Dimanche Ouest France (Vendee)

Après la réforme de l’isolement et de la contention, en 2022, « on a dû s’adapter »

- S. M.

« On a la plus grosse activité de la cour d’appel en matière d’isolement et de contention », pose Hélène Bauza, juge des libertés et de la détention à La Roche- sur-Yon (Vendée). En 2023, la magistrate s’est penchée sur 686 dossiers.

« Quand on parle d’isolement et de contention, il faut être clair. C’est être enfermé dans une chambre adaptée pour le premier. Et attaché à son lit pour le second », rappelle la magistrate. Ces mesures drastiques, prises en dernier recours sur demande du psychiatre, sont ensuite contrôlées par le juge des libertés et de la détention.

L'état du patient contrôlé toutes les six à douze heures

La difficulté de l’exercice ? Les délais. Pour les médecins comme la justice. « Quand on prend une telle mesure, il faut contrôler l’état du patient très régulièrem­ent. Toutes les douze heures pour l’isolement et toutes les six heures pour la contention », rappelle Corinne Jacq, directrice adjointe de l’établissem­ent public de santé mentale de la Vendée.

Du côté des magistrats, ils sont automatiqu­ement saisis au bout de trois jours pour l’isolement et deux jours pour la contention, afin de contrôler la mesure. Et ils ont seulement vingt- quatre heures pour rendre leur décision. « Tous les tribunaux n’ont pas été capables de mettre en place la réforme dès 2022. Cela occasionne un vrai surcroît d’activité », observe Hélène Bauza.

À La Roche- sur-Yon, un fonctionne­ment a rapidement été trouvé entre l’hôpital psychiatri­que et les tribunaux. « On a dû s’adapter », poursuit la juge. Ainsi, même le week- end, un magistrat de permanence prend des décisions de maintien ou non de ces mesures sur dossier.

« On est presque sur de la justice administra­tive »

Quant à l’hôpital, il a créé un poste administra­tif supplément­aire pour être présent le samedi. Et les cadres de permanence tournent le dimanche. Autre particular­ité de ces dossiers, les avocats ne voient jamais les patients.

Leur état de santé ne leur permet pas forcément de s’entretenir avec son avocat comme avec le juge. « On a tout de même réussi à mettre en place des appels avec lemagistra­t à 87 reprises », se félicite la directrice adjointe de Georges- Mazurelle.

Pour Eva Hayoun, avocate, la possibilit­é de s’entretenir avec son patient ne change pas le fond du dossier. « On est presque sur de la justice administra­tive. On vérifie surtout que les délais sont respectés et les documents envoyés. » Lors de l’audience de février, elle a par exemple demandé une mainlevée de la mesure car la magistrate avait été saisie cinquante et une minutes après le délai légal.

Faute de médecins, des délais difficiles à tenir

Une réforme lourde de conséquenc­e pour la justice comme l’hôpital psychiatri­que. « Comme tous les établissem­ents publics de santé mentale, nous faisons face à une pénurie de médecins. Il manque 23 % de psychiatre­s. Les délais ne sont pas toujours simples à tenir », reconnaît Corinne Jacq.

La présidente du tribunal judiciaire de La Roche- sur-Yon a, de son côté, demandé le recrutemen­t d’un

second juge des libertés et de la détention dans le cadre du nouveau

plan d’action de la justice, notamment pour répondre au surcroît d’activité amené par cette réforme.

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En 2022, l’hôpital psychiatri­que a créé un poste supplément­aire pour répondre à la réforme de l’isolement et de la contention.
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| PHOTO : JÉRÔME FOUQUET/OUEST-FRANCE.

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