Éditorial
Pour l’avenir de l’équilibre international dans son ensemble, et celui du continent européen en particulier, l’évolution de la Russie et de ses rapports avec le reste du monde continue de jouer un rôle déterminant. La guerre en Syrie et le conflit en Ukraine ont considérablement modifié les relations entre l’OTAN et la Fédération de Russie. Celles-ci semblent être revenues à un niveau proche de celui de la guerre froide, en trouvant en Méditerranée et en Europe le terrain naturel de cette nouvelle confrontation. L’intégration discrète du Monténégro dans l’OTAN, malgré la vive opposition de Moscou et la menace de représailles, rend désormais l’organisation de l’Atlantique Nord maître de tout le littoral nord de la Méditerranée, de Gibraltar à la frontière turco-syrienne. Une situation qui tend un peu plus les relations avec la Russie, qui désormais entend peser militairement sur ce même espace maritime via sa base navale de Tartous en Syrie, capable de faire mouiller en même temps des navires de premier (croiseurs ou destroyers) et de deuxième rang (frégates ou embarcations de débarquement).
Au-delà des tensions entre Russes et Américains dans les Balkans, l’hypothèse d’une guerre hybride ourdie par Moscou dans les pays baltes, où réside une forte minorité russophone, constitue une source de préoccupation majeure pour la sécurité du continent européen.
L’UE possède environ 2500 km de frontières communes avec la Russie, frontières que l’on dit convenablement sécurisées. Cependant, se trouvent aux frontières de l’Union deux territoires surarmés où la présence militaire russe inquiète de plus en plus : l’enclave de Kaliningrad et la Transnistrie. Depuis peu, la base de Kaliningrad (frontalière de la Pologne et de la Lituanie) est équipée de missiles nucléaires Iskander, constituant de fait une menace concrète pour la région.
S’il n’existe pas, a priori, de risque élevé de confrontation militaire directe entre l’Europe et la Russie, il n’en demeure pas moins vrai que le bras de fer se trouve durablement engagé. La relance du projet de défense européenne destiné à encourager la recherche militaire entre les pays membres de l’UE, puis, à terme, le développement et l’acquisition d’armements européens, témoigne d’une prise de conscience salutaire, au moment même où les déclarations du nouveau président américain font désormais douter sur la capacité de l’OTAN à réellement assurer la sécurité de ses États membres.