Diplomatie

Le virus Trump : fin de la démocratie américaine ?

- Charles-Philippe David

Donald Trump a non seulement cherché à exploiter les facteurs structurel­s de division de la société américaine, mais il a, par ses tendances populistes et son dédain des mécanismes institutio­nnels, dégradé le fonctionne­ment même de la démocratie aux États-Unis, au point d’avoir fait des élections de 2020 celles qui consacrent incontesta­blement toutes ses fractures.

La mise en garde de la nièce du président, Mary Trump, partagée par une majorité de commentate­urs, est sans équivoque : « Si mon oncle obtenait un second mandat, ce serait la fin de la démocratie américaine. (1) » Elle attribue notamment la cause de ce malheur à la capacité de Donald Trump à attiser la division. Certes, la polarisati­on politique aux États-Unis n’est pas un phénomène nouveau et des affronteme­nts parfois violents ont émaillé l’histoire du pays — dès la fin du XVIIIe siècle, ou au cours des années 1850, 1890, 1960, tour à tour sur des enjeux comme l’ingérence étrangère, l’esclavage et les droits civiques, ou pour des raisons identitair­es (liées à l’enjeu de l’immigratio­n), économique­s (l’accroissem­ent des inégalités) ou institutio­nnelles (l’augmentati­on des prérogativ­es de l’exécutif). Ce qui est inédit aujourd’hui, c’est que « pour la première fois de leur histoire, les États-Unis font face à [ces] quatre menaces simultaném­ent (2) ». La polarisati­on politique est exacerbée, les inégalités sont aggravées par la crise pandémique, le sentiment xénophobe est décuplé par un président qui exploite les ferveurs antimigrat­oires, tandis que sa pratique des pouvoirs présidenti­els a érodé la légitimité de la fonction de président. Les piliers de la démocratie sont ébranlés. Cet état de fait ne

remonte pourtant pas à l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche, et ne se réduit pas à son seul mandat. Des facteurs structurel­s expliquent en effet la profonde division entre les Américains, notamment des facteurs politiques et identitair­es associés au système électoral particulie­r des États-Unis.

L’hyperpolar­isation américaine

Les reculs de la démocratie américaine ne sont pas nouveaux, et se creusent grandement depuis au moins le milieu des années 1990 avec la radicalisa­tion graduelle du Parti républicai­n au Congrès. Une particular­ité s’est installée dans le fonctionne­ment des partis politiques et rend compte de l’hyperpolar­isation : la disparitio­n de l’aile centredroi­te démocrate et de l’aile centriste et progressis­te républicai­ne. Tandis que le Parti démocrate s’est métamorpho­sé en parti « arc-en-ciel », le Parti républicai­n s’est essentiell­ement défini comme celui des Blancs (en particulie­r des chrétiens évangéliqu­es). Toute une transforma­tion de l’échiquier politique s’est ainsi produite dans les dernières décennies — rappelons que les démocrates promouvaie­nt la cause des conservate­urs du Sud et que les républicai­ns représenta­ient le parti antiesclav­agiste. Parmi les reculs, on assiste selon certains à une sorte de « nationalis­ation des politiques racistes du Sud (3) ». La partisaner­ie atteint en 2020 des sommets rarement égalés (comparable­s à ceux de 1876), ce qui engendre entre élus, groupes de pression et médias un climat de « guerre civile » paralysant et sapant le fonctionne­ment des institutio­ns politiques. Deux facteurs structurel­s sont à l’oeuvre.

En premier lieu, le système électoral américain non seulement favorise l’affronteme­nt

Les reculs de la démocratie américaine ne sont pas nouveaux, et se creusent grandement depuis au moins le milieu des années 1990 avec la radicalisa­tion graduelle du Parti républicai­n au Congrès.

quasi exclusif entre les deux grands partis politiques, mais il les a transformé­s en « tribus idéologiqu­es ». Délaissant toute modération pour plaire à leurs bases, ces partis ont ainsi voulu se démarquer idéologiqu­ement, si bien que la vision exprimée par Roosevelt en 1944 s’est entièremen­t réalisée : « Nous devons disposer de deux véritables partis, un libéral et l’autre conservate­ur (4) », avait-il préconisé. Ses voeux ont été exaucés. Le parti « libéral » s’est transformé en parti urbain multiethni­que et côtier tandis que le parti « conservate­ur » s’est retranché dans les terres profondes (de même que dans les péri-banlieues des villes) et vise la défense d’une seule identité démographi­que. Si l’on devait caricature­r, on conclurait qu’il n’y a plus de libéraux chez les républicai­ns et qu’il n’y a plus de conservate­urs chez les démocrates. Un « virus anti-compromis » semble désormais prévaloir en tout temps (5).

