : il faudra voir toujours plus grand, déborder du rocher sur lequel repose le choeur, remblayer la pente pour ajouter deux travées de nef, puis bâtir hardiment les quatre suivantes au-dessus du vide, sur d’énormes pilastres.
ENTRER PAR LE NOMBRIL, RESSORTIR PAR LES OREILLES
Une telle disposition ne facilite pas l’accès, mais la solution adoptée a le mérite d’offrir une interprétation spirituelle sur mesure : le grand degré de quelque 134 marches – 17 mètres de dénivelé ! – dont la dernière partie s’engouffre sous la nef pour déboucher en son centre*, est présenté dans les sermons médiévaux comme le moyen de « rentrer dans le sein de sa mère (Marie) et renaître », pour paraphraser saint Jean. D’où la plaisanterie : « on entre dans la cathédrale par le nombril, on en ressort par les oreilles ! » Quant à l’esthétique peu banale de la cathédrale, coupoles à la byzantine, façade et cloître mosaïqués de lave noire et de pierre blanche selon la mode mozarabe, elle est due en partie aux croisades – l’évêque du Puy, Adhémar de Monteil ayant eu l’insigne honneur, en 1095, de participer comme légat du Pape à la toute première – et en partie à « l’effet Compostelle ». †
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