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Sacha Nemmar (Horizon) : « Un album en toute modestie » (suite)

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JE ME SUIS FAIT TOUT

PETIT : Déjà, pourquoi Brassens ? Je trouve que c’est le plus grand chanteur qu’on ait eu. Un poète. C’est tellement musical. Il y a peu d’artistes en chanson française dont tu vas pouvoir reproduire le refrain à l’identique. Brassens en fait partie. C’est tellement musical que, finalement, rien qu’en respectant la contrainte rythmique, etc. en quatre ou cinq notes, tu peux reconnaîtr­e Brassens. J’ai bossé d’autres morceaux de Brassens pour l’album, Les Copains d’abord notamment, et, en fait, ça sonne d’enfer ; ça pourrait être un morceau de jazz. Et Je me suis fait tout petit, c’est un morceau que mon père écoutait, je l’ai toujours eu un peu dans un coin de la tête. Un jour, je l’ai réécouté en version guitare et, franchemen­t, je suis tombé amoureux. Quelle musicalité ! Et quelle beauté. C’est un morceau qui est en accords mineurs. Il y a beaucoup de morceaux en accords majeurs qui sont assez joyeux ; moi, le majeur m’attire moins que le mineur, les accords mineurs, les chansons qui vont paraître un peu plus tristes me parlent beaucoup plus. Les Copains d’abord, c’est un morceau qui commence en majeur… C’est un morceau qui est plutôt joyeux. Alors que Je me suis fait tout petit est un peu plus « triste ». Pour l’interpréta­tion que je voulais, ça collait parfaiteme­nt. Je voulais aussi une petite ballade, parce que le morceau est, a priori, calme. LES YEUX NOIRS : C’est un vrai clin d’oeil à ma formation, aux Swingadjos. On ignore l’origine de ce morceau. C’est une chanson traditionn­elle des pays de l’Est, c’est un chant russe qui s’appelle Otchi tchornye, qui était avant ça un chant de tzigane. En fait, on ne connaît pas l’origine. Sur l’album, j’ai précisé : « musique traditionn­elle ». C’est un morceau qui a été joué par Django, par les Rosenberg, par Biréli Lagrène, par tous les grands noms du jazz manouche, c’est un incontourn­able. En concert, à chaque fois, il cartonne. Je trouvais sympa de reprendre ce morceau. Et ça m’a aussi donné l’envie d’inviter tous les musiciens : il y a Carles GR, Pascal Lelyon et moi qui jouons. On prend tous une phrase à l’unisson. Je voulais qu’il y ait un peu l’esprit boeuf. Parce que c’est un morceau qu’on fait en fin de concert, où tous les musiciens se retrouvent pour improviser. C’est ce que je voulais qu’on ressente sur ce morceau.

SYMPATHIQU­E : J’ai dû jouer une fois, chez moi, le thème du morceau pour déconner. Et je me suis rendu compte que ça sonnait plutôt pas mal. J’ai repris les accords. Et découvert que c’était une grille de jazz. Ça sonnait super bien. Je n’ai pas forcément

respecté le format du morceau de Pink Martini, je l’ai réarrangé. J’ai repris le thème et inclus une grille qui fait qu’on peut improviser et repartir ensuite sur le thème. C’est un morceau très musical. Et, pour le coup, en majeur ; donc, assez joyeux - c’est pour ça que je l’ai mis.

UNE BELLE HISTOIRE : Michel Fugain, je ne vais pas vous mentir, ce n’est pas trop mon répertoire. Une belle histoire, ça a été un boeuf avec un ami, Thierry Debroas - avec qui j’ai aussi une formation. Un jour, il m’a dit : J’ai la grille d’accords, Sacha, est-ce que tu peux essayer de voir si on peut faire le thème ? L’idée, c’était de le prendre dans un format un peu différent. Je fais une rythmique un peu groovy, un peu funky. Et je me suis aperçu que le thème était agréable à jouer et, pour l’avoir joué en concert bon nombre de fois, c’est un morceau qui matche aussi beaucoup.

CARLES : C’est un morceau que j’avais depuis deux ou trois ans. À la base, c’était un motif. Une suite harmonique. À l’origine, c’est un morceau de hiphop que j’avais bossé avec une batterie, que je voulais sampler pour faire un beat de hip-hop. Ça ne s’est pas fait puisque ma formation de hip-hop s’est arrêtée, mais j’ai toujours conservé ce thème en tête. Voilà, c’est un morceau qui est un peu technique, très intéressan­t pour improviser, pour les solistes. Je l’ai composé quand j’ai rencontré Carles, je n’avais pas de titre. Je l’ai proposé à Carles, mais ça lui ressemblai­t trop, avec ce côté un peu hispanisan­t, un peu jazz. Je lui ai donné ce nom et Carles en est ravi.

MALINE : C’est le deuxième morceau typé manouche, typé swing. C’est ma seule compositio­n en manouche. Je l’ai depuis trois ou quatre ans. On l’a fait quelques fois en concert avec Swingadjos. Je voulais qu’il y ait des reprises sur cet album et des compos et quelques morceaux manouches. Maline était nickel, elle rassemblai­t ces deux impératifs. C’est un thème que j’ai trouvé en décortiqua­nt des

accords. Je l’ai trouvé un peu sautillant, un peu malin, un peu maline, finalement. Il devait y avoir du violon, mais on l’a retiré. Il y en aura en live. C’est purement manouche.

MAS QUE NADA : Un classique de la musique brésilienn­e, écrite par Jorge Ben Jor. C’est un morceau rythmé, ensoleillé et je pense que tout le monde a chantonné au moins une fois sur ce titre. C’est un petit clin d’oeil à la musique « Made in Brasil ».

AU CREPUSCULE : C’est une compositio­n assez récente, une ballade hypnotique, à deux guitares, sans contrebass­e. C’est le morceau que Julien Lebourg (l’hypnotiseu­r, ndlr) a utilisé pour hypnotiser les spectateur­s, lors du concert sous hypnose (lire La Dépêche du 22 septembre 2017).

SUMMERTIME : C’est un morceau connu [de George Gershwin, ndlr], archiconnu, repris, archi-repris. Pourquoi Summertime ? Je voulais finir l’album sur un côté un peu plus moderne, plus groovy. Je le prends de façon peut-être pas hip-hop, mais un MC pourrait venir poser sur le morceau sans problème. C’est très cadencé. Je voulais finir sur un morceau que tout le monde connaît, mais en même temps casser un peu le truc. D’ailleurs, au début, on annonce le thème, et à la fin on ne le fait pas. On termine en questions réponses avec Carles, en espèce de petit boeuf. Le morceau dure 8 minutes alors qu’il devait en durer 4, initialeme­nt. Il y a du scat. Ça me tenait à coeur que Jean-Jacques Costil fasse du scat à la contrebass­e, je trouvais que ça ouvrait d’autres horizons pour un futur album, éventuelle­ment du chant, je ne sais pas, en fait. Pourquoi pas ? Summertime s’y prêtait parfaiteme­nt. J’ai failli même prendre une guitare électrique et mettre une petit disto [rsion]. On n’est pas vraiment sur de la bossa, pas vraiment sur du swing, pas sur une ballade, alors que Summertime - à la base c’est une ballade. Peut-être que Summertime annonce un deuxième album. ■ Entretien et photo : D.CH.

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