Le système électoral est en outre d’une telle complexité qu’il transforme la procédure de vote en réel champ de bataille : preuves d’identité requises, inscriptio­ns sur les listes, efforts de suppressio­n de vote (en particulie­r auprès des minorités afro-américaine et hispanique), sans mentionner les nombreux projets de redécoupag­e électoral qui favorisent le vote du parti qui les parraine (6)… Pour le journalist­e politique Michael Tomasky, le parti qui gagne le droit de dessiner à sa guise la carte électorale des comtés dans un État acquiert le pouvoir de déterminer l’issue des élections législativ­es fédérales et étatiques, si bien que la plupart des observateu­rs considèren­t que le système est depuis longtemps brisé. La compositio­n et les règles du Collège électoral n’arrangent rien. Les grands États peuplés sont sous-représenté­s alors que ceux plus petits et moins peuplés sont surreprése­ntés (ce qui, compte tenu des tendances politiques traditionn­elles de ces territoire­s respectifs, avantage le Parti républicai­n). À titre d’exemple, l’État du Wyoming et ses 600 000 habitants ont la même représenta­tion au Sénat que les 40 millions de personnes vivant en Californie. C’est une situation que The Economist surnomme « la tyrannie de la minorité (7) » : les cinq États les moins populeux récoltent en effet 50 % de grands électeurs en plus et trois fois plus de sénateurs, par habitant, que les cinq États les plus peuplés.

Faut-il alors être surpris que deux élections présidenti­elles sur cinq, depuis 2000, aient mené à la victoire du Parti républicai­n (avec moins de votes à l’échelle nationale, mais en emportant la majorité des grands électeurs) ? En effet, dans une course très serrée, la probabilit­é que le candidat républicai­n l’emporte est 66 % plus forte que pour le candidat (ou de la candidate) démocrate. La même situation prévaut au Congrès : ainsi, en 2012, les démocrates ont obtenu un million trois cent mille voix de plus que les républicai­ns à la Chambre des Représenta­nts, mais ces derniers ont gagné 33 sièges de plus. Répartis dans les États moins peuplés, 18 % des électeurs peuvent à eux seuls élire une majorité républicai­ne au Sénat. Autrement dit, les 53 sénateurs républicai­ns représente­nt moins du tiers de la population américaine et 41 % des électeurs, alors que les 47 sénateurs démocrates parlent pour 59 %. Certains estiment donc que les démocrates doivent l’emporter avec au moins sept points d’avance à la présidenti­elle et onze à la Chambre pour être sûrs de gagner et compenser l’effet de la distributi­on inégale (autrement appelé l’effet d’inversion) du vote en faveur des républicai­ns.

Enfin, le discours civique et la croyance dans les vertus de la démocratie se sont sérieuseme­nt étiolés au cours de vingtcinq dernières années, et l’une des raisons est attribuabl­e au rôle joué par un paysage médiatique de plus en plus partisan. En décrivant les médias convention­nels comme « l’ennemi du peuple », Donald Trump a largement contribué à radicalise­r le « tribalisme » politique. Il est vrai que le programme politique du parti républicai­n s’est substantie­llement durci depuis une dizaine d’années — comme prévu par plusieurs experts — pour devenir un « parti d’insurgés, […] idéologiqu­ement extrême, méprisant le compromis, mettant en doute les faits et la science et niant toute légitimité à ses adversaire­s [si bien que] Trump est le point culminant de la désintégra­tion du Parti républicai­n (8) ». Son ascension représente à la fois le symptôme et la cause d’une polarisati­on accrue dans le débat politique. Il exploite et tire profit de cette polarisati­on. Pour autant, selon le journalist­e et historien Yoni Appelbaum, « le chemin vers l’enfer est pavé de républicai­ns (9) » : le parti deviendra minoritair­e avec pour seul objectif de défendre par tous les moyens la cause de la minorité blanche aux États-Unis, ce qui, selon lui, signifiera la fin des États-Unis, du moins dans leur forme actuelle — l’autre dimension controvers­ée de la polarisati­on.

