LE SEUIL DE NAUROUZE
On nous avait tant parlé de ce seuil de Naurouze, que nous en faisions grand cas. C’est ici, à 190,61 mètres d’altitude (la borne de « nivellement général » placée sur le déversoir du canal faisant foi), que se situe la ligne de partage des eaux entre Atlantique et Méditerranée. À l’ouest, le flux du canal du Midi (et celui de tous les ruisseaux et rivières) s’écoule vers l’océan; à l’est, vers la mer. Ce point haut naturel, à la frontière de l’aude et de la Haute-garonne, a été identifié par Pierre-paul Riquet dès l’origine du projet. C’est là qu’il avait choisi de dériver et d’acheminer les eaux de la montagne Noire, pour alimenter le canal en toutes saisons. La clé indispensable de la réussite de l’ouvrage… De nos jours, l’arrivée sur le site laisse songeur. L’aménagement est sommaire, les panneaux d’information sont datés et le grand bassin octogonal de rétention, presque entièrement comblé, fait grise mine. Pourtant, quel génie hydraulique cachent ces installations! Captée sur les lointains ruisseaux de l’alzau (à 65242mètres, dit un panneau) et du Lampy, dérivée sur des rigoles artificielles vers la plaine de Revel puis conduite jusqu’à Naurouze par la rigole principale du Midi, l’eau, qui tourbillonne toujours près d’une minoterie abandonnée, révèle l’ingéniosité de l’ensemble, en ce xviie siècle si peu « techno ». « Autrefois, les bateaux traversaient le bassin. C’est Vauban qui, plus tard, a préconisé une dérivation », éclaire Samuel Vannier, en charge des Archives et des Projets culturels du canal du Midi aux Voies navigables de France, à Toulouse. À côté de cette « station d’échange », ou l’on peut emprunter une longue allée bordée d’arbres pour atteindre l’écluse de l’océan, se dresse un obélisque, érigé en 1827 en l’honneur de Pierre-paul Riquet. Hélas, la porte d’accès au pied de l’oeuvre est fermée… Vivement que les VNF et leurs partenaires revitalisent ce site (un plan de valorisation serait acté), sans lequel il est impossible de comprendre le fonctionnement général du canal.
EMBORREL, LE POINT HAUT DU CANAL
En dépit d’un bon café, il est toujours un peu difficile de reprendre le vélo après avoir déjeuné… Nous nous y astreignons, sachant que « l’écurie » est proche. Cap sur Renneville et son écluse, à 4 kilomètres. Nous pédalons en rêvassant, regard perdu dans l’eau du canal, tour à tour verdâtre ou marronnasse. Une péniche nous réveille: c’est le Bel’import, splendide modèle Freycinet à coque rouge remontant vers Toulouse. Quelques instants plus tard, le canal se rétrécit brièvement, signalant un passage en pont audessus d’un cours d’eau: voici l’hers, rivière venue du lointain Razès. Parallèle au canal sur une grande partie de son cours, elle le franchit ici, pour aller se jeter dans la Garonne, au nord de Toulouse. Une franche odeur de laurier-rose nous avertit de l’arrivée à l’écluse double d’encassan, composée de 2 bassins et de 3 portes. À peine le temps de distinguer, à gauche, le clocher droit de l’église (xive siècle) d’avignonet-lauragais, que surgit la dernière écluse avant l’arrivée : Emborrel, posée à 189 mètres d’altitude. Cette jauge n’a l’air de rien… C’est pourtant l’un des points les plus hauts du canal du Midi ! Seul le seuil de Naurouze, ligne de partage des eaux entre Atlantique et Méditerranée, ouvrage-clé du canal situé 4 kilomètres à l’est, est (à peine)
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Parlée dans les cafés et sur les marchés de villages, enseignée dans les calendretas (écoles et collèges franco-occitans), la langue occitane s’est construite, au tournant de l’an mil, sur des racines latines – à la différence de la langue d’oil, influencée au nord par le francique. Du xie au xiiie siècles, elle se révèle grâce aux troubadours, qui répandent en Europe poèmes et chants occitans. Aux siècles suivants, le pouvoir royal puis la République imposeront progressivement l’usage du français. Il faut attendre le milieu du xixe siècle et la redécouverte du lyrisme des troubadours pour que l’occitan se réveille, stimulé par des intellectuels et des écrivains. De nos jours, certaines régions (Languedoc-roussillon, Midi-pyrénées, Provence-alpescôte d’azur, Aquitaine) soutiennent une politique en faveur de la langue et de la culture d’oc: enseignement, publications, émissions de radio et télé…
LA LANGUE D’OC
LE CATHARISME
Les Cathares font leur apparition dans le Midi de la France, entre les et siècles. Imprégnées d’une culture d’ouverture et d’équité, la bourgeoisie et la noblesse occitanes s’opposent au clergé et à ses excès.
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Elles souhaitent revenir à l’église des apôtres et vivre leur foi comme les premiers chrétiens. L’expansion
du mouvement et la menace qu’il fait peser sont telles, que l’église catholique et le royaume décident alors de mener une guerre pour l’éradiquer. La première croisade contre les Albigeois – c’est près d’albi, à Lombers, que s’est tenu, en 1165, un concile d’obédience cathare – a lieu de 1209 à 1218. Elle se traduit par la chute de Béziers et de Carcassonne, et voit l’émergence d’un seigneur croisé, Simon de Montfort. En 1226, la seconde croisade déferle dans le Midi et aboutit, en 1229, à la chute de Toulouse. Dès lors, le royaume de France s’empare de l’ensemble du territoire
du Languedoc.