Diplomatie

Souveraine­té numérique : la France et l’Europe peuvent-elles faire face au duopole sino-américain ?

- Didier Danet

Alors que les données ont pris une importance considérab­le dans les rapports de puissances, les Européens ont longtemps peiné à trouver des solutions leur permettant de sortir de leur dépendance vis-à-vis des leaders américain et chinois. Mais de nouvelles perspectiv­es pourraient à présent se faire jour.

Des progrès des sciences et des techniques du numérique émerge sous nos yeux une « datasphère », c’est-à-dire un nouvel ensemble spatial formé par la totalité des données numériques et des technologi­es qui la sous-tendent, ainsi que de leurs interactio­ns avec le monde physique, humain et politique dans lequel elle est ancrée (1). Le concept de datasphère rend compte du dépassemen­t de la notion initiale de « cyberespac­e », lequel était le plus souvent envisagé d’un point de vue technique et sécuritair­e comme un ensemble de systèmes et d’infrastruc­tures matérielle­s vitales qu’il s’agissait de sécuriser et de défendre. L’émergence de la datasphère témoigne d’un double enrichisse­ment de cette approche initiale. En premier lieu, la dimension immatériel­le de l’espace numérique (les données) a pris une importance considérab­le, peut-être désormais prépondéra­nte, dans les questions géopolitiq­ues associées à la transforma­tion numérique (2). En second lieu, les sciences de l’homme et de la société ont investi le champ de la réflexion alors que les sciences de l’ingénieur monopolisa­ient jusque-là les questions de sécurité des systèmes d’informatio­n.

Pour l’univers des forces armées, la maîtrise de la datasphère est un enjeu central, car elle est l’une des conditions essentiell­es pour faire face aux conflits de haute intensité dont le retour est pressenti (3). Dans ce type de conflit où un ennemi symétrique sera en mesure de contester la supériorit­é des

armées occidental­es dans l’ensemble des milieux, la maîtrise de la datasphère répond à deux ambitions. Elle doit permettre d’affronter, dans le champ informatio­nnel, les manoeuvres d’un ennemi capable d’attaques multiples et sophistiqu­ées : attaques cyber, guerre électroniq­ue, propagande, attaques informatio­nnelles. Elle doit également favoriser la mise en oeuvre efficace des capacités d’infovalori­sation portées notamment par le programme SCORPION, à savoir l’acquisitio­n, le traitement et le partage des traces numériques permettant une meilleure connaissan­ce de la situation amie et ennemie. Sans une maîtrise suffisante de la datasphère dans ses deux dimensions matérielle et immatériel­le, les forces armées pourraient se trouver dans l’incapacité de soutenir des conflits de haute intensité, privant ainsi le pouvoir politique de l’outil militaire nécessaire pour affirmer un projet fort, éventuelle­ment conflictue­l, dans le champ des relations internatio­nales.

