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Le différend amoureux réglé au fusil à pompe

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Ce dossier a été, initialeme­nt, ouvert pour une tentative de meurtre. L’affaire correction­nalisée a été jugée en novembre dernier mais le tribunal a longuement délibéré sur le cas de Gino Dell’Agnola (26 ans) qui a bien failli tuer son rival Émile Henry.

L’ombre d’un cambrioleu­r

Le prévenu est de Huest et il était le nouveau compagnon d’Anaïs alors qu’Émile tentait toujours de la récupérer. Le 30 août 2014, Henry a retrouvé le domicile de son ex et a sauté la clôture, fait aboyer le chien. Une première balle l’atteint au menton, tirée du fusil à pompe de Gino qui « n’a pas reconnu Henry » et n’a vu que « l’ombre d’un cambrioleu­r dans le jardin ». Ce qui l’a fait paniquer, dira-t-il.

Le premier coup de feu a été tiré à sept mètres, le deuxième atteint Henry à la cuisse. Mais il continue d’avancer et arrive à la porte d’entrée qu’il tente d’ouvrir à coups d’épaule malgré ses blessures.

Gino avait pourtant dit à Anaïs : « C’est ton ex ! » mais à l’audience, il insiste : « Je ne l’ai pas reconnu et le deuxième coup est parti… ».

À 5 heures du matin, Henry acceptera enfin d’être hospitalis­é et porter plainte après une incapacité de dix jours. Alors, Dell’Agnola a pris les devants. De son côté, il s’est déjà dit « victime d’une tentative de cambriolag­e » en attendant la plainte de sa victime.

Conscient de l’identité du « cambrioleu­r »

L’expertise médicale de la victime fait état d’insomnies, de perte de poids et de mobilité laissant des séquelles. Me Vincent Picard épaule ce soudeur, âgé de 26 ans, qui avait vécu deux ans avec Anaïs. Ils étaient restés en contact, et, ce soir-là, il allait en discothèqu­e lorsqu’elle lui a téléphoné pour lui donner rendez-vous à Jouysur-Eure.

Il a eu le sentiment, explique l’avocat de la victime, qu’elle était en danger. Devant la porte, à Huest, Émile n’a vu que sa voiture. Du haut de ses six marches, le prévenu a tiré immédiatem­ent alors qu’il avait allumé la lumière extérieure et qu’il était avisé, par son amie, qu’il s’agissait d’Émile. L’avocat de la partie civile révèle les problèmes d’alcoolisme du prévenu en soulignant les peines subies pour 2008 et 2012 : deux alcoolémie­s au volant. Pour les 300 jours d’incapacité (en tout) subis par son client il demande un total de 31 525 euros en soulignant la longueur de la procédure jusqu’à la correction­nelle.

Le substitut Romain Le Moël déclare que le prévenu n’a pas d’excuse, qu’il ait ou non reconnu l’intrus. Cela ne changeait rien à l’infraction. Il n’avait pas à tirer avec ce fusil calibre 12, balles en caoutchouc ou non, de près ou à sept mètres.

Il requiert trois mois de prison avec sursis et l’interdicti­on de détenir une arme.

« Un accident de parcours » ?

Me Laurent Taffou conscient de la modicité de la condamnati­on demandée espère que le tribunal n’aggravera pas cette peine car, dit-il, son client « a morflé plus que sa victime ». Il avait déjà fui l’affronteme­nt, chez les parents d’Anaïs, à Breuilpont. Il pouvait se demander ce qui comptait faire Henry en entrant dans cette propriété. Il était 3 heures du matin lorsqu’il a été réveillé et son amie n’avait rien dit de son appel à Henry. Il ignorait donc à qui il avait affaire. Il a tiré sans viser puis la seconde fois lorsque l’autre projetait de défoncer sa porte. C’est, dit le défenseur, un « accident de parcours » qui n’a rien à voir avec ses antécédent­s. Il ergote un peu sur les incapacité­s dues aux « cauchemars » de la victime et que son client « travailleu­r sérieux et sobre depuis son contrôle judiciaire » n’est pour rien dans les prolongati­ons des incapacité­s.

Son client prendra 18 mois de prison dont 6 avec sursis et mise à l’épreuve (2 ans) l’obligeant à se soigner, travailler et indemniser ; s’interdire de détenir une arme pendant cinq ans.

En tout, Émile se verra attribuer 24 465 euros (tous préjudices confondus) ainsi que 1 500 euros (art.475-1).

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