Un an de retard sur la fibre
Soumis aux aléas techniques et à la baisse de son action en Bourse, l’opérateur SFR doit revoir ses prévisions calendaires. Et diviser par trois le nombre de foyers ébroïciens alimentés en fin d’année…
« On passe de l’obscurantisme numérique à la diffusion de la connaissance et ce, de manière équitable » L’an dernier, à la même époque, Arnaud Mabire - vice-président en charge du développement des usages numériques à l’Agglo ne cachait pas son optimisme à l’heure de lever le voile sur le déploiement de la fibre optique.
Pas en reste, les grands pontes de l’opérateur SFR annonçaient, droit dans les yeux : « fin 2017, près de 12 000 foyers ébroïciens bénéficieront du très haut débit », l’ensemble du territoire devant être couvert à l’horizon 2020, avec la bagatelle de 32 000 foyers connectés. Applaudissements dans la salle, l’auditoire saluant la fin des zones blanches…
« Des difficultés techniques »
Onze mois plus tard, les maîtres d’oeuvre et d’ouvrage redescendent de leur petit nuage numérique. Au point de déchanter ?
« Effectivement, le chantier a pris du retard, un an environ » a même convenu Guy Lefrand lors de sa dernière réunion de quartier, à la médiathèque d’Évreux.
Alors, qu’en est-il réellement aujourd’hui ? « Il ne faut pas nier de réelles difficultés techniques » convient Arnaud Mabire. On peut, notamment, citer les «liaisons aériennes», avec des études de portance à mener.
« Il arrive, en effet, que SFR - conventionnée avec Enedis - soit amené à changer des poteaux, ce qui peut rallonger les délais » Autre souci, plus «inédit» : les fourreaux enterrés chez des particuliers, ou alors saturés, voire cassés… comme si un vilain chat noir rôdait dans les parages. « N’oubliez pas qu’en 2015, l’opérateur a changé de sous-traitants et, de ce fait, perdu un an par rapport aux prévisions. »
« SFR joue sur la sémantique »
À ce jour, 15 % des foyers ébroïciens sont éligibles, soit environ 4 000.
Mais éligibles ne signifient pas connectés, car il peut s’écouler trois mois entre le raccordement au Point de Mutualisation, et l’arrivée de la fibre au domicile du particulier.
« SFR joue sur la sémantique : quand l’opérateur annonce la fibre dans les quartiers, le citoyen comprend dans son salon ! » confirme Arnaud Mabire, conscient du trouble occasionné. A fortiori quand ce souci sémantique se double d’une politique commerciale agressive !
« Les premiers temps, Orange, par exemple, s’est montré particulièrement insistant » évoque Jean-Paul Levourc’h, domicilié à Nétreville. Mais depuis, tout semble être rentré dans l’ordre, avec un très haut débit livré en temps et en heure. Sans bourse délier, si ce n’est l’abonnement ad hoc.
« Par contre, il arrive que le particulier se heurte au problème suivant : si l’arrivée n’est pas possible en souterrain, l’opérateur fait passer une canalisation entre le domaine public et la maison, opération à la charge du résidant » Et là, ce n’était pas forcément spécifié dans le contrat !
Seuls 3 724 foyers éligibles à Évreux
Chahuté en Bourse, l’opérateur SFR a «débarqué» son directeur général Michel Paulin, le cinquième en cinq ans !
On s’en souvient, le patron était venu, en personne à Évreux, lancer officiellement l’opération et baptiser le Noeud de Raccordement Optique (sis à Gravigny) qui permet d’irriguer les Points de Mutualisation et armoires de rues.
« Sur l’ensemble du territoire du GEA, nous serons en mesure d’installer 117 PM » ambitionnait alors le patron. Contrat rempli ? À ce jour, 102 Points de Mutualisation ont été étrennés… mais seulement 4 689 foyers seront déclarés éligibles, à la fin de l’année : 3 724 à Évreux, 965 à Gravigny. Cherchez l’erreur !
« En tant qu’élu, je n’ai aucune vision des contraintes techniques, et du degré d’avancement des travaux. En fait, SFR n’a pas le droit de communiquer » admet Arnaud Mabire avant de rapporter une évidence : « ce n’est pas le projet de l’Agglo, mais celui de l’opérateur. »
Point final en 2020 !
En tenant compte de tous les impondérables techniques et des fluctuations de la Bourse, on en sait un peu plus, aujourd’hui, sur l’évolution du chantier.
« Théoriquement, fin 2018, tout devrait être bouclé sur Évreux, Arnières, Angerville, Gravigny et Saint-Sébastiende-Morsent » subodore le viceprésident de l’Agglo qui espère un point final en 2020, avec 42 000 foyers raccordés au très haut débit. Soit 37 communes sur les 74 que compte, désormais, la nouvelle EPN.
Mais quid des 37 communes restantes ? « Leur sort est entre les mains d’Eure Normandie Numérique » précise Arnaud Mabire, impatient de trouver la lumière après plusieurs années d’obscurantisme numérique…