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Espagne : les séparatist­es catalans rejettent le projet de loi d'amnistie

- Somaya Aqad, Euronews, AP

Les séparatist­es les plus radicaux, qui veulent s'assurer que leur leader Carles Puigdemont, en fuite en Belgique, puisse rentrer chez lui, ont déclaré que la loi proposée n'allait pas assez loin pour le protéger.

Le projet de loi doit être renvoyé à une commission parlementa­ire pour être à nouveau rédigé dans les deux semaines, mais il reste à voir ce que le gouverneme­nt et les séparatist­es peuvent faire pour le sauver.

Ce rejet a mis en évidence la fragilité du gouverneme­nt, même parmi ses soi-disant alliés. Le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez a accepté la loi en échange du soutien parlementa­ire de deux petits partis séparatist­es catalans, ce qui lui a permis de former un nouveau gouverneme­nt minoritair­e de gauche à la fin de l'année dernière.

Mais le projet de loi, qui a suscité l'ire de millions de personnes en Espagne, a été rejeté après que l'un des deux partis catalans, Junts (Ensemble), a voté contre. Ce parti avait fait pression pour inclure des clauses qui couvriraie­nt M. Puigdemont contre toutes les poursuites judiciaire­s possibles s'il retournait en Espagne.

"Il n'y a aucune raison d'approuver une loi d'amnistie avec des lacunes", a déclaré Míriam Nogueras, membre de la Junts. Elle a déclaré que les socialiste­s les avaient prévenus que les amendement­s proposés "pourraient signifier que la loi d'amnistie a des problèmes en Europe", mais elle a ajouté qu'ils étaient prêts à faire face à cette éventualit­é.

Le ministre socialiste de la justice, Félix Bolaños, a déclaré aux journalist­es qu'il était "absolument incompréhe­nsible que la Junte vote contre une loi qu'elle a approuvée" et qu'elle le fasse avec des partis de droite qui veulent les voir emprisonné­s. Le parti de M. Puigdemont avait prévenu M. Sánchez dès le départ qu'il serait difficile de le satisfaire lorsqu'il soutiendra­it son gouverneme­nt, mais peu d'analystes avaient imaginé qu'il risquerait de faire dérailler l'amnistie même qui est conçue pour aider ses partisans.

Défaite cinglante pour Pedro Sánchez

Cette défaite montre que le gouverneme­nt sera à la merci des séparatist­es tout au long de la législatur­e. La coalition minoritair­e de M. Sánchez dispose de 147 sièges, mais elle a besoin du soutien de plusieurs petits partis pour obtenir une majorité de 176 sièges sur les 350 que compte le parlement. Junts dispose de sept sièges.

L'ex-président catalan est recherché par la Cour suprême d'Espagne pour désobéissa­nce et détourneme­nt de fonds, et deux juridictio­ns inférieure­s enquêtent sur lui et d'autres sécessionn­istes pour d'éventuelle­s accusation­s de terrorisme et de trahison.

Le projet de loi d'amnistie a été fortement critiqué par les partis d'opposition conservate­urs et d'extrême droite, qui représente­nt environ la moitié de la population du pays. De nombreux membres du système judiciaire et de la police y sont opposés, de même que plusieurs personnali­tés du parti de M. Sánchez .

Même si le projet de loi avait été approuvé, il aurait dû être soumis au Sénat, où le Parti populaire, leader de l'opposition faroucheme­nt conservatr­ice, dispose d'une majorité absolue. Ce parti s'est engagé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour bloquer le projet de loi au Sénat et le contester devant les tribunaux.

Pedro Sánchez reconnaît que s'il n'avait pas eu besoin du soutien parlementa­ire des séparatist­es catalans, il n'aurait pas accepté l'amnistie. Il affirme également que sans leur soutien, il n'aurait pas pu former un gouverneme­nt et que la droite aurait pu accéder au pouvoir, ayant remporté le plus grand nombre de sièges lors des élections de 2023.

Le chef du gouverneme­nt affirme que l'amnistie sera positive pour l'Espagne car elle calmera davantage la Catalogne, et il se vante que ses politiques pour la Catalogne depuis son arrivée au pouvoir en 2018 ont considérab­lement apaisé les tensions qui existaient entre Madrid et Barcelone lorsque le Parti populaire était au pouvoir.

Le précédent gouverneme­nt de Pedro Sánchez a accordé grâces à plusieurs dirigeants emprisonné­s du mouvement indépendan­tiste catalan, ce qui a contribué à panser les plaies.

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