À l’amende par la cour d’assises, les jurés défaillants au tribunal
Tirés au sort, les jurés de la cour d’assises doivent obligatoirement assister aux audiences. Pourtant, en cas de force majeure, ils peuvent bénéficier d’une dispense. Encore faut-il que les demandes adressées au président soient acceptées. Si tel n’est pas le cas, les absences sont sanctionnées par de lourdes amendes.
Malgré cette menace, plusieurs sessions de 2016 ont été marquées par des absences.
Un médecin sexagénaire de la vallée de l’Iton a assisté aux premiers jours d’un procès avant de disparaître. Malade, il avait transmis un certificat établi par lui- même pour expliquer son absence.
Le « mot d’excuse » ne mentionnant aucune information concernant la maladie, le médecin a été condamné à 500 € d’amende.
Ayant fait opposition, le juré manquant a finalement dû s’expliquer au tribunal d’Évreux.
« Je n’ai rien précisé en raison du secret médical. Les juges n’avaient pas à savoir. En fait, j’avais une gastroentérite sévère qui m’aurait obligé à sortir sans cesse. J’ai été honnête et j’ai été condamné » a-t-il argué.
Ces propos ont manifestement convaincu le procureur qui a rappelé que le médecin avait participé aux premiers jours du procès avant de se prononcer pour une relaxe. Le tribunal a suivi.
Site Internet ambigu
Le deuxième exemple montre les limites du fameux « Nul n’est censé ignorer la loi » . Cette fiction juridique indispensable pour échapper à la facile défense du « Je ne savais pas » , n’implique pas, fort heureusement, une connaissance approfondie de tous les articles. D’autant plus que, désormais, Internet peut apporter des réponses circonstanciées. À condition que les sites consultés, même officiels, soient clairs.
Un Ébroïcien, Bernard (prénom d’emprunt), 53 ans, a ainsi cru pouvoir échapper à sa fonction de juré en envoyant une lettre dans laquelle il expliquait que, responsable d’une petite entreprise, il ne pouvait se permettre de s’absenter sans mettre son affaire en péril. Il notait également, dans ce même courrier, qu’il avait un enfant handicapé.
La cour d’assises n’a pas accepté ces arguments et… Bernard ne s’est jamais présenté. Résultat : une amende de 400 €.
Ayant, comme le médecin, fait opposition, Bernard a déclaré au tribunal : « Mon fils aîné est handicapé à 80 % et j’ai lu, dans un guide pratique du ministère publié sur Internet, qu’il était possible d’être dispensé quand on a un enfant handicapé » .
« Vous auriez pu venir le premier jour pour vous expliquer de vive voix et bénéficier d’une dispense au moins partielle. Le guide en ligne fournit un exemple et non une certitude car c’est la cour qui apprécie. Si des dispenses sont accordées sur simple lettre, il n’y a plus de jurés ! » a rétorqué le procureur. Et d’ajouter : « Étant donné que votre activité commerciale permet difficilement votre absence et que le site du ministère vous a induit en erreur, je requiers une peine avec sursis » .
Le tribunal a également suivi le parquet en condamnant Bernard à 200 € avec sursis.