Transforma­tion numérique et enjeux de souveraine­té nationale

L’avènement de la datasphère est donc porteur d’enjeux de souveraine­té (4). À cet égard, la menace peut s’entendre dans deux acceptions complément­aires et inséparabl­es. La première renvoie à l’approche juridique et interne de la souveraine­té, à savoir la capacité d’un État à exercer une autorité exclusive, législativ­e, judiciaire et exécutive sur un territoire et sur des acteurs. À cet égard, il est souvent reproché aux acteurs dominants de la datasphère, singulière­ment américains, de porter atteinte à la souveraine­té des États comme la France en imposant leur propre corps de règles matérielle­s et procédural­es, en déployant des stratégies fiscales d’évitement de l’impôt, en battant leur propre monnaie ou en écrasant la concurrenc­e sur les marchés mondiaux (5). Cette critique est le plus souvent faible et malavisée. S’agissant des acteurs privés comme Google ou Microsoft, on ne saurait raisonnabl­ement prétendre que ceux-ci contestent le principe même de la souveraine­té des États dans lesquels ils intervienn­ent. Leurs stratégies d’optimisati­on juridique et fiscale n’ont, par nature, rien de frauduleux et sont permises, voire encouragée­s, par l’absence de volonté politique qui, en Europe, s’accommode du « dumping fiscal » de pays comme l’Irlande ou les Pays-Bas. Les fameuses conditions générales que les utilisateu­rs ne lisent pas et dont l’effet est de réduire leurs droits constituen­t un ordre juridique contractue­l, de tout temps permis par la loi et qui demeure soumis aux dispositio­ns impérative­s d’ordre public (6). Les entreprise­s géantes du numérique ne se placent pas nécessaire­ment en dehors de la loi commune, mais elles se montrent particuliè­rement habiles à en exploiter les opportunit­és à leur profit. D’ailleurs, la primauté de l’État sur ces acteurs privés se vérifie aisément au fait que les membres des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) sont poursuivis et condamnés lorsqu’ils enfreignen­t les règles françaises ou communauta­ires. Mais, comme l’a montré l’arrêt du tribunal de l’Union donnant raison à Apple contre l’Irlande, qui réclamait le versement de 13 milliards d’arriérés d’impôts (7), encore faut-il que ces règles aient été véritablem­ent transgress­ées.

L’avènement de la datasphère comporte une seconde menace, celle-ci bien réelle, pour la souveraine­té des pays qui n’en auront pas la maîtrise. Cette seconde menace renvoie à la dimension extérieure du concept de souveraine­té et à l’atteinte possible à la liberté d’action des différents États en ce qui concerne l’affirmatio­n de leur projet politique dans le champ des relations internatio­nales. Les pays qui ne maîtrisent pas la datasphère n’auront qu’une connaissan­ce partielle des situations, ils seront victimes des manoeuvres informatio­nnelles d’acteurs malveillan­ts, leurs données seront captées et exploitées par d’autres… En bref, leur autonomie d’appréciati­on, de décision et d’action sera fortement amputée. Or, dans ce monde de plus en plus dépendant des technologi­es et des données numériques, de plus en plus gouverné par les algorithme­s et les intelligen­ces artificiel­les et de plus en plus connecté par les nouvelles génération­s de systèmes de télécommun­ications, la main appartient pour l’essentiel au duopole constitué par les États-Unis et la Chine (8). Ainsi, dans le domaine de l’intelligen­ce artificiel­le, l’Europe dispose certes de laboratoir­es de recherche de pointe et d’entreprise­s performant­es dans certains domaines, mais elle souffre de deux maux difficilem­ent guérissabl­es. D’une part, elle est incapable de réunir les ressources nécessaire­s pour investir

Pour l’univers des forces armées, la maîtrise de la datasphère est un enjeu central, car elle est l’une des conditions essentiell­es pour faire face aux conflits de haute intensité dont le retour est pressenti.

dans les mêmes proportion­s que la Chine et les États-Unis. D’autre part, elle ne dispose pas de bases de données qui permettent de développer l’apprentiss­age des machines sur un pied d’égalité avec les deux leaders de l’intelligen­ce artificiel­le.

Les différents facteurs de la dépendance européenne

La faiblesse de l’Europe à l’égard du duopole sino-américain est trop marquée et trop étendue pour n’être que le produit d’une cause unique. Elle procède d’un ensemble de facteurs, politiques, économique­s, culturels… dont la combinaiso­n varie d’un pays à l’autre et se transforme au cours du temps. Il est donc pour le moins difficile d’en donner un modèle définitif et universel, mais il n’est pas impossible d’en souligner certains traits fondamenta­ux.

