Dimanche Ouest France (Vendee)

Ils contrôlent les chasseurs, aussi pour rassurer

Pas facile de réconcilie­r pro et anti chasse. Une opération de contrôles « sécurité à la chasse » se déroule depuis deux semaines au niveau national. Reportage, hier, dans le Vignoble nantais.

- Stéphanie LAMBERT.

Les uns sont méfiants. Les autres, aussi. Comment alors faire communique­r deux mondes qui se parlent peu, chasseurs et non chasseurs, de manière apaisée ? Est- il possible de faire comprendre la nécessité, pour les uns, passionnés, de réguler le gros gibier ( sangliers, cerfs, chevreuils), et pour les autres, habitants ou promeneurs, de se sentir en sécurité ? En clair, comment rassurer, des deux côtés ?

Car des accidents, il y en a malheureus­ement chaque année. « La quasi- totalité, en raison du non- respect des mesures de sécurité de la part des chasseurs », enfonce Patrice Friconneau. Alors, s’assurer que les consignes sont respectées, c’est l’une des missions du chef de l’unité sud du service départemen­tal en Loire-Atlantique de l’Office français de la biodiversi­té (l’OFB 44 compte trois personnes). Ce samedi, lui et sa coéquipièr­e Marjolaine Moreau sillonnent la campagne du Vignoble nantais. Ils savent où il y a des battues.

Déjà trois incidents et un blessé grave

Très vite, à l’entrée du Bignon, ils repèrent un chasseur posté en bord de route. En ligne de mire, des habitation­s et des vaches. « C’est aberrant », lâche, agacé, le policier de l’environnem­ent. Après lui avoir demandé de désarmer son fusil et contrôlé les papiers, les agents lui expliquent que sa position est dangereuse.

La battue s’arrêtera sur le champ pour l’homme de 82 ans, qui obtempère sans résistance et remballe son matériel. « On a peut- être évité un accident » tente de rassurer Patrice Friconneau, lui- même chasseur.

Depuis deux semaines, les policiers participen­t à une démarche nationale de contrôle, comme il en existe régulièrem­ent. Celle- ci vise en particulie­r à vérifier le port du gilet orange fluo et l’angle de tir par rap

port aux zones à risques humain ou matériel.

Cette opération est menée conjointem­ent avec la Fédération des chasseurs. À l’issue, un bilan sera remis afin d’apporter des modificati­ons de règlement.

La Loire- Atlantique compte 12 000 chasseurs. Une infraction coûte 135 €. Une cinquantai­ne d’amendes environ sont dressées chaque année dans le départemen­t. Pour la saison 2023-2024, déjà trois incidents (balle dans une cuisine, projectile sur un chien) et une blessure grave sur un chasseur sont recensés. « C’est trop », déplore Patrice Friconneau qui ne veut pas revivre l’année 2017 où deux chasseurs avaient trouvé la mort. Pour autant, le nombre d’accidents est en baisse de

62 % depuis vingt ans en France (vingt- neuf morts en 2003, six cette année).

« J’ai peur, ils sont si proches »

Cette démarche de responsabi­lisation convainc- t- elle les riverains ? « Je n’ai aucun problème avec eux », indique un trentenair­e qui promène son chien et discute avec son ami Loïc, en gilet orange. Originaire de ChâteauThé­baud, le village voisin, il explique : « J’ai toujours vu des chasseurs à la campagne, ça ne me dérange pas. Tout est bien signalé. »

Un joggeur, croisé un peu plus loin, n’a pas la même tolérance. « Je ne m’interdis pas de courir mais j’ai peur, ils sont si proches des habitation­s et des chemins de promena

de. Nous aussi on a nos loisirs le week- end ! »

« Souvent, ils passent sur des chemins privés. On leur explique, ils ne veulent pas comprendre et nous insultent. Ils voient un chasseur et pensent qu’on est des tueurs », regrette Loïc, intransige­ant sur la sécurité, chasseur depuis plus de trente ans. Pour lui, la réconcilia­tion n’est pas possible.

Il y a parfois des postures, souvent une méconnaiss­ance de part et d’autre, analyse Patrice Friconneau. Même si les choses ne sont pas si tranchées, « les villages grossissen­t et certains néoruraux peuvent ne pas avoir la culture campagnard­e. Il faut continuer de dialoguer ».

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| PHOTO : OUEST-FRANCE Les policiers de l’environnem­ent et salariés de la Fédération des chasseurs sillonnent les campagnes du départemen­t de Loire-Atlantique depuis deux semaines.
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| PHOTO : OUEST-FRANCE Patrice Friconneau et Marjolaine­Moreau, du service départemen­tal en Loire-Atlantique de l’Office français de la biodiversi­té ; Nicolas Delattre et Mélanie Gireaud de la Fédération des chasseurs 44.
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| PHOTO : OUEST-FRANCE Les policiers de l’environnem­ent s’assurent que les chasseurs respectent les règles pour la sécurité.

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