La pandémie de COVID-19 aura-t-elle raison de la défense européenne ?
La défense européenne a-t-elle des moyens de lutter contre la COVID-19 ?
Si L’UE ne dispose pas de compétences sanitaires, certaines dispositions du traité de Lisbonne auraient pu être utilisées. Il s’agit précisément de la clause de solidarité mutuelle (article 222 du Traité sur le fonctionnement de l’union européenne) qui prévoit qu’en de catastrophe d’origine naturelle ou humaine, L’UE peut mobiliser tous les instruments à sa disposition, y compris les moyens militaires mis à disposition par ses membres, pour porter assistance à l’état victime. L’allemagne et l’autriche avaient souhaité invoquer cette clause en mars 2020, mais cette proposition est restée lettre morte, malgré l’ampleur de la crise sanitaire.
De même, lors de leur sommet du 6 avril 2020 en visioconférence, les ministres européens de la Défense ont abordé les implications de la pandémie en matière de défense. L’accent a été mis sur l’assistance apportée par les armées à la lutte contre la pandémie, à travers le transport de malades, la construction d’hôpitaux de campagne, ou le rapatriement de citoyens européens, entre autres. Mais cette assistance a été gérée au niveau national, et non coordonnée dans le cadre de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) comme cela aurait pu être envisagé. Pour autant, l’état-major de L’UE vient d’activer en mai 2020 une cellule de planification des mouvements européens, visant à permettre un soutien militaire des États membres pour transporter des fournitures médicales et humanitaires. Il envisage aussi la mise en place d’une task force pour favoriser l’échange de bonnes pratiques entre États européens.
Enfin, la pandémie affecte fortement les missions civiles et militaires européennes (3). Les 27 ministres de la Défense ont réussi à s’accorder, lors de leurs réunions virtuelles du 6 avril et du 12 mai 2020, sur la nécessité de maintenir la présence européenne sur les terrains où L’UE conduit actuellement des opérations.
Une pandémie aux effets globaux sur la défense européenne
Trois aspects plus globaux liés à la défense européenne sont mis en évidence par la pandémie. Tout d’abord, la question budgétaire. La lutte contre le virus et l’importance des budgets nécessaires pour relancer l’économie européenne et parer aux risques sociaux affectent profondément l’élaboration du futur cadre financier pluriannuel (MFF 2021-2027). Les Européens devront donc plus que jamais rester vigilants et maintenir leurs budgets de défense, mais également celui du Fonds européen de défense, même si la recherche d’une autonomie stratégique risque de perdre la priorité qui lui avait été donnée ces dernières années.
Ensuite, un autre aspect important a été mis en lumière : la dépendance de nombreuses professions aux outils numériques permettant la poursuite de l’activité en télétravail, mais révélant aussi une grande vulnérabilité aux cyberattaques. Le Conseil européen a d’ailleurs acté cette menace en renouvelant en mai 2020 la possibilité d’infliger des sanctions à d’éventuels cyberagresseurs.
Enfin, dans sa déclaration faisant suite au Conseil européen par visioconférence du 23 avril 2020, le président Charles Michel a élargi la notion d’autonomie stratégique européenne à la production de biens essentiels dans L’UE, dans un monde de plus en plus marqué par la concurrence sino-américaine. La pandémie est au fond un test pour la défense européenne. Encore faut-il le réussir.