ISABELLE AUTISSIER : « LA ROCHELLE, MON PORT D’ATTACHE »
Elle fut, à 35 ans, la première femme à boucler un tour du monde lors d’une course en solitaire. Mais Isabelle Autissier n’est pas du genre à sillonner les mers et à s’en contenter. Parisienne d’origine et Rochelaise d’adoption, la navigatrice s’est aussi illustrée dans l’écriture (il faut lire son formidable Seule la mer s’en souviendra, paru chez Grasset) et s’est engagée au service de la cause environnementale, en devenant présidente du Wwf-france. Entre deux réunions et une course en mer, rencontre avec une hyperactive passionnante. « La première fois que je suis venue ici, j’étais ingénieur halieutique à l’institut des pêches. je me suis dit que je n’y habiterai jamais! Je trouvais que ça manquait d’arbres. Et ces environs tout plats! Finalement, j’ai trouvé ça joli et sympa… Quelques années plus tard, j’ai fabriqué mon premier bateau à la Ville-en-bois. C’était un quartier de maisons basses en bois et d’ateliers de réparation de bateaux, à l’ouest du Grand Bassin. Pêcheurs et coureurs au large s’y côtoyaient. La Rochelle est alors devenue mon adresse officielle, mon port d’attache. » Aujourd’hui, Isabelle Autissier n’y passe, de son propre aveu, qu’en coup de vent. Même si elle pense toujours que « c’est une belle ville », et qu’elle ne s’en « lasse pas ». « D’abord, on y trouve beaucoup d’industries nautiques, des accastilleurs, des architectes navals, des gens de grande qualité. Ce qui est très agréable aussi, c’est qu’on fait tout à pied ou à vélo. » Cerise sur le gâteau pour notre fervente militante écologique, la ville a pris récemment un important virage écologique, en affichant un projet ambitieux : devenir la première agglomération française « zéro carbone », à l’horizon 2040. « Cela va dans le bon sens, celui de l’adaptation au changement climatique… Au passage, vous saviez que c’est à La Rochelle qu’est né le vélo en libre-service? Nos Vélos jaunes datent de 1976; c’était bien avant les Vélib’ de Paris ! »
En grande navigatrice, Isabelle Autissier goûte aussi au cosmopolitisme de sa ville. « Les marins n’ont pas de frontières. Grâce au port, on voit des bateaux de toutes les nationalités. La Rochelle a toujours été un lieu d’échanges, y compris aujourd’hui avec les touristes et les étudiants étrangers. » Elle regrette pourtant que les navires de pêche et de commerce aient été relégués en périphérie. « Il ne reste en ville que les voiliers. Il n’y a plus cette mixité de pêcheurs, de voileux, de marins… » Tandis que nous devisons tranquillement, les mâts des bateaux de la Mini-transat s’agitent sous nos yeux. « Bon, la course en mer n’est pas le comble de l’écologie, mais j’aime cette compétition, car on y voit les grands navigateurs de demain ! » Son voilier polaire, Ada-2, actuellement amarré à Tromsø (Norvège), a écumé les mers australes et arctiques. Il doit gagner le Vieux-port, cette année. Isabelle Autissier trouve-t-elle encore du temps pour fendre les flots, avec tous ses engagements professionnels et associatifs ? « Je navigue deux mois et demi par an, quoi qu’il arrive. Et pendant cette période, prévient-elle, je ne suis là pour personne ! »