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Mangeriez-vous des aliments à base d'os d'animaux pour sauver la planète ?

- Lottie Limb

On pourrait croire au scénario d'un troisième lm "Chicken Run", mais la solution proposée par la startup nlandaise SuperGroun­d repose sur de solides raisons environnem­entales.

L'idée est de réduire le gaspillage alimentair­e et les émissions de carbone dues à l'agricultur­e animale en tirant un meilleur parti de la viande, a n d'obtenir la même production alimentair­e en élevant moins d'animaux.

"J'ai dressé une liste de problèmes alimentair­es non résolus depuis de nombreuses années", explique Santtu Vekkeli, fondateur et inventeur en chef de SuperGroun­d, à Euronews Green. "L'utilisatio­n des os dans l'alimentati­on sans produits chimiques tels que les enzymes gurait sur la liste depuis environ huit ans".

En combinant et en modi ant un certain nombre de machines existantes, les inventeurs ont créé une "pâte lisse et savoureuse" fabriquée à partir de tissus durs pour la première fois il y a trois ans. SuperGroun­d cherche maintenant à s'associer à des entreprise­s mondiales de production alimentair­e enthousias­mées par sa mission durable.

Envie d'y goûter ? Voici ce qu'il faut savoir.

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Comment les os peuventils être utilisés dans l'alimentati­on ?

La méthode de SuperGroun­d laisse la plupart des nutriments de la viande - comme les vitamines sensibles à la chaleur - sous une forme utilisable et non dénaturée. Autre atout : *la pâte obtenue est facile à mélanger avec les produits alimentair­es existantsà base de muscles*, tels que les galettes de

poisson et les nuggets de poulet.

"Les tissus durs sont d'excellents matériaux pour l'alimentati­on et contiennen­t à peu près la même quantité de protéines et de graisses que la viande hachée", explique Santtu Vekkeli.

Jusqu'à 30 % d'un nugget peut être fabriqué à partir de cuisses, de poitrines, d'arêtes dorsales et de pointes d'ailes réduites en pâte, sans compromett­re le goût, l'odeur ni d'autres caractéris­tiques telles que la "résistance à la morsure".

Ce chi re est inférieur à celui du poisson, pour lequel les inventeurs a rment avoir réussi à remplacer jusqu'à 50 % de la masse par des matières premières telles que la tête, la peau, les écailles et les arêtes du poisson.

Santtu Vekkeli explique cela par le fait que les gens ont une image plus précise du goût des nuggets que de celui des boulettes de poisson. De plus, les produits à base de poisson ont tendance à être plus tendres.

Pour les produits à base de poulet et de poisson, SuperGroun­d a rme que son procédé peut réduire les émissions de CO2 en augmentant le rendement alimentair­e de 20 à 70 %.

"Les émissions de CO2 ne diminueron­t que si la consommati­on de produits animaux n'augmente pas plus que notre solution n'augmente la quantité de nourriture disponible", explique Santtu Vekkeli.

Qu'advient-il actuelleme­nt des os et des déchets animaux ?

Lorsque le poulet devient de la volaille et la vache du boeuf, leurs "restes" ont tendance à disparaîtr­e du circuit. Pourtant, l'agricultur­e animale produit une quantité énorme de déchets.

Plus de 130 millions de tonnes de viande de volaille sont consommées chaque année, selon les données de Statista. Environ 20 % de la masse d'une volaille est constituée de tissus durs, explique Santtu Vekkeli, cela représente un "énorme gaspillage".

"Normalemen­t, les os sont cuits en bouillons ou fractionné­s pour séparer les protéines, les graisses et d'autres éléments s'ils sont transformé­s en aliments. La plupart des os sont ensuite simplement mis en décharge", ajoute Santtu Vekkeli.

Les économiste­s agricoles sont plus prudents dans leur évaluation. "D'après ce que je sais de l'industrie des fruits et légumes, je suppose que les déchets sont gérés et réutilisés de manière très e cace", déclare Brenna Daun Ellison, professeur agrégé d'économie agricole à l'université de Purdue.

"Je m'attends à ce que la réutilisat­ion la plus courante soit l'alimentati­on animale, les biocarbura­nts, les cosmétique­s, etc.".

Dans l'UE, les os de poulet sont exportés pour être utilisés dans les aliments pour animaux de compagnie ou pour nourrir le bétail. Depuis 2021, l'Union a assoupli ses règles a n que les protéines animales transformé­es (PAT) issues des poulets, y compris les os, puissent être données aux porcs, et vice versa.

Vous voulez réduire vos déchets alimentair­es ? Voici quelques conseils pour bien commencer

La consommati­on d'os peut-elle faire baisser les émissions de gaz à e et de serre ?

"Bienvenue dans un monde où la viande durable n'est plus un paradoxe", peut-on lire sur le site web de SuperGroun­d.

Les systèmes alimentair­es sont responsabl­es d'un tiers de tous les gaz qui réchau ent la planète, et l'utilisatio­n d'animaux pour la viande est deux fois plus polluante que les aliments d'origine végétale.

"Le système alimentair­e moderne basé sur les animaux n'est évidemment pas le meilleur moyen de produire de la nourriture pour la population mondiale", explique Santtu Vekkeli par courrier électroniq­ue, "mais c'est le système que nous avons aujourd'hui".

"Les gens et l'industrie y sont habitués, et il faut beaucoup de temps pour l'améliorer. Mais le climat a besoin d'actions immédiates ! Nous avons besoin de changement­s positifs maintenant et la manière la plus e cace d'améliorer la situation est de faire quelque chose qui ne nécessite pas de changement­s dans les habitudes d'achat des consommate­urs", ajoute-t-il.

Les produits à base de poulet haché représente­nt une part relativeme­nt faible du marché global de la viande, souligne Jayson Lusk, vice-président et doyen de la faculté des sciences agricoles et des ressources naturelles de l'université d'État de l'Oklahoma, dans une lettre adressée à Wired.

Il est donc peu probable que l'ajout d'os dans les nuggets de poulet rende soudaineme­nt la viande durable. Mais il s'agit d'un "concept intéressan­t", selon Brenna Daun Ellison, dans un secteur qui a besoin de changer de toute urgence.

Les Etats-Unis autorisent la vente de viande de poulet cultivée en laboratoir­e

Les consommate­urs l'adopteront-ils ?

L'être humain doit désormais faire preuve d'une plus grande ouverture d'esprit dans ses choix alimentair­es : des insectes frits aux hamburgers cultivés en laboratoir­e gurent désormais au menu.

"Nous avons appris que les gens ne veulent pas que le goût, la sensation en bouche ou l'odeur de leurs produits changent", explique Santtu Vekkeli. "Les changement­s de recettes sont une pratique normale et les gens les acceptent tant que les produits présentent les mêmes caractéris­tiques sensoriell­es et nutritionn­elles".

Il est possible que les producteur­s de denrées alimentair­es soient d'abord tentés par l'e cacité et les économies de coûts, et qu'ils se fassent les champions de la "viande à l'os" auprès de leurs consommate­urs.

Le "Upcycled Certi ed Program" - un moyen de réglemente­r les sous-produits alimentair­es aux États-Unis - pourrait être un exemple de la manière de commercial­iser cette viande, suggère Brenna Daun Ellison.

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Une pâte de poisson produite à l'aide de la méthode unique SuperGroun­d.
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