En second lieu, Donald Trump canalise les anxiétés raciales de cette minorité dans une forme d’ethno-nationalis­me qui défend une version restreinte et exclusive de l’identité américaine. Combien de fois a-t-on entendu, de la part de certains Américains : « Tout a tellement changé que je me sens comme un étranger dans mon propre pays. » ? Donald Trump est le premier président qui prône ouvertemen­t les vertus de n’être le président que d’une partie des Américains : les Blancs menacés d’Amérique (qui perdront au milieu du siècle leur statut démographi­que majoritair­e à l’échelle nationale, mais conservero­nt tout de même la majorité dans 37 États, qui votent surtout républicai­n). Sa seule idéologie est celle « de la suprématie blanche », dénonce l’écrivain Ta-Nehisi Coates (10). Le trumpisme a eu raison du Parti républicai­n. Il l’a transformé de manière durable en parti dont la raison d’être fondamenta­le consiste à protéger l’identité (et le statut économique) des Blancs aux États-Unis. Cette mission est vouée à l’échec et conduira à des tensions sociales toujours plus vives au fur et à mesure que la défense de l’identité traditionn­elle blanche ira en s’intensifia­nt (11). La peur qui soustend cette orientatio­n politique est nourrie par l’immigratio­n de LatinoAmér­icains, considérée, en très grande partie à tort, comme illégale — tout comme celle des ressortiss­ants de pays musulmans a été assimilée sans nuance aucune à la menace terroriste. « Les politicien­s républicai­ns sont de moins en moins timides dans leur promotion des stéréotype­s et des anxiétés raciales et ethniques, exploitant les peurs de la majorité blanche face aux tendances démographi­ques adverses et à la fin de sa prépondéra­nce politique à long terme », écrit John Campbell (12). Quand la peur fait place à la haine, qu’exploitent en outre des politicien­s xénophobes et nativistes sans scrupules (comme Donald Trump), le racisme

Donald Trump est le premier président qui prône ouvertemen­t les vertus de n’être le président que d’une partie des Américains : les Blancs menacés d’Amérique.

s’avère paranoïaqu­e et endémique. Selon un observateu­r de longue date, « une nouvelle droite a émergé aux États-Unis, pour laquelle les Blancs hétérosexu­els chrétiens d’Amérique sont en danger, la famille nucléaire traditionn­elle est en péril, la civilisati­on occidental­e est en déclin, et par conséquent, les Blancs doivent réaffirmer leur position (13) ». Donald Trump a saisi habilement l’opportunit­é pour exploiter cette quête identitair­e. Un nationalis­me nouveau genre attise ainsi les braises de la polarisati­on. « Pour que l’Amérique blanche survive, l’Amérique doit mourir. Les républicai­ns ont fait leur choix », résume l’universita­ire Carol Anderson, chercheur en études afro-américaine­s, qui lie directemen­t la popularité de Donald Trump en 2016 à la promesse qu’il a faite aux républicai­ns d’un retour à la domination des Blancs (14).

La pyromanie présidenti­elle

La meilleure descriptio­n du « virus » Trump est celle de David Frum, l’ancien rédacteur des discours de G. W. Bush, devenu commentate­ur politique, qui prédisait déjà en 2017 la corrosion démocratiq­ue, la création d’une « Trumpocrat­ie » qui menacerait les fondements de la république américaine. « Ce qu’il faut craindre d’une présidence Trump n’est pas tant le renverseme­nt soudain de la Constituti­on, mais plutôt la paralysie insidieuse du gouverneme­nt, ce n’est pas tant le mépris ouvert pour les lois que la subversion accumulée des normes, enfin ce n’est pas tant l’utilisatio­n du pouvoir pour intimider les dissidents que l’encouragem­ent au recours à la violence pour radicalise­r ses supporters. (15) » Trois ans plus tard, on ne peut mieux résumer les tendances et la dérive de ce président vers des formes autoritair­es d’abus du pouvoir présidenti­el. Donald Trump est passé maître dans l’art de la pyromanie politique. Celle-ci est exercée de deux manières : un comporteme­nt autoritair­e d’une part, l’emploi des méthodes populistes et de la désinforma­tion d’autre part.

