Dimanche Ouest France (Finistere)
DSugar, une série policière réussie
Pour l’inénarrable Colin Farrell. John Sugar, détective privé américain, enquête sur la mystérieuse disparition d’Olivia Siegel. Une série de haut vol portée par un Colin Farrell au sommet.
Réalisée par le réalisateur brésilien Fernando Meirelles, cinéaste à qui l’on doit le violent La Cité de Dieu et The Constant Gardener, Sugar suit les aventures d’un détective engagé par un producteur hollywoodien pour retrouver sa petite fille. En chemin, il va croiser des réalisateurs corrompus, des icônes flétries et toute la faune interlope de Los Angeles, en Californie.
Sugar s’envisage dès le début comme un puzzle énigmatique – on ne connait pas le passé de ce privé et on ne sait pas quel mal le ronge (sa main tremble). Mais, avec lui, on va découvrir les dessous de l’usine à rêves.
Le mystère va pourtant en s’épaississant. On navigue en eaux connues : les huit épisodes s’amusent à hommager les grands classiques du film noir (du Privé de Altman au Grand sommeil de Hawks) et Colin Farrell, très classe et sur de lui, est à l’aise dans les chaussures élimées de dur à cuire qui n’aime pas trop la violence mais la manie avec beaucoup de savoir-faire.
Suavité et mélancolie
Ce programme rutilant (avouons-le, c’est parfois un peu chichiteux) se regarde pour deux raisons essentielles. John Sugar est un dingue de cinéma et, comme dans la série Dream on, cette obsession contamine le récit. Régulièrement, des extraits de films noirs qui jaillissent dans la tête du héros viennent s’insérer dans l’histoire, et c’est toujours agréable de revoir un jeune Kirk Douglas ou un Bogart fatigué.
Mais surtout, il y a Colin Farrell. Affuté comme jamais. L’ancien voyou dublinois est passé par tous les états – jeune premier prometteur, épave bouffie par l’alcool et acteur surdimensionné. Il a su remonter la pente pour arriver à ce rôle taillé pour lui. Ce personnage privé philosophe, cool à l’extérieur mais fracassé à l’intérieur, lui permet de ressusciter totalement. L’étude de caractère se tient, les ressacs de souvenirs secouent, les pulsions de mort qui l’habitent tiennent en haleine et sa classe, comme ses remords, lui permettent de faire avancer la série entre suavité et mélancolie, entre renoncement et espoir. Huit épisodes. Sur Apple TV+.