Detours en France

NANCY HUSTON

« LE BERRY, C’EST MES RACINES INVENTÉES »

- PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE BOURGET

La relation de l’écrivaine d’origine anglo-canadienne avec la région se décline en… histoires d’amour. Amour pour deux hommes, qui avaient des attaches dans le Cher, amour des paysages du Boischaut, amour des Berrichons, devenus des amis… L’exilée a trouvé dans ce coin de France « reculé » la conviviali­té et la complicité humaine qui lui font défaut à Paris.

Née à Calgary, étudiante à New York et à Paris… Ce n’est pas le profil habituel de quelqu’un qui s’entiche de la campagne ?

Vous oubliez les deux ans de lycée que j’ai passé en Nouvelle-angleterre, aux États-unis ! Dans le New Hampshire, j’ai découvert la forêt et la vie au grand air.

Racontez-nous votre rencontre avec le Berry… Je me suis retrouvée là-bas grâce à des histoires d’amour. À 20 ans, dès ma première année à Paris, je suis tombée amoureuse d’un Berrichon. Il m’a emmenée chez lui à Bourges et à Rezay. J’y ai découvert les églises romanes, la rivière l’arnon, les paysans, j’ai entendu l’accent et le patois berrichons. Pour moi, le Berry n’était pas un territoire inconnu. Lorsque j’étudiais la littératur­e à New York, j’avais mené un projet sur George Sand et beaucoup lu sur elle et sur Nohant.

Une première immersion dans la région… Que s’est-il passé ensuite ?

Des années plus tard, j’ai rencontré à Paris Tzvetan Todorov (philosophe et sémiologue français d’origine bulgare, ndlr), qui est devenu mon mari et le père de mes deux enfants. J’apprends qu’il a une maison dans le Berry, à 10 kilomètres de Rezay ! Nous y avons passé de longs moments et même une année entière, en 1991-1992.

Qu’aimez-vous en particulie­r dans le Boischaut sud, ce territoire du Cher ?

J’aime les paysages et les gens. Le Boischaut est une région modeste et profonde. Elle a été soignée et entretenue pendant des génération­s. Je suis bouleversé­e par la beauté du bocage. Tenez, un matin, il n’y a pas longtemps, j’ai pris ma voiture, aux alentours de Touchay, le bocage s’étendait sous mes yeux, sublime avec la lumière rasante et la brume matinale. C’était un vrai tableau, j’étais émue à en pleurer.

Vous, la déracinée, diriez-vous que vous êtes française, berrichonn­e, parisienne ?

Avec Tzvetan, le Berry et les Berrichons sont devenus notre famille. Là-bas, nous avons construit des liens durables avec des personnes, instituteu­rs, retraités, chevriers, néoruraux… Cela ne

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