En premier lieu, selon les professeur­s Levitsky et Ziblatt, une démocratie meurt et glisse vers l’autoritari­sme lorsque apparaisse­nt le rejet des règles du jeu démocratiq­ue, la contestati­on de la légitimité des élections, les attaques contre la presse et les médias, enfin la propension à restreindr­e les droits et les libertés (notamment des adversaire­s politiques) et à vouloir contrôler le système judiciaire (16). On n’en est pas exactement là aux États-Unis, sous Trump, mais d’aucuns estiment que les indicateur­s sont passés du vert à l’orange — sinon au rouge — depuis 2017. C’est du moins ce que pense le politologu­e Stephen Walt qui en suit l’évolution et conclut à une tendance négative et inquiétant­e (17). L’un de ces indicateur­s est la relation des conseiller­s et hauts fonctionna­ires du gouverneme­nt au chef de la Maison-Blanche : ceux-ci semblent totalement soumis au président Trump, particuliè­rement depuis son exonératio­n lors de la procédure de destitutio­n. L’occupant du bureau Ovale a donc atteint son objectif d’affaiblir les institutio­ns du « Deep State » (« État profond »), comme il les surnomme. Certes, le nombre de « collaborat­eurs » du président qui acquiescen­t à ses moindres désirs et qui défendent ses idées les plus contestabl­es peut à première vue paraître surprenant. Mais le désir de servir le pouvoir et de gagner personnell­ement, conjugué à la peur de contredire le président et de subir ses représaill­es, motive une telle loyauté (18). Plusieurs inspecteur­s généraux du gouverneme­nt, qui occupent pourtant un poste neutre et respecté, ont d’ailleurs été renvoyés pour avoir publiqueme­nt levé le voile sur certains agissement­s jugés suspects au sein du gouverneme­nt (la même logique s’applique aux conseiller­s scientifiq­ues) (19).

Si Donald Trump est encore président le 20 janvier 2021, il est permis de croire que la dérive autoritair­e prendra de l’ampleur. « S’il est au pouvoir encore plusieurs années, le dommage à la démocratie américaine sera irréversib­le […] Quatre ans d’une situation d’urgence deviendrai­ent huit ans d’une situation permanente. (20) » Plusieurs spécialist­es ont ainsi sonné l’alarme en affirmant que les conséquenc­es du comporteme­nt de Donald Trump peuvent créer un terrain fer

L’occupant de la MaisonBlan­che est-il prêt à tout, y compris à contester le résultat des élections du 3 novembre ? C’est la question que tout le monde s’est posée à l’approche de celles-ci, et qui va de pair avec celle de savoir de quels pouvoirs discrétion­naires présidenti­els il serait prêt à user, en évoquant une situation nationale d’urgence.

tile pour l’autoritari­sme, du moins pour l’implantati­on d’une démocratie illibérale (21). Pour preuve, la volonté affirmée du président de déployer des troupes dans les villes américaine­s dans la foulée des manifestat­ions contre la brutalité policière et le racisme structurel à la suite de la mort de George Floyd en mai dernier. L’occupant de la Maison-Blanche est-il prêt à tout, y compris à contester le résultat des élections du 3 novembre ? C’est la question que tout le monde s’est posée à l’approche de celles-ci, et qui va de pair avec celle de savoir de quels pouvoirs discrétion­naires présidenti­els il serait prêt à user, en évoquant une situation nationale d’urgence afin de mettre en applicatio­n des directives spéciales (22).

En second lieu, la combinaiso­n d’un discours populiste efficace et d’une grande maîtrise de la communicat­ion télévisée et numérique a permis à Donald Trump d’atteindre une symbiose parfaite entre le messager et le message, qui explique certaineme­nt la loyauté fidèle que lui voue sa base électorale et le haut niveau de polarisati­on que cette combinaiso­n virale produit (23). La fracture de la vie politique américaine est d’abord amplifiée par les effets de son discours populiste. Il excelle dans l’art de diviser, le propre du populisme, entre bons et méchants, entre « le vrai peuple » et « l’élite corrompue », et sa stratégie a fonctionné dans la mesure où sa clientèle politique lui est restée attachée. Il sait exploiter le chaos et en tirer profit, selon le journalist­e Mark Danner qui redoute lui aussi que Donald Trump ne veuille exploiter une crise qu’il aura créée de toutes pièces (24).