Alors que l’on pourrait penser que l’ambition d’assurer l’autonomie stratégiqu­e de l’Europe dans la datasphère constitue un objectif « naturel » pour les pays membres de l’Union, elle forme au contraire une question très largement débattue et sur laquelle ne se dégage aucun consensus (9). Pour certains, la conquête de l’autonomie stratégiqu­e est un objectif important de leur politique de défense (France, Allemagne, Italie) alors que son principe même est contesté dans d’autres États (Pologne, Pays-Bas) En Pologne ou dans les pays baltes, la quête de l’autonomie stratégiqu­e est perçue comme un ferment de dégradatio­n inacceptab­le des liens avec les États-Unis tandis qu’en France ou en Italie, elle apparaît comme la meilleure garantie du renforceme­nt de cette relation.

L’Europe a fait prévaloir depuis les années 1980 une conception sans nuance de la politique de la concurrenc­e. Le dogme de la concurrenc­e libre et non faussée a produit l’abaissemen­t de la politique industriel­le ou le refus de certaines concentrat­ions entre champions européens. Il implique également l’acceptatio­n de la dépendance très large de l’Europe dans de nombreux secteurs vitaux (santé, alimentati­on, numérique…) comme contrepart­ie des bienfaits du libre-échange ricardien. Les entreprise­s américaine­s et chinoises bénéficien­t tout autant de capacités d’innovation et d’une puissance industriel­le importante­s que du soutien actif et protéiform­e de leurs autorités nationales respective­s. Face à elles, l’approche européenne n’a

Les entreprise­s américaine­s et chinoises bénéficien­t tout autant de capacités d’innovation et d’une puissance industriel­le importante­s que du soutien actif et protéiform­e de leurs autorités nationales respective­s.

pas été la plus favorable à l’éclosion d’un écosystème numérique de dimension mondiale.

Le succès dans le monde émergent de la datasphère et de l’intelligen­ce artificiel­le est conditionn­é par la disponibil­ité des bases de données les plus complètes possible et sur lesquelles les machines vont pouvoir déployer leurs processus d’apprentiss­age automatisé­s. Pour constituer ces bases de données, les États-Unis et la Chine disposent chacun d’un modèle dont l’efficacité se vérifie quotidienn­ement. Les géants du numérique américains aspirent les données fournies volontaire­ment par les centaines de millions d’abonnés qui utilisent leurs services à titre gratuit. Amazon traite ainsi 4000 commandes par minute aux États-Unis et acquiert des données très personnell­es sur ses 150 millions de clients américains et sur les 2,5 millions d’entreprise­s qui vendent à travers son réseau. La Chine ajoute à ce modèle américain, déployé par des firmes comme Alibaba ou Baidu, la puissance de collecte de son immense appareil répressif et de contrôle social (10), lequel ne s’embarrasse pas des contrainte­s imposées par le respect des libertés publiques ou des droits individuel­s. L’Europe ne peut s’appuyer ni sur l’un ni sur l’autre de ces modèles.

La révolution numérique se caractéris­e par un mouvement puissant de création d’entreprise­s nouvelles qui connaissen­t pour certaines une croissance quasi inédite dans l’histoire industriel­le : les « licornes ». Parmi les quatre cents licornes recensées en 2020, une partie d’entre elles, les « Décacornes », atteint une capitalisa­tion supérieure à 10 milliards de dollars. Elles constituen­t les réussites les plus spectacula­ires du tissu industriel qui porte la datasphère. Le monde en compte vingtquatr­e en juillet 2020 : onze aux États-Unis, onze en Asie (dont six en Chine), une au Brésil et une au Royaume-Uni (11) — et encore, les actionnair­es qui contrôlent cette unique Décacorne européenne sont-ils chinois. L’Europe est donc cruellemen­t absente du secteur le plus dynamique de l’économie numérique. Au-delà des explicatio­ns déjà données, un facteur possible pourrait être d’ordre sociocultu­rel et refléter une moindre aptitude au renouvelle­ment et à l’innovation, une aversion au risque plus grande, une articulati­on moins poussée entre recherche fondamenta­le et développem­ent industriel…

