Diplomatie

– PORTFOLIO Les réfugiés syriens, instrument politique d’Erdogan

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Pour les quelque 3,6 millions de réfugiés syriens en Turquie, qui avaient jusque-là bénéficié d’un accueil assez favorable dans le pays, avec par exemple un accès à la santé et à l’éducation, la situation s’est durcie ces derniers mois, notamment en raison de la crise qui touche l’économie turque et des difficulté­s politiques du Président et de son parti, l’AKP. Alors que la Turquie est le pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés syriens (3,6 millions sur 5,6 millions au total, selon l’UNHCR), leur nombre et le prolongeme­nt d’une situation incertaine en Syrie ont rendu illusoire un retour massif de ceux-ci dans leur pays et nourri les mécontente­ments et les discours hostiles dans la société turque, non sans conséquenc­es politiques et électorale­s pour le président turc. Depuis l’été déjà, de nombreuses autorités locales turques poussent les Syriens au départ (photo).

Ainsi, c’est en partie par la volonté d’y reloger plusieurs centaines de milliers de réfugiés que Recep Tayyip Erdogan justifie son offensive lancée le 9 octobre 2019 dans le Nord-Est de la Syrie, afin de prendre et sécuriser cette région contrôlée depuis 2015 par les Kurdes de Syrie. Cette idée de créer une zone tampon le long de la frontière turque était d’ailleurs discutée depuis le début de l’année avec le président américain Donald Trump. Toutefois, il n’est pas certain que les Syriens de Turquie acceptent de s’installer dans une région dont ils ne sont pas originaire­s, et alors que l’offensive turque a favorisé le retour dans cette zone des forces du régime de Damas que les Kurdes, abandonnés par Washington, ont été contraints d’appeler en renfort.

Depuis 2015-2016, le président turc a par ailleurs fait des réfugiés syriens un objet de marchandag­e dans ses difficiles relations avec l’Union européenne (UE). Face au tollé déclenché par son offensive, il menace de nouveau de laisser les réfugiés quitter le pays pour gagner l’Europe, rompant l’accord passé avec l’UE en 2016, par lequel Ankara s’était engagé à stopper la traversée des migrants contre une aide de 6 milliards d’euros.

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Le 24 juillet 2019, des réfugiés syriens attendent au passage de Bab al-Hawa, entre la Turquie et la province d’Idlib, dans le Nord de la Syrie. En juin et juillet, près de 9000 personnes ont ainsi été soudaineme­nt renvoyées dans leur pays, sous divers motifs administra­tifs, tandis que les départs volontaire­s sont également encouragés. (© Aaref Watad/AFP)
Photo ci-dessus : Le 24 juillet 2019, des réfugiés syriens attendent au passage de Bab al-Hawa, entre la Turquie et la province d’Idlib, dans le Nord de la Syrie. En juin et juillet, près de 9000 personnes ont ainsi été soudaineme­nt renvoyées dans leur pays, sous divers motifs administra­tifs, tandis que les départs volontaire­s sont également encouragés. (© Aaref Watad/AFP)

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