L’art, comme un signe d’ouverture
Directeur de l’établissement Moissons Nouvelles, à Nétreville, Guy Bernard Aboulin multiplie les initiatives solidaires et artistiques pour aider à la reconstruction de ses «protégés»…
« Il faut aérer, décloisonner, s’ouvrir sur l’extérieur. » À la tête de Moissons Nouvelles depuis 2010, Guy Bernard Aboulin n’a de cesse de briser les codes et les frontières tout en développant une politique solidaire : « notre maison vit bien, car elle ne dit jamais non à l’accueil. »
Dans cette optique, le directeur de l’établissement a paraphé toute une série d’actions, s’appuyant notamment sur l’art pour émanciper socialement ses 96 «protégés», âgés de 6 à 21 ans.
« Certains sont en réelle détresse sociale, affective et psychologique. Vous n’imaginez pas le travail de reconstruction à accomplir. Mais on a foi en notre action », postulat que partagent les 46 membres du personnel, dont 25 éducateurs…
Jardins collaboratifs
À raison d’une idée par minute, Guy Bernard Aboulin a déjà dressé les grandes lignes de son projet social et artistique.
« En sachant qu’un tiers de la population concerne des migrants issus du continent noir, je vais organiser un repas de Noël africain » ambitionne notre directeur qui, dans un autre domaine, a déjà ouvert les portes de son établissement à l’association Les Incroyables Comestibles. L’enjeu ? Créer des jardins et potagers collaboratifs au sein même de l’institution !
« C’est un exemple, parmi tant d’autres, de la cohabitation qui doit prévaloir entre les associations, les habitants, les familles et les enfants des écoles du quartier » A leur intention, le «patron» de Moissons Nouvelles a également invité une chanteuse de jazz, des plasticiens, des peintres et des dessinateurs.
Cerise sur le gâteau : les 12 et 13 décembre, Joël Ducorroy distillera son art à tous les acteurs qui, à titres divers, gravitent autour de la structure.
De Warhol à Gainsbourg !
Révélé par ses sérigraphies inspirées d’Andy Warhol et ses rencontres avec un certain… Serge Gainsbourg, Joël Ducorroy est invité à «revisiter» la cage d’escalier des Moissons Nouvelles, en collaboration avec les résidants, la population et les élèves de Paul-Éluard et JacquesCartier, à Nétreville.
« Il va quadriller la cage de métaux fins, des plantes vont pousser, entretenues par les habitants. En parallèle, tous les participants vont bâtir une oeuvre collective à partir d’un mot formulé par chacun et que Joël Ducorroy s’appliquera à mettre en forme », un concept que l’intéressé résume de la sorte : « exprimer plutôt que représenter ! Lire, c’est comprendre l’oeuvre ! »
« Des situations dégradées »
Inédit, le projet devrait courir sur six mois. Avant la touche finale.
« Ce travail, on va l’éclairer comme une oeuvre d’art » apprécie le directeur, impatient d’inscrire cette rencontre dans un processus global. « La venue de Joël Ducorry fait partie de cette solidarité que je veux créer dans le quartier. »
Car derrière le discours volontariste, se dessine une réalité bien concrète, celle d’un quotidien aux contours dévastés, entre ruptures, incestes et violences intra-familiales.
« Nous fonctionnons comme un établissement médico-social. Dès lors, nous accueillons des enfants de tout le département, voire de l’Orne ou de Seine-Maritime. Inutile de vous dire que certaines situations sont extrêmement dégradées » ne peut qu’admettre Guy Bernard Aboulin.
Mais pas question de déroger aux principes fondateurs : « On n’est pas là pour s’approprier les enfants, mais pour recréer du lien entre eux et leurs parents » Comme une espérance derrière les murs du bien nommé Moissons Nouvelles…