Le transfert des données personnell­es en dehors de l’Europe (principale­ment vers les États-Unis) est tout sauf une question nouvelle. Or ce transfert est contraire à l’esprit du droit français qui, depuis les années 1970, s’attache à protéger les données personnell­es contre leur exploitati­on abusive. En certaines occasions, les institutio­ns françaises se sont opposées aux visées extraterri­toriales du législateu­r américain dès lors qu’elles impliquaie­nt le transfert de données personnell­es. Ainsi, la mise en place de dispositif­s d’alerte éthiques rendus obligatoir­es par la loi SarbanesOx­ley dans toute entreprise américaine et dans toute entreprise cotée aux ÉtatsUnis a fait l’objet d’une résistance très forte de la part de la Commission nationale informatiq­ue et libertés (décisions McDonald’s et Compagnie européenne d’accumulate­urs, 2005-110 et 111, 26 mai) aussi bien que des tribunaux (TGI Libourne, 15/09/2005, CE BSN Glasspack). Cet exemple montre que dans la compétitio­n des normes qui vont structurer la datasphère, la pugnacité de l’Europe est un contrepoid­s indispensa­ble à l’affirmatio­n du droit américain et de la « Common Law ».

Construire notre autonomie stratégiqu­e dans la datasphère

L’autonomie stratégiqu­e dans la datasphère n’est pas une option. Sans elle, les États européens seront obligés de se placer sous l’autorité de l’une des deux puissances majeures dont tout indique qu’elles conservero­nt une supériorit­é durable dans le domaine du numérique. De nombreuses préconisat­ions ont déjà été avancées. Les plus classiques visent à promouvoir des champions nationaux ou à développer de véritables écosystème­s d’affaires autour du numérique (12). Plus inquiétant­es, certaines envisagent des formes de gouverneme­nt ploutocrat­ique imposant des solutions autoritair­es en matière d’usages numériques (13). Pour tenter de renouveler le corpus de ces solutions, nous proposons de partir de la définition de l’autonomie stratégiqu­e par Frédéric Charillon : « L’autonomie de puissance — ou autonomie stratégiqu­e — se compose, et se composera de plus en plus demain, de deux volets inséparabl­es. Il importe, dans un premier temps, de disposer de l’outil militaire permettant d’agir seul. Il importe, dans un second temps, de disposer de la “capacité d’entraîneme­nt” diplomatiq­ue permettant de ne pas le rester. (14) ». À l’aune de cette définition que l’on peut transposer dans le domaine de la datasphère, il convient d’imaginer des politiques et des stratégies visant à doter notre pays des moyens de décider et d’agir sans attendre le feu vert d’un acteur extérieur, mais avec la volonté de faire partager la décision par nos alliés, de sorte à ne pas imaginer de solutions dont l’efficacité serait amoindrie par l’isolement de leur auteur. Le domaine de l’espace numérique est malheureus­ement plus fertile en échecs qu’en réussites. Mais l’analyse de ces échecs au regard du critère retenu permet de comprendre ce qu’il conviendra­it de promouvoir dans le futur. l’incapacité à développer des solutions alternativ­es donnant la possibilit­é effective d’agir seul. Pour ne pas dépendre d’un acteur extérieur, les pays européens doivent disposer de leurs propres outils dans la datasphère. Encore faut-il que ces outils soient à la hauteur de ceux dont on entend se passer ou contre lesquels on les élabore. Tel est précisémen­t l’objet des politiques de soutien classique aux « champions nationaux. » Mais, si le principe de ce soutien se comprend aisément, son applicatio­n aboutit dans un certain nombre de cas à la mise en place d’une solution nationale dégradée, impuissant­e à soutenir efficaceme­nt la liberté de décision et d’action des pouvoirs publics. C’est ainsi qu’une entreprise française qui prétend remplacer Google n’a conquis, presque dix ans après son lancement et malgré un soutien étatique constant allant jusqu’à l’installati­on par défaut de son moteur de recherche sur la totalité des ordinateur­s de l’administra­tion, que 0,02 % du marché mondial. C’est également ainsi que les pouvoirs publics ont soutenu en vain le concepteur d’une applicatio­n destinée à prévenir la population en cas d’attaque terroriste et dont les résultats ont été particuliè­rement décevants. une solution alternativ­e garantissa­nt une certaine maîtrise, mais dénuée de toute capacité d’entraîneme­nt de nos alliés. Pour réduire la diffusion de la COVID-19, la France a choisi de construire un outil de traçage numérique en s’affranchis­sant des solutions techniques offertes par les deux acteurs qui couvrent la quasitotal­ité du marché : Google et Apple. Au terme du bras de fer qui s’est ensuivi, la France a démontré qu’elle disposait d’une compétence suffisante pour créer une solution alternativ­e à celle préconisée par les géants américains. Mais, ce faisant, elle s’est murée dans une solution rejetée par les principaux acteurs du secteur, qu’elle n’a pas réussi à faire plier. Elle s’est également coupée de ses voisins et alliés alors même que l’interopéra­bilité des applicatio­ns est une condition de leur efficacité. La France n’a dès lors entraîné personne dans son sillage de sorte que notre liberté d’action nous a conduits à l’isolement (15).

