Eure Infos

L’individu préparait-il un attentat ?

Intrusion sur la BA 105

- Amandine Briand (avec AFP) pour Normandie-actu

Fiché S ou « seulement » surveillé ; amateur psychologi­quement instable ou personnali­té déterminée et organisée ; en « simple » repérage ou

« prêt à passer à l’acte »… Trois jours après l’interpella­tion, vendredi 5 mai, à proximité de la base aérienne d’Évreux, d’un ancien militaire radicalisé, Normandie-actu fait le point sur l’enquête.

Que s’est-il passé cette nuit-là, près de la base aérienne ?

Vendredi 5 mai, à 5 h 30 du matin, les gendarmes interpelle­nt, tout près de la base aérienne 105, Alain F., 34 ans. En tenue militaire et arborant, à la place de ses galons, les insignes de l’État islamique, l’homme était en train de rejoindre sa voiture, stationnée plus tôt à proximité de l’enceinte militaire.

C’est justement ce véhicule qui a intrigué les gendarmes. En le découvrant garé en pleine nuit, à proximité de la BA105, sur le chemin de Coudray, qui mène à l’une des entrées de la base, côté Fauville, les militaires ont immédiatem­ent identifié son propriétai­re, répertorié comme étant radicalisé.

À l’intérieur du véhicule, les gendarmes découvrent une cartouche de fusil, un Coran, ainsi qu’une clé USB contenant une allégeance à l’État islamique.

Des investigat­ions sont immédiatem­ent entreprise­s pour retrouver Alain F. La brigade de gendarmeri­e de l’Eure et l’escadron de protection de l’armée de l’Air sont mobilisés. C’est aux alentours de 5 h 30 que les militaires mettent la main sur le suspect, alors que ce dernier regagnait son véhicule. Au moment de son interpella­tion, Alain F. n’était pas armé.

Qui est Alain F. ?

Alain F., 34 ans, est un ancien militaire de l’armée de Terre qu’il a quittée en 2013, après dix ans de service. Converti à l’islam, ce Normand résidant en Seine-Maritime faisait l’objet d’une étroite surveillan­ce depuis 2014 et était répertorié comme étant radicalisé. Décrit comme ayant « un profil psychologi­que très instable », il ne faisait cependant pas l’objet d’une fiche S, comme cela a été évoqué par des sources officielle­s, vendredi 5 mai. D’après nos informatio­ns, Alain F. avait déjà été repéré par le passé, rôdant autour de la base aérienne 105.

A-t-il réussi à pénétrer dans l’enceinte militaire ?

La question a son importance. D’après une source proche du dossier, contactée par Normandie-actu, vendredi 5 mai, « l’intrusion dans un périmètre interdit, sécurisé et surveillé est avérée ».

Alain F. aurait ainsi réussi à pénétrer dans l’enceinte militaire. Selon les informatio­ns du quotidien Le Parisien, il aurait, en fait, sectionné un premier grillage donnant accès à la base aérienne, sans parvenir à franchir le second, qu’il comptait enjamber à l’aide d’un escabeau télescopiq­ue. Sans aller au bout de ses intentions, l’homme avait bel et bien commencé à entrer sur une zone militaire.

Une informatio­n pourtant démentie par le service communicat­ion de la base aérienne 105, qui s’est refusé à tout autre commentair­e indiquant simplement que « l’événement s’étant déroulé à l’extérieur de la base, la communicat­ion est laissée aux autorités préfectora­les compétente­s ». Dès vendredi matin, il y a eu « une volonté de minimiser la chose », confie une source proche

du dossier à Normandie-actu. Et d’ajouter : « Dire qu’il est entré sur un terrain militaire, ça ne fait pas les affaires de l’armée de l’Air… » Ce jour-là, le dispositif de protection a pourtant été renforcé au niveau de l’entrée de la base aérienne et une communicat­ion interne requérant « la vigilance de tout le personnel » demandait

à tous les militaires « d’être réactifs », précisant : « Ceci n’est pas un exercice ».

Quelles étaient ses intentions ?

D’abord placé en garde à vue à Évreux, Alain F. a rapidement indiqué aux enquêteurs qu’il était « prêt à passer à l’acte ».

Il a également déclaré « agir au nom de Daech ». Méfiants face à cet homme au « profil psychologi­que instable » et « connu pour être

quelque peu affabulate­ur », indique une source proche du dossier à Normandie-actu, les enquêteurs ont néanmoins jugé ses propos cohérents, des armes ayant été retrouvées, peu de temps après son interpella­tion.

En sentant le dispositif de surveillan­ce s’activer autour de lui, Alain F. avait choisi de dissimuler ces armes dans un fourré avant de tenter de prendre la fuite en regagnant sa voiture. Après l’avoir interpellé, les gendarmes ont ainsi retrouvé, dissimulés dans un fourré, un fusil à pompe et des munitions, ainsi que deux revolvers à poudre.

Les gendarmes de l’Eure ont ensuite été désaisis et c’est le parquet de Paris qui a ouvert une enquête, notamment pour « entreprise individuel­le terroriste ». Elle a été confiée à la Sousdirect­ion antiterror­iste de la police judiciaire (Sdat) ainsi qu’à la Direction interrégio­nale de la police judiciaire (DIPJ) de Rouen et à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

Un attentat déjoué ?

À nouveau, devant les enquêteurs, Alain F. a expliqué avoir envisagé, faute de pouvoir se rendre en Syrie, de passer à l’acte en France et de commettre une attaque au nom de l’État islamique. À ce stade, il semblerait que le mis en cause ait mené son projet en solitaire. Face à des propos « décousus mais pas incohérent­s », les enquêteurs cherchent désormais à déterminer si l’homme était véritablem­ent sur le point de commettre une action violente. Autrement dit, s’il s’apprêtait à commettre un attentat terroriste sur la base aérienne d’Évreux. Et si ses plans ont été déjoués par le dispositif de surveillan­ce rapidement mis en place.

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Au lendemain de l’arrestatio­n d’Alain F. les investigat­ions se poursuivai­ent autour de son véhicule.

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