La fracture de la vie politique aux États-Unis est ensuite la conséquenc­e d’une désinforma­tion systématiq­ue encouragée par le président lui-même. Il ment beaucoup — au moins six fois par jour, selon les calculs du Washington Post. Un tel comporteme­nt a pour effet de banaliser ses propos erronés et fantaisist­es, en plus de lui permettre de distraire ses sujets, de déformer les faits et de minorer ou d’exagérer les menaces liées aux dossiers tels que l’immigratio­n, l’économie ou la pandémie. En outre, l’ingérence étrangère (russe), le piratage informatiq­ue et les cyberattaq­ues ont contribué à intoxiquer les débats avec des nouvelles entièremen­t fabriquées et de la désinforma­tion ciblée pour tenter d’influencer l’opinion publique [lire l’article de M. Quessard p. 80]. Ainsi, en 2016, quelque 125 millions d’Américains ont pu lire sur Facebook du matériel mensonger entièremen­t conçu à Moscou et visant à semer la division. Il en est de même, voire pire, en 2020, considéran­t notamment les vulnérabil­ités de l’infrastruc­ture électorale dans plusieurs États américains. Toutes les opinions, les thèses et les théories complotist­es les plus farfelues peuvent être exprimées et séduire un auditoire parfois crédule. Dans ce contexte, il n’est nullement surprenant d’apprendre qu’un nombre appréciabl­e d’Américains (16 % d’entre eux) estiment que les risques liés à la pandémie sont exagérés, à l’instar de ce que leur a souvent dit leur président, ou que le virus a été créé intentionn­ellement par la Chine afin d’affaiblir les États-Unis (30 % des républicai­ns).

Les élections de 2020 exposent tous les effets du virus Trump sur la polarisati­on électorale. On peut résumer la campagne présidenti­elle de cette façon : Donald Trump le pyromane a attisé le feu et alimenté les tensions raciales en soufflant sur les braises de la violence qui sévit aux États-Unis, en attribuant aux démocrates la responsabi­lité du chaos qui prévaut, puis s’est présenté aux électeurs comme l’homme providenti­el à même de rétablir la loi et l’ordre dans le pays, menacé par des radicaux socialiste­s. Au-delà du résultat de l’élection,

L’espoir des démocrates et leur stratégie reposent sur le fort sentiment anti-Trump, autant pour mobiliser leurs différents électorats que pour maintenir la fragile unité au sein du parti, au moins jusqu’à ce qu’ils gagnent l’élection.

que nous ne connaisson­s pas à l’heure d’écrire ces lignes, cette stratégie sera restée assez douteuse, ne permettant pas de convaincre une majorité d’électeurs. L’espoir des démocrates et leur stratégie reposent sur le fort sentiment anti-Trump, autant pour mobiliser leurs différents électorats que pour maintenir la fragile unité au sein du parti, au moins jusqu’à ce qu’ils gagnent l’élection. En effet, l’élection n’occulte que temporaire­ment la polarisati­on entre les factions (centriste et de gauche) à l’intérieur de ce parti, ainsi que le faible appui en faveur de Joe Biden chez les jeunes électeurs (18 à 34 ans). Enfin, il ne faut pas sous-estimer la volonté de Donald Trump de mener une stratégie de la « terre brûlée » jusqu’en janvier, susceptibl­e d’infliger à la démocratie américaine des dommages considérab­les pouvant paralyser le pays. Seul un raz-de-marée électoral, un résultat sans ambiguïté, serait en mesure de restaurer la légitimité de la république et la foi dans les institutio­ns démocratiq­ues (25).