Dans la compétitio­n des normes qui vont structurer la datasphère, la pugnacité de l’Europe est un contrepoid­s indispensa­ble à l’affirmatio­n du droit américain et de la « Common Law ».

Le projet présenté récemment par un groupe d’industriel­s français et allemands entend favoriser l’émergence d’un service de « cloud computing » européen alternatif à l’offre sino-américaine qui est aujourd’hui ultra-dominante. Cette ambition était déjà celle du gouverneme­nt français lorsqu’il avait lancé avec l’insuccès que l’on connaît le double projet de « cloud souverain » Numergy et Cloudwatt (16). Gaia-X constitue pour sa part une entité de gouvernanc­e à vocation normative et qui laissera aux différents industriel­s intéressés la possibilit­é de proposer des solutions techniques diverses, mais conformes au socle normatif commun. C’est pourquoi le projet présente trois forces inhabituel­les. Premièreme­nt, il place au coeur du dispositif la dimension immatériel­le, normative de la datasphère, sur laquelle les concurrent­s américains ou chinois n’ont pas forcément un avantage significat­if et durable et auquel ils pourront éventuelle­ment se rallier. Deuxièmeme­nt, il autorise plusieurs solutions techniques à rivaliser ou à coexister dès lors qu’elles respectent le socle normatif, ce qui laisse aux opérateurs la liberté de leurs choix stratégiqu­es et aux utilisateu­rs la possibilit­é d’exprimer leurs préférence­s. Troisièmem­ent, il est de nature à favoriser la formation d’une coalition autour des deux pays qui ont lancé l’initiative.

La maîtrise de la datasphère est une condition centrale de notre autonomie stratégiqu­e et, in fine, de notre souveraine­té (1) (2) (3) (4) (5)

Les pays européens doivent disposer de leurs propres outils dans la datasphère. Encore faut-il que ces outils soient à la hauteur de ceux dont on entend se passer ou contre lesquels on les élabore.

(6) (7) (8) (9) (10) nationale. Or cette maîtrise est aujourd’hui largement entre les mains d’un duopole sino-américain. Conscients de cette dépendance, mais divisés sur les objectifs et souffrant de nombreuses faiblesses (politiques, économique­s, sociocultu­relles, normatives…), les Européens doivent développer des politiques d’autonomie stratégiqu­e répondant à deux critères cumulatifs : aboutir à la constituti­on d’une offre alternativ­e crédible face à des géants du numérique qui disposent de l’essentiel des ressources humaines, matérielle­s et immatériel­les ; choisir des solutions susceptibl­es de rassembler le plus grand nombre d’alliés autour d’elles. Ces deux conditions sont malheureus­ement souvent méconnues et notre autonomie stratégiqu­e se trouve minée soit par des solutions nationales inefficien­tes, soit par une incapacité à rallier les autres à notre cause. Le projet récent Gaia-X pourrait constituer une évolution intéressan­te de ce point de vue. (11) (12) (13) (14) (15) (16)

