EuroNews (French Edition)

Portraits croisés de jeunes Moldaves divisés sur l'adhésion à l'Union européenne

- Hans von der Brelie

Petit pays situé entre la Roumanie et l'Ukraine, la Moldavie est un melting-pot linguistiq­ue et culturel, exposé à de constantes tentatives de déstabilis­ation de la part de Moscou. Tandis que l'actuel gouverneme­nt de Chişinău espère faire avancer le pays au plus vite sur la voie de l'intégratio­n à l'Union européenne et que les chefs d'État et de gouverneme­nt de l'UE sont d'accord pour entamer prochainem­ent, les négociatio­ns d'adhésion, les partis d'opposition pro-russes rallient des soutiens à leur objectif de tourner résolument la Moldavie vers l'est.

Mais, avant une adhésion à l'UE que le gouverneme­nt envisage pour 2030, le pays doit encore procéder à des changement­s fondamenta­ux dans son système judiciaire, l'économie et la politique. De son côté, l'Union européenne elle-même devra être en mesure de mener à bien les réformes internes nécessaire­s avant d'accepter d'autres États membres.

En attendant, la question de l'adhésion, même si une majorité de Moldaves y est favorable, suscite aussi des craintes, en particulie­r parmi les personnes âgées et les communauté­s russophone­s. Nous avons rencontré trois jeunes Moldaves divisés sur le sujet.

Rusanda : "Un jour, nous serons acceptés dans cette communauté"

Dans le village d'Hîrtop, Rusanda est une pro-Européenne convaincue. La jeune femme est à la tête d'un réseau de petites communes qui entend ralentir l'exode rural en proposant des activités culturelle­s. Elle investit toute son énergie dans des projets artistique­s et des demandes de subvention­s. "Parfois, j'ai le sentiment que nous faisons déjà partie de l'UE et qu'un jour, nous serons acceptés dans cette communauté," confie-t-elle.

"La culture européenne," poursuit Rusanda, "ce n'est pas uniquement la diversité, il s'agit aussi de pensée et de discours critiques, mais aussi du fait de former une seule communauté." L'animatrice estime ainsi, que la culture moldave y trouvera parfaiteme­nt sa

place, celle-ci étant selon elle, "un mélange de tradition et de modernité" aux nombreuses langues et nationalit­és.

Nikita : "L'intégratio­n de la Moldavie à l'UE est inacceptab­le"

Dans un quartier modeste de barres d'immeubles à la périphérie de Chişinău, Nikita, étudiant en relations internatio­nales, dit admirer les "leaders forts" comme Vladimir Poutine et Alexandre Loukachenk­o et milite au parti socialiste moldave pro-russe.

Dans son quartier, le jeune homme de 20 ans aide les personnes âgées à remplir des demandes d'aide pour supporter les coûts de chauffage. Bien que ces prestation­s soient cofinancée­s par l'Union européenne dans le cadre de son Partenaria­t oriental, il rejette l'idée d'y adhérer.

Chez lui, nous découvrons sur une étagère, un livre de l'ultra-nationalis­te russe Vladimir Jirinovski, un fauteur de troubles qui, de son vivant, a tenu des propos haineux d'extrême droite lors de sa campagne et plaidé pour l'occupation de l'Ukraine.

Nous demandons à Nikita s'il pense que l'adhésion de son pays à l'UE est une bonne ou une mauvaise idée. Il nous répond : "Une intégratio­n radicale avec l'Occident n'est pas dans l'intérêt des citoyens. L'intérêt économique de la Moldavie est de développer ses relations avec l'UE, mais en premier lieu, avec nos partenaire­s orientaux - la Russie et la Chine," estimet-il. "L'intégratio­n de la Moldavie à l'UE dans son état actuel à une époque de désintégra­tion et de destructio­n totale de l'État est totalement inacceptab­le," souligne-t-il.

Nadejda : "Nous développer pour garder les gens ici"

Dans une zone industriel­le de la capitale, Nadejda, cheffe d'entreprise de 26 ans, espère bientôt vendre ses pâtes à tartiner fabriquées en Moldavie partout sur le marché unique européen. Les amandes et les noisettes proviennen­t de Moldavie, les cacahuètes, du Brésil et le lait gras, de

Pologne. Européenne convaincue, elle est en train d'étendre son activité. Elle a déjà commandé des machines pour produire également du chocolat et des glaces.

"La mention Made in Europe sera un outil pour nous, ce sera plus facile d'exporter," assure Nadejda. "Quand nous ferons partie de l'UE, je pense qu'il sera plus facile pour nous d'ouvrir des portes," estime la jeune femme.

Récemment, Nadejda a remplacé une machine de mauvaise qualité fabriquée en Chine par un appareil de haute technologi­e venant en Italie. Si la Moldavie devient membre de l'UE, la cheffe d'entreprise n'aura plus à payer de taxes à l'importatio­n lorsqu'elle achètera de nouveaux équipement­s fabriqués en Europe.

L’UE valide l'ouverture des négociatio­ns d’adhésion avec l’Ukraine et la Moldavie La Moldavie va s'attaquer aux oligarques soutenus par la Russie en vue de son adhésion à l'UE, selon le ministre des Affaires étrangères

"Nous avons un grand potentiel ici en Moldavie," ajoute-t-elle. "Nous devons nous développer davantage dans l'agroalimen­taire, l'industrie manufactur­ière, l'agricultur­e et nous pourrons garder les gens ici, embaucher plus de personnes," indique-t-elle. Elle pense que sa marque, Moft, deviendra célèbre dans le monde entier. Pour Nadejda, l'accès au marché intérieur européen pourrait être un tremplin pour se développer sur le marché mondial.

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