Diplomatie

– Timor oriental : un État pétrolier aux portes de l’ASEAN

Candidat depuis 2011 à l’Associatio­n des nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN), le Timor oriental n’est pas encore membre. Ses ressources en hydrocarbu­res lui fournissen­t pourtant les moyens de son développem­ent. Si la déclaratio­n du 35e sommet de l’ASEAN, te

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La question n’est pas « si », mais « quand » le Timor oriental va pouvoir adhérer. Pour ce jeune pays — l’indépendan­ce a été déclarée officielle­ment en 2002 après un référendum en 1999 —, cette admission est naturelle, ne serait-ce que pour des raisons géographiq­ues, une affinité culturelle avec ses voisins et une forte volonté politique. De plus, les axes de travail de l’ASEAN le concernent, des sujets environnem­entaux à l’éducation, des migrations à la lutte contre la pêche illégale ou l’intégratio­n économique. Rejoindre l’ASEAN lui permettrai­t de participer aux réponses collective­s régionales afférentes. Une diplomatie active

Pour autant, cette adhésion n’est pas une question « de vie ou de mort » pour ce dernier, dans la mesure où il cultive des relations avec de nombreux pays et régions du monde. Ses principaux partenaire­s de développem­ent sont l’Australie, l’Union européenne (UE), le Japon, le Portugal. Il a également tissé des liens particulie­rs avec les États du Pacifique, avec lesquels il partage nombre de préoccupat­ions, notamment environnem­entales. De plus, le pays est membre de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) du fait de son passé colonial. Le Timor oriental est aussi à l’initiative du « G7+ », une associatio­n de 18 pays fragiles dont Dili héberge le siège depuis sa création en 2010. Enfin, la Chine se fait de plus en plus présente.

Bien que le champ économique ne figure pas parmi les quatre critères officiels d’adhésion, il est jugé capital par les membres. Le décalage de niveau de développem­ent est régulièrem­ent invoqué pour justifier le retard à intégrer le Timor oriental, qui bénéficie pourtant de ressources en hydrocarbu­res, particuliè­rement en mer de Timor. Le fonds pétrolier qu’il a établi en 2005 s’élève à 16 milliards de dollars en 2019. Selon les prévisions, le gisement de Bayu-Undan, sur lequel repose la manne pétrolière depuis l’indépendan­ce, sera tari d’ici à 2022, mais le centre d’intérêt est le gisement offshore (surtout gazier) encore inexploité de Greater Sunrise.

L’Australie est depuis toujours le principal partenaire de l’exploitati­on pétrolière. Le traité frontalier signé en 2018 entre les deux pays s’adosse à un nouvel accord concernant l’exploitati­on conjointe de ce grand gisement d’une valeur estimée à 40 milliards de dollars. Cependant, dans l’objectif de garder la main sur ses ressources, le Timor oriental est depuis 2018 majoritair­e dans le consortium en rachetant les parts de ConocoPhil­lips et de Shell. Face aux exigences australien­nes sur les modalités de développem­ent dudit gisement, la Chine pourrait devenir un acteur de premier plan. Autre élément, le budget national est-timorais est majoritair­ement financé par les ressources pétrolière­s, contraigna­nt Dili à faire de la diversific­ation économique une priorité. Le pays ne dépend pas de l’aide internatio­nale, qui ne pèse qu’une part minime dans le budget consolidé. Il n’en reste pas moins que même si le Timor oriental se place devant la Birmanie, le Cambodge, le Laos et le Vietnam pour le PIB par habitant, il se distingue par la part de sa population vivant sous le seuil de pauvreté (30 % en 2016). Vigueur démocratiq­ue

Le Timor oriental bénéficie d’une bonne stabilité politique. Il figure en 2018 au premier rang des pays d’Asie du Sud-Est selon l’indice de démocratie publié par The Economist Group. Il n’est pas sûr que cette qualité joue réellement en sa faveur dans la région. Parallèlem­ent, l’Indonésie et le Timor oriental ont placé beaucoup d’efforts dans la restaurati­on et la normalisat­ion de leurs relations. Un grand nombre de coopératio­ns, dans tous les domaines, de la santé à l’éducation et à la défense, lient les deux pays, outre que l’histoire fournisse les bases à des affinités plus informelle­s, familiales et linguistiq­ues notamment. Une partie importante des biens de consommati­on provient d’Indonésie et plus d’une cinquantai­ne d’entreprise­s indonésien­nes — télécommun­ications, banques, constructi­on — sont implantées à Dili. C’est d’ailleurs lors de la présidence indonésien­ne de l’ASEAN que le Timor oriental a soumis sa candidatur­e en 2011.

Depuis cette date, il a établi une ambassade dans tous les pays membres, où le ministère des Affaires étrangères et de la Coopératio­n réalise des tournées régulières. Tous soutiennen­t l’adhésion du Timor oriental. Mais la nomination, en octobre 2019, au poste de ministre de la Défense en Indonésie de Prabowo Subianto, accusé d’exactions durant l’occupation indonésien­ne (1975-1999), ravive une mémoire douloureus­e, et cela est en mesure de jouer en défaveur de l’adhésion du Timor oriental.

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