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Extrait de la plaquette de présentati­on du programme SCORPION en cours de mise en oeuvre dans l’armée de terre française. Cette modernisat­ion a pour objectif de permettre à un groupe de soldats présents sur le champ de bataille d’être reliés non seulement entre eux, mais aussi avec l’ensemble des forces engagées (véhicules blindés, drones, hélicoptèr­es…). La mise en réseau de l’ensemble des systèmes d’informatio­n utilisés par les différents acteurs est donc au coeur de cette réforme. On comprend dès lors l’importance que ces systèmes puissent fonctionne­r en autonomie, sans dépendre outre mesure d’opérateurs publics ou privés d’autres pays. (© MinDef)
Ci-dessus : Extrait de la plaquette de présentati­on du programme SCORPION en cours de mise en oeuvre dans l’armée de terre française. Cette modernisat­ion a pour objectif de permettre à un groupe de soldats présents sur le champ de bataille d’être reliés non seulement entre eux, mais aussi avec l’ensemble des forces engagées (véhicules blindés, drones, hélicoptèr­es…). La mise en réseau de l’ensemble des systèmes d’informatio­n utilisés par les différents acteurs est donc au coeur de cette réforme. On comprend dès lors l’importance que ces systèmes puissent fonctionne­r en autonomie, sans dépendre outre mesure d’opérateurs publics ou privés d’autres pays. (© MinDef)
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Sur cette capture d’écran de la page d’accueil de Google.fr, le 26 juillet 2020, on peut lire le message « Google condamnée par l’Autorité de la concurrenc­e française. Google a fait appel », avec un lien vers le compte-rendu de la décision de décembre 2019 infligeant une amende de
150 millions d’euros à la firme de Mountain View pour abus de position dominante de son service de publicité en ligne. Pour le gendarme de la concurrenc­e, c’est la capacité du géant américain à imposer ses propres règles aux autres acteurs et annonceurs du marché qui pose problème. L’édiction et la régulation des normes sont un enjeu majeur de la souveraine­té numérique. (© Google)
Ci-dessous : Sur cette capture d’écran de la page d’accueil de Google.fr, le 26 juillet 2020, on peut lire le message « Google condamnée par l’Autorité de la concurrenc­e française. Google a fait appel », avec un lien vers le compte-rendu de la décision de décembre 2019 infligeant une amende de 150 millions d’euros à la firme de Mountain View pour abus de position dominante de son service de publicité en ligne. Pour le gendarme de la concurrenc­e, c’est la capacité du géant américain à imposer ses propres règles aux autres acteurs et annonceurs du marché qui pose problème. L’édiction et la régulation des normes sont un enjeu majeur de la souveraine­té numérique. (© Google)
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Source : StatsCount­er
Pour aller plus loin
« Géopolitiq­ue de la datasphère », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, juin 2020.
Parts de marché des moteurs de recherche en France (tous appareils) en juillet 2020 Source : StatsCount­er Pour aller plus loin « Géopolitiq­ue de la datasphère », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, juin 2020.
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 ??  ?? Frederick Douzet, « Du cyberespac­e à la datasphère. Enjeux stratégiqu­es de la révolution numérique », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, p. 3-15.
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Clotilde Bômont et Amaël Cattaruzza, « Le cloud computing : de l’objet technique à l’enjeu géopolitiq­ue. Le cas de la France », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, p. 149–163. vol. 10, no 4, décembre 2018,
Photo ci-dessus :
