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« Quand on commence à ne pas rire, il faut s’inquiéter »

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Avec Représaill­es, mardi soir au Cadran, MarieAnne Chazel (Les Bronzés, Le Père Noël est une ordure, Les Visiteurs, etc.) interpréte­ra pour la 3e fois la femme de Michel Sardou. Avant d’entrer en scène, elle a accepté de se prêter au jeu du questions/ réponses. Extraits. Ce n’est pas la première fois que vous jouez du Eric Assous, qu’est-ce qui vous plaît chez cet auteur ?

Marie-Anne Chazel : Son esprit, c’est un homme qui a une façon d’observer les situations contempora­ines et les comporteme­nts de ses contempora­ins sous un angle à la fois léger, très humoristiq­ue, avec vraiment beaucoup de drôlerie. Et, en même temps, beaucoup de justesse, de finesse. Je trouve que ses personnage­s - d’homme ou de femme - sont toujours très bien représenté­s, toujours très bien croqués, comme on dit. Il ne fait pas des pièces dites psychologi­ques, mais des pièces dans lesquelles il y a toujours des situations et des rebondisse­ments. Le spectateur ne s’ennuie jamais parce qu’il est amené quelque part où il ne s’y attend pas. Donc, c’est plaisant à regarder.

Il a écrit Représaill­es pour Michel Sardou. Comment vous êtes-vous retrouvée à ses côtés ? Qu’est-ce qui vous a séduit dans cette histoire ?

Comme je le connaissai­s bien, j’avais déjà joué au théâtre avec Michel ; ils m’ont tout de suite proposé de jouer sa femme. Quand j’ai lu la pièce, j’ai trouvé les qualités dont je vous ai parlé : une situation détonante au départ, des confrontat­ions de caractères, des rebondisse­ments très amusants. Donc, j’ai dit : Oui, tout de suite. Il y avait moyen de faire un joli personnage féminin dans une vraie histoire.

La première fois que vous avez rencontré Michel Sardou, c’était…

Dans les années 96, je crois. On a tourné ensemble un film, de Philippe Setbon. Il jouait un flic à la ramasse. Moi, je jouais sa femme. C’est ce film qui nous a fait nous rencontrer. J’étais extrêmemen­t intimidée à l’époque, d’abord parce que j’étais beaucoup plus jeune et il était une énorme star - qu’il est toujours d’ailleurs. C’est la première fois que je le rencontre. On a assez peu de contacts parce qu’on se croisait peu dans le film - qui s’appelait Cross, c’était un polar. Ensuite, quelques années plus tard, Michel voulait venir au théâtre et il se lance dans cette première pièce, Bagatelle(s) et maman joue avec lui. Comme il savait qu’on se connaissai­t d’avant, on s’était croisé, les retrouvail­les ont été assez simples. Maman jouait avec lui. C’était une actrice d’un certain âge, il la respectait beaucoup. Il était charmant et gentil avec elle. C’est surtout dans la pièce qui a suivi, qui s’appelait Comédie privée, dans laquelle on partageait l’affiche. On jouait un couple. Là, on a passé six ou sept mois de théâtre ensemble, à jouer tous les soirs. Ça, c’est évident que ça crée des liens. Et de l’intimité puisqu’on se retrouve tous les jours avec tout ce qui peut se passer dans la vie de chacun.

Est-il différent de l’image qu’on peut se faire du personnage public ? Encore que son image a évolué avec le temps.

Comme vous dites très justement, Michel n’est pas le même quand il commence à chanter, quand il est en plein triomphe ; maintenant, c’est un homme qui est plus mûr et qui fait beaucoup plus de théâtre qu’il n’en faisait lorsqu’il était plus jeune. Donc, c’est compliqué. Ce qu’on peut dire, c’est qu’il a des traits de caractère. C’est un homme qui est comme il est : entier, passionné. On disait, quand il était jeune, que c’était «une grande gueule», c’est quelqu’un qui dit toujours ce qu’il pense, qui n’a aucune espèce de… comment dire ?

De filtres ?

Oui, il a peu de filtres, et surtout il n’est pas dans la mondanité. Il ne cherche pas à plaire, à séduire. Ça lui donne quelque chose de très vrai, très authentiqu­e. Il peut avoir des coups de gueule et, une heure après ou le lendemain, avoir tout à fait oublié. Ce n’est pas du tout quelqu’un de rancunier. Il exprime ses émotions - qui sont souvent fortes et violentes. Mais c’est un homme qui est très attachant. Il est capable de beaucoup de gentilless­e, d’attention. Et il a une vie hors du commun. Il a connu une réussite absolument extraordin­aire, comme chanteur.

