Regards libanais sur la turbulence du monde : Kosovo, 11-Septembre, Afghanistan, Irak
Rayan Haddad, Paris, L’Harmattan, septembre 2018, 498 p.
« Libanisation : Processus de fragmentation d’un État, résultant de l’affrontement entre diverses communautés de confessions, par allusion aux affrontements qu’a connus le Liban dans les années 1980 », dit le Larousse. Mais, si la « libanisation » en temps de guerre a donné lieu à tant d’études que le terme est passé dans la langue courante (tout comme « balkanisation », son synonyme), que devient-elle en temps de paix ? Comment la société d’un État affaibli et fragmenté par des années de conflit comme le Liban reçoit-elle les « turbulences » de la scène mondiale ? Quels effets des crises exogènes produisent-elles sur les débats politiques ? Comment font-elles bouger les lignes d’identification en termes de solidarités transnationales, de correspondances ou, au contraire, de disjonctions entre ce qui se passe « là-bas » et « ici » ? Comment sont-elles exploitées par les différents acteurs ? C’est cette étude passionnante que mène Rayan Haddad, politologue et membre de l’Association des chercheurs sur le Moyen-Orient, dans cet ouvrage dense, remaniement de sa thèse de doctorat soutenue à Sciences Po Paris en 2007, à travers quatre exemples : guerre du Kosovo, 11-Septembre/guerre d’Afghanistan, guerre d’Irak et Irak post-invasion. En montrant, pour chacune de ces crises séparément, puis dans un chapitre transversal, l’influence du global sur le local, mais aussi l’exploitation du global par le local, et l’importance variable de l’une ou l’autre échelle, il fait apparaître les liens et interactions qui existent entre des crises a priori distinctes. Une étude pour lecteurs avertis qui appelle certainement, selon le politologue Bertrand Badie, dans la préface de l’ouvrage, « à repenser la conflictualité dans sa globalité et à reconstruire totalement les modes de résolution des conflits ».