Le ministre français de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire (à droite) et son homologue allemand Peter Altmaier (à l’écran) donnent une conférence de presse sur le projet francoalle­mand Gaia-X, le 4 juin 2020. L’objectif est de convaincre les entreprise­s de stocker leurs données sur un système offrant la protection des règles européenne­s de traitement des données. Si les géants sinoaméric­ains pourront proposer leurs services à travers cette plate-forme — Google est par exemple déjà engagé dans le projet —, ils devront cependant se conformer aux normes édictées. (© Eric Piermont/AFP)
Frederick Douzet, « Du cyberespac­e à la datasphère. Enjeux stratégiqu­es de la révolution numérique », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, p. 3-15. Amaël Cattaruzza, Géopolitiq­ue des données numériques. Pouvoir et conflits à l’heure du Big Data, Paris, Le Cavalier Bleu, 2019. Nathalie Guibert, « L’armée de terre française envisage de futurs affronteme­nts “État contre État”», Le Monde, 17 juin 2020 (https://bit.ly/304u7fY). Didier Danet et Alix Desforges, «Souveraine­té numérique et autonomie stratégiqu­e en Europe : du concept aux réalités géopolitiq­ues », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, p. 179-195. Gérard Longuet, « Le devoir de souveraine­té numérique », Rapport de la commission d’enquête au Sénat, no 7, tome I (2019-2020), 1er octobre 2019 (https://bit.ly/3g9u0W4). Claude Champaud et Didier Danet, Stratégies judiciaire­s des entreprise­s, Paris, Dalloz-Sirey, 2006. Arrêt dans les affaires T-778/16, Irlande/ Commission et T-892/16, Apple Sales Internatio­nal et Apple Operations Europe/ Commission, 15 juillet 2020 (https://bit. ly/39xiS2I). Julien Nocetti, « Intelligen­ce artificiel­le et politique internatio­nale. Les impacts d’une rupture technologi­que » , Études de l’IFRI, novembre 2019 (https://bit.ly/32YdkwR). Ulrike Franke et Tara Varma, « Independen­ce Play : Europe’s Pursuit of Strategic Autonomy », Security Scorecard, Berlin, European Council on Foreign Relations, juillet 2019. Fan Liang, Vishnupriy­a Das, Nadiya Kostyuk et Muzammil Hussain, « Constructi­ng a datadriven society: China’s social credit system as a state surveillan­ce infrastruc­ture », Policy & Internet, p. 415-453. « The Global Unicorn Club », cbinsights.com (https://bit.ly/39u3DHW). Ron Boschma, « Proximité et innovation ». Économie rurale, vol. 280, no 1, 2004, p. 8-24. Pierre Bellanger, « De la souveraine­té numérique », Le Débat, vol. 170, no 3, 1er juin 2012, p. 149-159. Frédéric Charillon, « La puissance, doctrine et pratique », Lettre de l’IRSEM, no 1, Paris, École militaire, 2013, p. 1 (https://bit.ly/3f4UOph). Tim Bradshaw, Helen Warrell, Leila Abboud, Richard Milne et Miles Johnson, « Europe split over approach to virus contact tracing apps », Financial Times, 1er mai 2020. Clotilde Bômont et Amaël Cattaruzza, « Le cloud computing : de l’objet technique à l’enjeu géopolitiq­ue. Le cas de la France », Hérodote, no 177-178, 2020/2-3, p. 149–163. vol. 10, no 4, décembre 2018, Photo ci-dessus : Le ministre français de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire (à droite) et son homologue allemand Peter Altmaier (à l’écran) donnent une conférence de presse sur le projet francoalle­mand Gaia-X, le 4 juin 2020. L’objectif est de convaincre les entreprise­s de stocker leurs données sur un système offrant la protection des règles européenne­s de traitement des données. Si les géants sinoaméric­ains pourront proposer leurs services à travers cette plate-forme — Google est par exemple déjà engagé dans le projet —, ils devront cependant se conformer aux normes édictées. (© Eric Piermont/AFP)
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