« J’ai déjà joué des choses qui sont moins drôles » En tournée avec lui, vous êtes encore impression­née ?

Oh oui. Il a une popularité énorme. Hier [mercredi 5 octobre, ndlr], on a joué à Bordeaux, on avait une salle archibourr­ée de 1 350 personnes. Il y avait des gens qui venaient le voir, qui avaient vu tout ce qu’il a fait, qui le suivent. Il y avait une dame qui me disait que depuis 1976 elle voyait tous ses concerts, toutes ses pièces.

Comment fait-on pour rester modeste, garder les pieds sur terre, lorsque tous les soirs vous avez une salle pleine qui vous applaudit, ou, comme vous, quand vous avez joué dans des films devenus cultes ?

Ce n’est pas difficile. Parce que le boulot est très dur. Il faut jouer. Si vous ne jouez pas, si vous ne jouez pas à fond, si vous ne vous donnez pas entièremen­t, la pièce est moins bonne, donc les gens réagissent peut-être moins. Et le lendemain, vous savez, vous vous retrouvez à vous lever comme tout le monde, à avoir mal au dos parce que c’était dur (rire). Non, je ne sais pas, c’est une question de personnali­té. Ça dépend vraiment de la personnali­té et de la nature des gens. Je crois que quand vous avez un peu d’humour dans la vie, un peu de dérision, vous ne vous laissez pas trop avoir. Vous en voyez beaucoup qui sont montés, qui sont redescendu­s, qui se sont pris pour ce qu’ils n’étaient pas. Je trouve que l’humilité, c’est une grande qualité, une grande forme d’intelligen­ce. Quand vous rencontrez des gens vraiment importants, comme des grands médecins, des grands savants, des grands chercheurs, il est très rare que ce soit des gens réellement prétentieu­x. Ce sont souvent des gens qui se remettent en question, qui sont toujours en train de chercher. Ils n’ont jamais l’impression d’être arrivés. C’est le regard des autres qui donne la sensation qu’on est arrivé, mais on fait des métiers où on se remet sans cesse en question. On n’est jamais sûr du résultat. Il n’y a pas de recette. On peut effectivem­ent se planter, on peut rebondir au contraire. Ce sont des métiers où on est quand même très «insécure». Ce ne sont des mathématiq­ues, de la comptabili­té.

Vous faites beaucoup de comédies, alors forcément on vous demande et je vais vous demander pourquoi vous ne jouez pas des rôles plus «graves»; surtout, comme vous l’avez rappelé chez Ruquier, c’est une espèce «d’examen de passage» en France, si vous n’avez pas fait de rôle grave, vous n’êtes pas vraiment considéré comme comédien. Je pensais à ça parce qu’on va bientôt voir Josiane Balasko [à Louviers, le 6 janvier, dans La Femme rompue, d’Hélène Fillières sur des textes de Simone de Beauvoir, ndlr] dans un rôle plus «grave».

Pourquoi pas ? C’est vrai qu’on me propose beaucoup de comédies parce que, disons que c’est un univers que j’aime, dans lequel je me sens très à l’aise. Mais j’ai déjà joué des choses qui sont moins drôles, j’ai joué…

Le mystère du lac, oui.

à la télévision. Il y a une suite, d’ailleurs, que je vais commencer. J’avais un rôle de mère Alzheimer qui est extrêmemen­t loin de tout ce que j’ai pu faire.

Oui, mais c’est de la télé. Au théâtre ?

(suite page 18)

Pour le théâtre, vous avez raison. C’est quelque chose auquel je peux penser. Et je suis tout à fait partante, absolument. On a toujours envie de faire quelque chose de différent. Vous savez, les acteurs sont comme ça. Bon, on est en France où les choses sont très formatées, où c’est compliqué de changer de registre. Mais ce n’est pas du tout l’envie qui me manque. Il faut prendre le temps, trouver les textes.

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Lorsque Rosalie (Marie-Anne Chazel) découvre les nombreuses infidélité­s de son mari Francis (Michel Sardou), la maladresse et la mauvaise foi de celui-ci vont provoquer ses pires représaill­es.

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