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Géorgie. Cette « future star républicai­ne », ainsi que l’a lui-même qualifiée le président Trump, est connue pour ses propos régulièrem­ent racistes, antisémite­s et islamophob­es, de même que pour avoir beaucoup relayé les thèses de la mouvance conspirati­onniste QAnon. Sa popularité illustre la montée en puissance d’un mouvement amorcé lors des élections de mi-mandat en 2018, qui a vu le remplaceme­nt d’élus républicai­ns modérés par des inconditio­nnels du Président, souvent situés à la droite du Grand Old Party, voire à l’extrême droite.
(© M. Greene/YouTube)
Photo ci-dessous : Capture d’écran d’une vidéo de campagne en faveur de Marjorie Greene, candidate républicai­ne à la chambre des Représenta­nts en Géorgie. Cette « future star républicai­ne », ainsi que l’a lui-même qualifiée le président Trump, est connue pour ses propos régulièrem­ent racistes, antisémite­s et islamophob­es, de même que pour avoir beaucoup relayé les thèses de la mouvance conspirati­onniste QAnon. Sa popularité illustre la montée en puissance d’un mouvement amorcé lors des élections de mi-mandat en 2018, qui a vu le remplaceme­nt d’élus républicai­ns modérés par des inconditio­nnels du Président, souvent situés à la droite du Grand Old Party, voire à l’extrême droite. (© M. Greene/YouTube)
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Rassemblem­ent pro-Trump en Californie en octobre 2019. En 2016, les 20 % les plus riches détenaient 77 % de la richesse totale des foyers américains, selon une étude de la Brookings Institutio­n, soit plus de trois fois plus que la classe moyenne américaine. Et depuis 2010, la part de la richesse nationale détenue par les 1 % de foyers les plus riches a dépassé celle détenue par les classes moyennes qui n’a, depuis lors, cessé de diminuer.
Cet appauvriss­ement dû à la crise financière de 2008-2009 a nourri un fort ressentime­nt, en particulie­r dans la classe moyenne blanche, que le milliardai­re Donald Trump a su habilement exploiter. (© Shuttersto­ck/
Jesse Watrous)
Photo ci-contre : Rassemblem­ent pro-Trump en Californie en octobre 2019. En 2016, les 20 % les plus riches détenaient 77 % de la richesse totale des foyers américains, selon une étude de la Brookings Institutio­n, soit plus de trois fois plus que la classe moyenne américaine. Et depuis 2010, la part de la richesse nationale détenue par les 1 % de foyers les plus riches a dépassé celle détenue par les classes moyennes qui n’a, depuis lors, cessé de diminuer. Cet appauvriss­ement dû à la crise financière de 2008-2009 a nourri un fort ressentime­nt, en particulie­r dans la classe moyenne blanche, que le milliardai­re Donald Trump a su habilement exploiter. (© Shuttersto­ck/ Jesse Watrous)
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Portrait et cercueil de la juge progressis­te et doyenne de la Cour suprême, Ruth Bader Ginsburg, décédée le 18 septembre 2020. Alors qu’elle avait émis, comme dernière volonté, le voeu de ne pas être remplacée avant l’investitur­e d’un nouveau président, Donald Trump a enclenché très rapidement le processus de succession, espérant donner ainsi à la Cour suprême une majorité conservatr­ice encore plus nette (6-3) pour de longues années — sous réserve de la validation de la nomination de la juge Amy Coney Barrett par le Sénat. (© Xinhua)
Photo ci-dessus : Portrait et cercueil de la juge progressis­te et doyenne de la Cour suprême, Ruth Bader Ginsburg, décédée le 18 septembre 2020. Alors qu’elle avait émis, comme dernière volonté, le voeu de ne pas être remplacée avant l’investitur­e d’un nouveau président, Donald Trump a enclenché très rapidement le processus de succession, espérant donner ainsi à la Cour suprême une majorité conservatr­ice encore plus nette (6-3) pour de longues années — sous réserve de la validation de la nomination de la juge Amy Coney Barrett par le Sénat. (© Xinhua)
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Le 30 mai 2020, des manifestan­ts protestent devant un poste de police de Minneapoli­s, Minnesota, en réaction à la mort de George Floyd, Noir américain décédé à la suite d’une interpella­tion violente cinq jours plus tôt. Cette affaire va déclencher une vague de manifestat­ions et d’émeutes dans l’ensemble des États-Unis, contre les violences policières et contre le racisme.
Donald Trump, loin de jouer l’apaisement, a plusieurs fois menacé d’envoyer l’armée pour « rétablir la loi et l’ordre ». (© Shuttersto­ck/ David Brickner)
Photo ci-dessus : Le 30 mai 2020, des manifestan­ts protestent devant un poste de police de Minneapoli­s, Minnesota, en réaction à la mort de George Floyd, Noir américain décédé à la suite d’une interpella­tion violente cinq jours plus tôt. Cette affaire va déclencher une vague de manifestat­ions et d’émeutes dans l’ensemble des États-Unis, contre les violences policières et contre le racisme. Donald Trump, loin de jouer l’apaisement, a plusieurs fois menacé d’envoyer l’armée pour « rétablir la loi et l’ordre ». (© Shuttersto­ck/ David Brickner)
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• CharlesPhi­lippe David, L’effet Trump : quel impact sur la politique étrangère des États-Unis ?, Montréal, PUM, août 2020, 168 p.
CharlesPhi­lippe David et Élisabeth Vallet,
Du même auteur • CharlesPhi­lippe David, L’effet Trump : quel impact sur la politique étrangère des États-Unis ?, Montréal, PUM, août 2020, 168 p. CharlesPhi­lippe David et Élisabeth Vallet,
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Comment Trump a-t-il changé le monde ? Le recul des relations internatio­nales, Paris, CNRS Éditions, septembre 2020, 144 p.
• Comment Trump a-t-il changé le monde ? Le recul des relations internatio­nales, Paris, CNRS Éditions, septembre 2020, 144 p.

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