STRASBOURG
NOTRE- DAME, LA GÉANTE ROUGE
Grimper au sommet de la tour… le jeune Goethe, arrivant à Strasbourg en 1770, n’a rien de plus pressé. Même le vertige dont il souffre ne peut l’empêcher de hanter l’étroite terrasse où, écrit-il dans ses Mémoires, « j’étais […] suspendu en l’air
comme une montgolfière ». Et selon l’usage, le poète glisse la pièce au gardien, ancien tailleur de pierre, pour qu’il grave son nom sur le mur intérieur de la flèche, non loin du cantique censé éloigner la foudre.
« C’est une chose admirable de circuler dans cette monstrueuse masse de pierre toute
pénétrée d’air et de lumière, évidée comme un joujou de Dieppe, lanterne aussi bien que pyramide, qui vibre et qui palpite à tous les souffles du vent », s’extasie Hugo, qui a affronté lui aussi, vers 1840, les 330 marches. Il aurait
Résolument flamboyante, reconnaissable entre toutes
par sa pierre rouge et sa flèche aussi effilée qu’unique, le véritable triomphe de la cathédrale, selon Victor Hugo, elle attire chaque année quelque quatre millions de visiteurs. Il est vrai qu’on l’aperçoit de loin : depuis les Vosges ou la Forêt-noire, paraît-il. pu ajouter qu’avec ses 142 mètres, elle était la plus haute construction d’occident (elle ne fut détrônée qu’en 1874, par la néogothique Saint-nicolas de Hambourg). Et que ses huit escaliers accolés, qui grimpent en vrille sans jamais se croiser, sont un prodige de sophistication géométrique… Ce n’est pas la flèche seule, mais la façade tout entière qui subjugue Goethe. « Les petites choses comme les grandes sont à leur place, et l’immensité nous apparaît sous la forme la plus agréable, comme l’ensemble nous offre l’image de la stabilité et de la durée… », souligne-t-il
dans L’architecture allemande, un essai dithyrambique et indûment nationaliste. Dans son enthousiasme, Goethe y attribue au seul Erwin
QUAND GOETHE RÉÉCRIT L’HISTOIRE DE NOTRE-DAME