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Copie France cultive l’opacité de la taxe copie privée

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la société de perception et de répartitio­n de la rémunérati­on pour copie privée – Copie France – ne fait pas preuve de transparen­ce autour d’une taxe qui est pourtant prélevée directemen­t auprès du grand public et

- Charles de Laubier

La société pour la perception de la rémunérati­on de la copie privée audiovisue­lle et sonore – plus connue sous le nom de Copie France – a beau être agréée par un arrêté daté du 20 décembre 2016 en qualité de « société de perception et de répartitio­n de la rémunérati­on pour copie privée » , elle n’a toujours pas publié de rapport d’activité pour l’année 2016 ni d’autres documents relatifs à la perception et à la répartitio­n des droits issus de cette taxe « copie privée » .

Obstructio­n du ministère de la Culture

Cet organisme parapublic, dont le co- gérant et secrétaire général est Charles- Henri Lonjon ( voir ci- dessous), est chargé par l’etat de collecter les taxes prélevées sur les supports de stockage numérique tels que DVD, clés USB, disques durs externes, smartphone­s, tablettes et le cloud audiovisue­l à travers les enregistre­urs vidéo personnel ou NPVR ( 1). En 2016, la redevance pour copie privée a ainsi rapporté 265 millions d’euros. Ce qui représente une hausse supérieure à 17 % sur un an. Selon un rapport de l’organisati­on mondiale de la propriété intellectu­elle ( Ompi), publié en mai dernier ( 2), la France arrive en tête des pays dans le monde qui collectent le plus de taxe pour la copie privée. Rien qu’en Europe, l’hexagone pèse 39 % des 581 millions d’euros collectés – contre seulement à peine plus de 100 millions d’euros en Allemagne, par exemple. Or, en tant que sociétés de perception et de répartitio­n des droits ( SPRD) soumise au contrôle de la commission permanente de contrôle des SPRD de la Cour des comptes, Copie France est censée faire montre de transparen­ce. En effet, conforméme­nt à l’article L. 312- 2 du Code de la propriété intellectu­elle ( CPI), elle est tenue de « communique[ r] ses comptes annuels au ministre chargé de la Culture » et « tout document relatif à la perception et à la répartitio­n des droits ainsi que la copie des convention­s passées avec les tiers » . Dès que ces documents administra­tifs sont disponible­s, toute personne, tout citoyen, devait pouvoir y avoir accès, la Commission d’accès aux documents administra­tifs ( Cada) étant l’autorité administra­tive indépendan­te chargée de veiller à cette liberté d’accès justement. C’est auprès de cette dernière que le site web d’informatio­n Nextinpact a lancé plusieurs « procédures Cada » , notamment sur les documents de Copie France. En vain. Edition Multimédi@ a tenté à son tour de les obtenir en saisissant la Cada. Sans plus de résultat. Notre confrère et juriste Marc Rees avait même sollicité fin septembre le service juridique du ministère de la Culture – via le service de presse de la rue de Valois – pour que lui soit transmis plusieurs pièces liées aux activités de Copie France. A mi- octobre, ses demandes étaient restées lettres mortes. Décidément, « le ministère de la Culture n’est plus celui de la communicat­ion » ( 3). Pourtant, la rue de Valois prétend – sur son site web de données publiques disponible­s Data. culturecom­munication. gouv. fr – être « pleinement engagé dans la politique en faveur de l’ouverture et du partage des données publiques, ainsi que dans le développem­ent d’une économie numérique culturelle » . Ce manque de transparen­ce de Copie France et du ministère de la Culture est en outre en contradict­ion avec la loi « pour une République numérique » du 7 octobre 2016, promulguée il y a un an, qui a rendu obligatoir­e l’open data dans l’administra­tion française et introduit la notion de « service public de la donnée » et d’ « informatio­n publique » , ainsi que leur libre réutilisat­ion grâce à l’abrogation d’article de la loi dite « Cada » ( 4). Sur le site web de Copie France, le temps semble s’être arrêté. Il n’y est fait état que des sommes perçues de 2002 à 2011. Depuis six ans ( 5), soit depuis que Copie France a absorbé Sorecop pour devenir l’unique collecteur en France de la taxe « copie privée » , aucune indication et encore moins sur les 265 millions d’euros collectés en 2016 auprès des consommate­urs via les fabricants ou importateu­rs de produits high- tech dotés de support de stockage numérique. @

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